Partie I- L'expression de la liberté
contractuelle dans la cession d'actions d'une société par
actions simplifiée
La SAS est une société marquée par une
grande liberté contractuelle. Le législateur a choisi de placer
cette liberté contractuelle au coeur de la cession d'actions de ce type
de société. Cette liberté s'exprime à travers des
clauses statutaires que la loi prévoit expressément mais aussi
à travers d'autres clauses statutaires ou extrastatutaires que les
associés peuvent stipuler.
Il convient de préciser que le régime de ces
clauses est différent selon qu'elles sont localisées dans les
statuts ou hors des statuts. Les clauses statutaires qui organisent la
stabilité du capital de la SAS ne peuvent être adoptées,
modifiées qu'à l'unanimité des associés, alors que
les clauses extrastatutaires obéissent à la règle de la
majorité et ne concernent pas nécessairement tous les
associés. De même l'article L227-15 du
C.com dispose que « toute cession
effectuée en violation des clauses statutaires est nulle ». Or
la violation des clauses extrastatutaires est sanctionnée seulement par
l'octroi de dommages et intérêts24.
Ces clauses peuvent être regroupées en deux
catégories : les clauses visées par la loi (chapitre I) et
d'autres clauses qui peuvent être stipulées par les
associés (chapitre II).
Chapitre I - Les clauses statutaires visées par
la loi
La loi énumère de façon limitative les
clauses statutaires qui peuvent être stipulées par les
associés dans le cadre de l'opération de cession d'actions. Ces
clauses sont prévues par les articles L227-13, L227-14, L227-16 et
L227-17 du
C.com. Dans chacune de ces dispositions, la
loi commence par l'expression « les statuts peuvent
prévoir...... ». Cela signifie que l'adoption de toutes ces
clauses est une simple faculté pour les associés.
Ces dispositions sont d'une importance capitale puisqu'elles
fondent juridiquement la validité de ces clauses. La SAS repose sur un
affectio societatis fort fondé sur la confiance
24
Cass. com., 27 mai 1986, Bull. Joly 1986,
p. 687 ;
Cass.com 7 mars 1989, n°87-17212.
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mutuelle entre les associés et leur communauté
d'objectifs qui traduit le pacte social. C'est aussi une société
qui repose sur un fort intuitu personae. C'est pour cette raison que
la loi valide des clauses qui portent même atteinte au grand principe de
libre cessibilité et négociabilité des actions.
Si certaines clauses encadrent la libre cession des actions
(section I) d'autres autorisent la cession forcée des actions (section
II).
Section I- Les clauses encadrant la libre cession des
actions
Certaines clauses, prévues par le code de commerce en
ses articles L227-13 et L22714 encadrent la libre cession des actions. Il
s'agit d'une part de la clause d'inaliénabilité (§1) et
d'autre part de la clause d'agrément (§2).
§1- La clause d'inaliénabilité
La clause d'inaliénabilité peut être
définie comme « la technique juridique qui, grevant un bien ou
un droit, interdit à son propriétaire ou à son titulaire
d'en disposer (à titre gratuit ou onéreux), afin d'assurer la
protection d'intérêts particuliers ou généraux
»25.
La validité de cette clause a longtemps
été discutée en doctrine26 comme en
jurisprudence27 au motif qu'elle porte atteinte au principe de la
libre cessibilité et négociabilité des actions.
Désormais la loi tranche la question en
prévoyant à l'article L227-13 du
C.com que « les statuts de la
société peuvent prévoir l'inaliénabilité des
actions pour une durée n'excédant pas dix ans ».
Nous verrons d'abord le champ d'application (A) avant
d'examiner ensuite le régime juridique de la clause
d'inaliénabilité (B).
25 Corvest H., L'inaliénabilité
conventionnelle, Rép. Def. 1979, art. 32126, p. 1377.
26 V. A. Couret, note sous Cass.
1re civ., 31 oct. 2007, Bull.Joly sociétés 2008, p. 123.Il
considère que l'arrêt du 31 octobre 2007 pose un principe
général de validité qui s'étend aux clauses
d'inaliénabilité portant sur des actions.
En revanche, certains auteurs sont en défaveur de la
validité : S.Schiller, La Cour de cassation a-t-elle
révolutionné les conventions d'inaliénabilité en
droit des sociétés ? Note sous Cass. 1re civ., 31 oct. 2007 :
Rev. Sociétés 2008, 322 ; J. Mestre et D. Velardocchio, Lamy
Sociétés commerciales, 2008, n° 4562, p. 2128.
27
Cass.com. 22 oct. 1969 : JCP G 1970, II,
197, obs. J. Pailluseau : Cet arrêt a été rendu en
matière de SA et déclare nulle la clause qui « supprime la
possibilité pour l'actionnaire de sortir de la société
anonyme ».
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