Selon Levy-Leboyer cité par Ongomes (2005 :31),
l'origine familiale détermine fortement les ambitions des jeunes dans la
mesure où on observe une véritable hérédité
professionnelle. En effet, le parent insatisfait conscient de ce qui lui a
manqué pour réussir aura très naturellement tendance
à projeter sur ses enfants ses aspirations non réalisés
avec en plus une intelligence des situations pour les aider là où
il a lui même échoué. De ce fait, la liaison est forte
entre le niveau social du père et les ambitions du fils.
Les aspirations socioprofessionnelles dépendent des
modèles que fournit le niveau d'étude. À niveau
universitaire équivalent, un jeune homme dont les succès
scolaires apparaissaient exceptionnels à son entourage aura des
aspirations plus modestes que le fils d'une famille de statut
élevé ; on s'attend à le voir réussir au moins
comme son père. Pour beaucoup d'étudiants, la situation
professionnelle et sociale de la famille d'appartenance, prend le rôle de
modèle, sinon de référence vis à vis de la question
de l'avis professionnel. En effet, les aspirations professionnelles renvoient
dans la majorité des cas à l'emploi occupé par les
parents. On se réfère à l'emploi de responsabilité,
qualifié, dans lequel on tire satisfaction à l'ouvrage. Le statut
de l'emploi auquel aspirent les étudiants se voit être assez
proche de celui des parents. Marcyan (2001 : 108)
En effet, il faut voir en la famille un réseau
particulier de sociabilité où se transmettent et
s'échangent certaines images, valeurs, représentations du monde.
La famille fournirait en quelques sortes un point d'encrage à une
réflexion alimentée par
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les dimensions personnelles et psychologiques de
l'étudiant et par l'univers social qui l'entoure et qui par un processus
constant de socialisation participe à la construction des
identités sociales et professionnelles.
Toutefois, le contexte familial peut favoriser les
carrières des jeunes, ceci de multiples façons. La famille dans
certains cas fournit l'appui de ses relations sociales et donne accès
à des informations sur les filières professionnelles les plus
porteuses et par la même occasion elle permet aux jeunes gens de formuler
des ambitions de manière réaliste. L'ambition apparaît donc
comme le fruit d'une enfance frustrée plutôt que d'une enfance
comblée.
Plus l'origine sociale est élevée, moins ils
décident de leur avenir de façon réfléchie. En
outre parmi les personnes qui ont dès le départ des aspirations
précises, on peut distinguer deux groupes :
? les sujets informés qui font entrer en ligne de
compte les éléments qu'ils ont pu recueillir sur les
carrières et plus particulièrement sur les possibilités de
promotion.
? les sujets qui souhaitent un certain type d'action
professionnelle, commander, être à la source des
décisions.
D'autres parts, les aspirations, lorsqu'elles existent
s'appuient parfois sur la qualité des résultats scolaires et du
sentiment de réussite qui en découle et dans les deux cas elles
semblent avoir leur origine dans l'appartenance à un milieu
professionnel privilégié.
Selon Levy -Leboyer, la famille fournit à ses membres
une éducation qui peut le cas échéant freiner ou favoriser
l'ambition, valoriser ou affaiblir la réussite sociale. Elle peut aussi
apporter une aide matérielle et éventuellement donner à
ses membres un cadre d'action. Inversement, le climat familial peut agir de
façon négative parce qu'un individu qui n'y a pas trouvé
son équilibre réagira en cherchant dans un autre contexte la
sécurité et l'approbation qui l'ont marqué pendant son
enfance. La
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contribution de la famille à la réussite
professionnelle est appréciée de façon différente
par les cadres selon qu'ils sont d'origine modeste, moyenne ou
élevée.
Les sujets appartenant aux catégories modeste et
moyenne ont eu beaucoup plus parfois que les autres le sentiment de n'avoir
reçu aucune aide de leur famille. Ceci peut facilement être
concevable dans la mesure où le père exerce une profession de
faible statut (ouvrier, artisan, petit employé). Ce sentiment
apparaît aussi dans les milieux moyens où les enfants
considèrent très souvent qu'ils ne doivent leur réussite
qu'à eux-mêmes.
En retour, les cadres d'origine sociale élevée
ont le plus souvent la conviction d'avoir reçu de leur famille des
valeurs intellectuelles et morales qui les ont marquées favorablement
tout au long de leur vie professionnelle, le goût du travail bien fait,
le prix de l'effort personnel et de la discipline de soi.
Quant à l'ambition on la trouve aussi bien
stimulée par les parents de niveau modeste qui reportent sur leurs
enfants une ambition non satisfaisante que par les familles plus aisées
qui s'opposent à ce qui leur paraît représenter une perte
de statut social. Pour Evola, le statut individuel tend à n'être
plus conféré par la naissance (fils de chefs, d'esclaves), mais
acquis par l'éducation.
En conséquence le processus éducatif n'a plus
consisté simplement à transmettre les compétences et les
valeurs, mais selon Bank que cite Evola (1996 :56), « il a eu de plus en
plus pour fonction de répartir, de sélectionner et de former les
individus en vue de leur rôle d'adulte »
Guggenheim repris par super et cité par Evola (ibid :
57), a montré que l'origine socioprofessionnelle ainsi que les
traditions et les attitudes familiales sont des déterminants puissants
de certains comportements caractéristiques et aussi des identifications
et des acceptions « Ainsi que la profession des parents se mêle
à la vie des enfants, en règle le régime et façonne
les goûts et les aspirations professionnelles de ceux-ci ou les rebute
».
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Dans le même sens les enfants issus des
catégories socioprofessionnelles favorisées sont plus optimistes
pour leur avenir professionnel que ceux qui proviennent des catégories
défavorisées et qui ont tendance à un certain
pessimisme.
Selon Evola (1996), de façon générale,
« l'environnement socioprofessionnel est déterminant quant au
niveau d'aspiration professionnel de l'enfant ». Les enfants ont tendance
compte tenu de certaine variables environnementales, soit d'exercer le
même métier exercé dans leur milieu d'appartenance, soit de
choisir les métiers dont le niveau de qualification est semblable
à celui des parents. Toutefois, c'est la capacité cognitive de
l'enfant qui lui permet de situer son niveau d'aspiration professionnelle.