La motivation du personnel au secteur touristique( Télécharger le fichier original )par Youssef FTAIMI - filière de gestion des entreprises 2016 |
C-Une méconnaissance des métiers de l'hôtellerie, source de démotivation des jeunes.L'abandon de la profession et les reconversions signalées plus haut sont dues, pour une part, à l'expression de motivations illusoires chez les jeunes cadres et techniciens lors du choix de leur formation, et de l'autre, à un doute quant à la possibilité de s'accomplir pleinement dans la profession exigeant la disponibilité, la mobilité... Ce genre de phénomène découle, en amont, de l'inefficacité des systèmes de sélection prédominant lors de l'accès aux établissements de formation touristique et hôtelière et, en aval, des conditions de recrutement par les entreprises de ce secteur. Ces systèmes ne tiennent compte ni des motivations des candidats ni de leur volonté de s'impliquer pleinement dans la profession. De plus, encore, aucune aide n'est apportée aux élèves et étudiants lors de leur formation, en matière de construction de leur projet professionnel, outil pourtant nécessaire à la facilitation de leur insertion professionnelle et à la confirmation de leur motivation. Le manque de visibilité quant à l'avenir professionnel de ces jeunes ressources, l'absence de coaching durant leurs parcours de formation, et le risque grandissant du chômage, renforcent leur démotivation jusqu'à leur acquérir le sentiment de l'inutilité des études. D- l'absence de repères en gestion de l'emploi et des compétences, un facteur pénalisant.Les raisons évoquées ci-dessus ne sont pas les seules explications de l'insuffisance de qualifications. Celle-ci est due aussi à une absence de gestion préventive de l'emploi et des compétences dans la majeure partie des entreprises hôtelières. Cette lacune ne permet pas à ces entreprises d'appréhender leurs ressources humaines suivant un mode prospectif et anticipatif. Le problème, à ce niveau, réside dans l'incapacité d'anticiper sur les évolutions qui pourraient affecter leurs organisations et dans la difficulté de maîtriser les dysfonctionnements sociaux et les risques qui en découlent en matière d'emploi et de compétences. Hormis pour les chaînes internationales, les ajustements, en vue d'équilibrer les besoins quantitatifs et qualitatifs en personnel, avec les ressources humaines dont disposent les entreprises hôtelières marocaines, n'obéissant souvent à aucun critère de rationalité. Sur cette question, les résultats de notre enquête précitée sur la gestion de l'emploi dans le secteur de l'hôtellerie révèlent que sur 64 entreprises ayant répondu à notre questionnaire, 8%, soit 5 entreprises seulement, dont 4 sont gérées par des chaînes hôtelières étrangères, recourent à l'approche prévisionnelle de l'emploi et des compétences sur une période de 2 ans. Quant au reste des entreprises, 25 prévoient leurs besoins annuellement, soit 39% et 34 autres au coup par coup, soit 53%. La gestion prévisionnelle du personnel est un outil au service de la gestion des ressources humaines. Elle consiste dans la projection, pour le moyen et le long terme, des besoins et des ressources en personnel d'une organisation. Bien qu'elle prenne souvent corps sous forme de modèles cohérents, formalisés et automatisés, la gestion prévisionnelle du personnel est avant tout un mode d'approche logique de la gestion des ressources humaines de l'entreprise. Les recommandations qui en résultent deviennent une base pour les décisions à prendre en vue de l'adéquation des ressources aux besoins futurs. Deux caractéristiques socio-économiques des ressources humaines dans l'organisation justifient, et rendent efficace, le recours à la gestion prévisionnelle : il s'agit de la conjugaison de l'inertie des ressources humaines et de leur flexibilité10(*). Il va sans dire que cette lacune se répercute négativement sur tous les processus relatifs au pilotage et à la planification du recrutement, à l'organisation du travail, à la gestion des rémunérations, à l'évaluation du personnel, au développement individuel et au développement organisationnel. L'absence d'anticipation diminue en fait la capacité des entreprises hôtelières à maîtriser l'adéquation permanente entre leurs besoins et leurs ressources d'un point de vue quantitatif et qualitatif. Elle rend inefficaces les décisions prises en matière d'articulation des moyens d'adaptation telles le recrutement ou l'organisation du travail. En outre, l'absence d'une gestion prévisionnelle de l'emploi et des compétences provient d'une méconnaissance de la dimension stratégique que représentent les ressources humaines. En effet, la variable emploi-ressources humaines n'est pas encore intégrée dans le système de décision, ni donc dans la stratégie globale des entreprises hôtelières. Ainsi, les domaines de la gestion du personnel sont très limités et ne visent pas la valorisation et la mobilisation des ressources humaines. Les salariés sont considérés comme une charge à comprimer, plutôt qu'une ressource potentielle à gérer et à développer. D'ailleurs, l'entreprise hôtelière, dans l'esprit d'un grand nombre de dirigeants, est toujours considérée comme un cadre économique dirigé par un entrepreneur combinant à la fois le capital technique et le capital financier dans l'ultime but de maximiser ses gains. Ces derniers constituent la seule motivation de ce type d'entrepreneur dont la vision « economicus » éclipse la renaissance de la dimension d'« acteur stratégique » que revêtent les ressources humaines dans la stratégie de l'entreprise moderne. Certes les caractéristiques du secteur touristique telles que la saisonnalité, la sensibilité aux variations de la mode , des goûts de la clientèle, à la conjoncture politique, économique, et le manque à gagner qui peut en découler, incitent les professionnels à comprimer leurs charges pour diminuer le risque des incertitudes dues aux difficultés qu'ils rencontrent en matière de prévision de leur activité. Cependant, on ne peut imputer aux seules caractéristiques de l'activité touristique tous les maux de l'hôtellerie et du tourisme. Le manque de professionnalisme et la prédominance de la logique « d'économie de cueillette » constituent les causes essentielles de la perte de vitesse du tourisme au Maroc. En ce qui concerne le recrutement proprement dit, notre enquête a relevé que la définition des postes de travail et des profils des candidats n'est pas une pratique courante dans les établissements hôteliers gérés par les chaînes étrangères. A ce sujet, 11% seulement des entreprises, soit 7 entreprises sur 64, dont 4 gérées par des chaînes étrangères, une par une chaîne nationale et 2 classés 5 étoiles luxe, font appel à ces outils-clefs de l'organisation et de la gestion du personnel. * 10 B. Martory et D. Crozet : Gestion des ressources humaines, Nathan, Paris 1988 |
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