3.3
Problématique de la qualité de la formation initiale des
enseignants
La reconnaissance de la nécessité et de
l'importance de la formation des enseignants qui se traduit entre autres par
l'existence d'une panoplie de modèles de formation ne doit pas nous
amener à perdre de vue que dans la mise en oeuvre des difficultés
réelles existent quant à l'atteinte des résultats
poursuivis. En effet, en dépit de l'existence de modèles
multiples, la formation initiale des enseignants soulève des
problèmes inhérents à la complexité de la
profession d'enseignant elle-même.
« La formation initiale des enseignants doit
leur apporter les aptitudes nécessaires à l'enseignement -
surtout s'agissant des élèves défavorisés et des
petites classes - et assurer les bases d'une formation continue. Mais cette
formation initiale ne réussit pas toujours à préparer les
enseignants à dispenser une éducation de bonne qualité et
équitable» (UNESCO, 2014).
Face à cette réalité indéniable,
l'on est en droit de se demander quels sont les obstacles majeurs qui se posent
dans la formation initiale des enseignants et auxquels il faut faire face. La
formation des enseignants connait une diversité de problématiques
dont certaines sont partagées par beaucoup de pays. Au nombre de ces
problèmes récurrents, nous pouvons évoquer, le profil des
entrants et la durée de la formation, l'adéquation entre les
programmes de formation et les besoins réels des enseignants, la place
de la théorie et de la pratique dans la formation des enseignants et le
développement des compétences professionnelles.
3.3.1 De la durée et des
programmes de formation
Il existe de plus en plus une certaine unanimité quant
à la nécessité de la formation initiale formelle des
enseignants. Cependant cette unanimité ne se déteint pas sur les
modalités à mettre à oeuvre pour assurer une formation
initiale de qualité aux enseignants. Les uns prônent une
formation initiale de courte durée pendant que les autres sont pour
l'allongement de la durée de formation jusqu'au niveau maîtrise.
Le Comité syndical européen de l'éducation (2008) soutient
que tous les enseignants devraient avoir une formation professionnelle
équivalant au moins au niveau master. Selon cette vision partagée
en Europe, la durée de la formation pourrait garantir l'acquisition de
capacités suffisantes par les enseignants par une formation en
quantité et en qualité. Schwille et Dembélé (2007),
ne semblent pas être dans cette logique lorsqu'ils affirment que l' on
n'a pas la preuve que le développement des compétences est plus
efficace avec des programmes de formation initiale de longue durée que
des programmes d'apprentissages bien conçus et bien financés.
Dans la recherche d'une formation de qualité des
enseignants, la question du temps, de la durée de la formation s'invite
au débat. En effet, la durée de la formation varie d'un pays
à l'autre selon les contextes économiques ou politiques qui
prévalent.Ainsi, Pour Morales (2012), dans les pays
développés la durée moyenne de formation initiale des
enseignants du primaire ou du secondaire tourne autour de quatre ans et est
assurée par les universités ou des Instituts Universitaires de
Formation des Maîtres(IUFM). Dans ces conditions, le baccalauréat
est d'office le diplôme de base pour le recrutement. Lorsqu' on prend
l'exemple de la Finlande et du Québec qui font partie des
systèmes éducatifs les plus performants d'Europe, les
durées de la formation initiale de leurs enseignants sont respectivement
de 5 ans et de 4 ans d'études universitaires (Morales, 2012).
Le Burkina Faso, n'est pas étranger à la
problématique de la durée de la formation initiale des
enseignants. En effet, elle a varié entre 1 an et 2 ans depuis 1985,
date de l'ouverture de la première Ecole Nationale des Enseignants du
Primaire (Segueda, 2008). Nous sommes alors encore loin de la
réalité des pays développés non seulement du point
de vue de la durée mais aussi en ce qui concerne le diplôme
d'entrée qui demeure jusqu'à présent le Brevet Etudes du
Premier Cycle (BEPC). Dans les pays pauvres, le manque de ressources
financières conjuguées souvent à la
nécessité de recruter et de former un grand nombre d'enseignants
pour faire face aux besoins immenses contraignent parfois les gouvernements
à fermer les yeux sur le niveau de recrutement et la durée de la
formation (Coulibaly, 1997). Toutes choses qui entachent la qualité de
la formation. C'est pourquoi les politiques nationales de formation des
enseignants ont souvent fait l'objet de critiques de la part des acteurs de
l'éducation. Bembamba (2005), indexe la durée de la formation
initiale des enseignants qui était d'une année ainsi que le
profil d'entrée et le mode de recrutement comme faisant partie des
entraves à une formation de qualité des enseignants.
Face à cette insuffisance, nous pensons que le temps
consacré à la formation doit être proportionnel aux
contenus et à l'étendue des programmes, aux méthodes ou
ressources pédagogiques utilisées par rapport au profil
d'enseignant attendu à la fin de la formation. La durée est
certes un élément important à prendre en compte dans la
quête d'une formation de qualité mais ne saurait à elle
seule garantir le succès escompté. En effet, selon Vaniscotte
(1994) citée par Morales (2012) la préparation au métier
quelle qu'elle soit ne peut supprimer du coup le malaise des enseignants.
La formation initiale des enseignants fait face à
d'autres difficultés telles que l'adéquation des programmes ou
contenus de formation aux besoins réels des enseignants sur le terrain
et la pertinence des méthodes de formation utilisées pour le
développement des compétences. Les démarches prescriptives
qui consistent pour les spécialistes ou les technocrates de
l'éducation à concevoir des programmes et des méthodes
toutes faites et de les appliquer ou les faire appliquer aux
bénéficiaires de la formation ont montré leurs limites. La
prise en compte des besoins réels des enseignants s'impose pour
élaborer des programmes de formation plus pertinents. Pour cela, les
procédures co-constructives sont de plus en plus
préconisées. A ce sujet, la didactique professionnelle
(Vinatier,2013 ; Pastré & vergnaud, 2011) et l'ergonomie
recommandent que l'analyse du travail sur le terrain soit le point de
départ pour concevoir non seulement des programmes de formation
pertinents mais aussi pour mettre en place un dispositif approprié de
formation.
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