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Droit maritime et énergies marines renouvelables

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par Thibaut Schwirtz
Université Lumière Lyon 2 - Droit des transports et de la logistique 2014
  

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PARTIE 2 : Un droit public contraignant responsable du retard de la
France dans le développement des EMR

Le rapport de la mission d'études sur les énergies marines renouvelables, réalisé à l'initiative du Ministère de l'écologie et du Ministère des finances, le dit lui-même : « les projets EMR sont soumis à un ensemble complexe de règles juridiques, source probable de retards sinon de contentieux. Ce cadre législatif et réglementaire mériterait donc d'être simplifié, tout en conservant un niveau élevé de protection de l'environnement96 ». On constate en effet en France un nombre élevé de barrières administratives freinant l'installation de parcs EMR (Chap. I), cumulé à une volonté politique de préservation de l'environnement, contraignante pour l'implantation des projets EMR en France (Chap. II).

Chapitre I : les contraintes administratives relatives aux énergies
marines renouvelables

Il existe de nombreux textes en droit français traitant des installations en milieu marin, lui permettant de disposer d'une procédure détaillée qui devrait en principe favoriser l'implantation de parcs EMR le long des littoraux français. Bien au contraire, le droit français a créé un système d'autorisations administratives stratifié et peu lisible, source de désintérêt des investisseurs pour les énergies marines renouvelables. Les candidats à l'exploitation d'EMR doivent en effet remplir plusieurs conditions pour pouvoir exploiter des EMR (I), tandis que la nature des zones où sont exploitées les installations EMR nécessite l'obtention d'autorisations supplémentaires (II).

I. Les conditions à remplir par les candidats pour exploiter des énergies marines renouvelables

Les candidats sont en premier lieu sélectionnés suite à un appel d'offres (A) et doivent ensuite obtenir une autorisation d'exploitation (B).

A. Le choix des candidats par procédure d'appel d'offres

Chaque candidat est mis en concurrence au travers d'un appel d'offres (1) défini par un

96 Rapport de la mission d'étude sur les énergies marines renouvelables, mars 2013, p.4

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cahier des charges (2) aboutissant à l'attribution de sites dans lesquels seront construits les parcs EMR (3).

1) Procédure applicable aux appels d'offre

a) Textes applicables

Le système d'appel d'offres trouve son origine dans une directive européenne de 1996 disposant en son article 4 que les États membres peuvent choisir entre un système d'autorisations et/ou d'appel d'offres concernant toutes les nouvelles installations de production (Directive 96/92/CE du parlement européen et du conseil du 19 décembre 1996 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l'électricité). La directive a été retranscrite dans le droit français par la loi du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité97. Celle-ci prévoit que l'autorisation d'exploiter doit être délivrée par le ministre chargé de l'énergie (article 7) et que « lorsque les capacités de production ne répondent pas aux objectifs de la programmation pluriannuelle des investissements », le ministre chargé de l'énergie peut recourir à la procédure d'appel d'offres. Enfin, le décret de 4 décembre 200298 relatif à la procédure d'appel d'offres pour les installations de production d'électricité, modifié par le décret du 28 juin 201199, charge la Commission de Régulation de l'Énergie (CRE) de mettre en oeuvre la procédure d'appel d'offres.

b) Contenu des appels d'offres

Le décret de 2002 tel que modifié par le décret de 2011 prévoit en premier lieu que le ministre chargé de l'énergie doit transmettre à la CRE les conditions d'appel d'offres qu'il a définies. Celles-ci sont constituées des caractéristiques techniques des installations, des conditions et de la durée d'exploitation, la coexistence des installations avec d'autres activités économiques ainsi que de la prise en compte de la protection de l'environnement (article 1). Ces conditions donnent lieu en retour à la transmission par la CRE d'un projet cahier des charges relatif à l'appel dans les 6 mois (article 2). Ce cahier arrête toutes les conditions auxquelles les candidats doivent souscrire. Lorsque l'installation est destinée à être mise en service sur le domaine public maritime, une concession d'occupation du domaine public maritime doit être délivrée (article 7-2). Il

97 Loi n°2000-108 du 10 février 2000

98 Décret n°2002-1434 du 4 décembre 2002

99 Décret n°2011-757 du 28 juin 2011

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est précisé que l'appel d'offre doit être transmis à l'Office des publications de l'Union Européenne pour publication au Journal Officiel européen (article 5). La CRE classe ensuite par ordre de préférence les candidats sous deux mois, qui sont ensuite choisis par le ministre de l'énergie (article 16-3).

2) Contenu des cahiers des charges applicables aux appels d'offres

Chaque appel d'offres est mis en oeuvre par un cahier des charges répondant aux volontés exprimées par le ministre de l'énergie. Les cahiers des charges prévoient chacun des dispositions relatives à l'obligation de conformité des installations aux normes existantes, l'obligation pour le candidat de fournir un plan de sécurisation industrielle, un plan de gestion du risque, un plan d'emploi et de formation, un plan de gestion des activités déjà existantes, une évaluation des impacts environnementaux ainsi qu'une évaluation précise du prix de revente de l'électricité. Un exposé devra de plus être fourni par le candidat garantissant sa solidité technique et financière, celui-ci devant disposer de fonds propres d'un montant au moins égal à 20% du coût total du projet. Il est également pris en compte la capacité financière du candidat à démanteler les installations. Enfin, il est précisé que le candidat « s'engage à mettre en service au moins 20% de la puissance totale de l'installation de production au plus tard 6 ans après la notification de la décision par les ministres compétents », porté à 50% de la puissance sous 7 ans, et enfin la totalité de la puissance au plus tard 8 ans après la notification.

Au regard de toutes ces conditions, les cahiers des charges prévoient que les candidats seront choisis selon 3 critères100 : la note finale dépendra à 40% du prix d'achat de l'électricité, à 40% de la qualité du projet industriel et à 20% de la prise en compte des activités existantes et de l'environnement.

3) Chronologie des appels d'offres lancés en France

Le premier appel d'offres en matière d'éolien offshore a été lancé en 2004, sélectionnant la société Enertag, parmi 10 autres projets, pour la construction d'une ferme éolienne de 21 turbines au large des côtes de Veulette-sur-mer, en Normandie, pour une puissance totale de 105 MW. Cependant, 11 ans après, rien n'a encore été construit en raison des difficultés administratives causées par de telles installations en mer. Les avancées

100 Article 5.2 cahier des charges : « pondération des critères »

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technologiques cumulées aux contraintes écologiques grandissantes ayant provoqué un regain d'intérêt pour l'éolien offshore, un deuxième appel d'offres a été lancé en 2011, de plus grande envergure puisque destiné à installer des parcs éoliens sur 5 sites (Fécamp, Courseulles-sur-mer, Saint-Nazaire, Saint-Brieuc, Le Tréport), pour un total de 3000 MW101. Celui-ci s'est traduit par l'attribution, le 6 avril 2012, des trois premiers sites à Eolien Maritime France (EMF), dont les principaux actionnaires sont EDF Énergies nouvelles, WPD et Dong Energie, et du site de Saint-Brieuc au consortium européen composé d'Iberdrola et de la filiale française d'Eole-RES. Seul le site du Tréport n'a pas été attribué. Celui-ci n'ayant pas fait l'objet d'une concurrence suffisante, il a abouti à une proposition de vente du prix de l'électricité trop élevée comparée aux autres sites. L'appel d'offre lancé en 2012 était destiné à remédier à ce problème puisqu'il se cantonnait, dans les mêmes conditions que le cahier des charges 2011, à trouver des candidats sérieux sur le site du Tréport ainsi sur le site de l'Ile d'Yeux-Noirmoutier (total : 1000 MW).

Si les projets de 6 sites éoliens ont bien été lancés, ils ont déjà accumulé du retard dans leur installation et ne représentent aujourd'hui que la moitié de la puissance électrique produite attendue des éoliennes en mer d'ici 2020, conformément aux engagements de la France pris lors du Grenelle de l'environnement. Il est néanmoins prévu qu'un appel d'offre pour l'éolien posé, ainsi qu'un appel à manifestation d'intérêt pour l'éolien flottant soit lancé en 2015, d'après la ministre de l'écologie Ségolène Royal.

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