§5. Action directe
Le droit propre de l'assureur dommages ouvrage qui se subroge
dans le droit du maître se met en oeuvre par l'action directe contre
l'assureur des responsables des dommages. Cette action a pour
objet la réparation du préjudice subi. C'est l'application du
principe de droit commun (art.258 et ss. C.C.L.III.). L'assureur subrogeant
devrait en principe poursuivre les auteurs des dommages qui sont les
constructeurs. Mais comme il espère plus la solvabilité dans la
personne de leur assureur responsabilité par rapport à la
solvabilité propre des responsables des dommages, il
préférera agir contre lui. L'assureur responsabilité doit
garantir la protection du patrimoine des constructeurs qui risque de tomber
à la merci des victimes des faits de ces derniers ou de leurs ayants
droits.
C'est l'assurance responsabilité qui
déterminera donc les limites de l'action directe. Ce
faisant, l'assureur responsabilité pourra opposer au
bénéficiaire de l'assurance responsabilité les exceptions
opposables au souscripteur originaire. C'est l'application du principe de
l'opposabilité à la victime ou aux personnes qui l'ont
subrogée des exceptions opposables à l'assuré.
Cependant, l'assureur responsabilité ne devra pas
faire la réparation à la victime ou son ayant cause (le cas de
l'assureur dommages- ouvrage) qu'en raison de la garantie promise aux
constructeurs assurés par le contrat d'assurance de
responsabilité. Parmi les exceptions susceptibles d'être
opposées au bénéficiaire de l'assurance
responsabilité, on peut distinguer deux catégories : celles
qui sont fondées sur l'existence du contrat d'assurance lui-même,
et celles qui sont déterminées par l'étendue de la
garantie née du contrat. C'est ainsi que dans le premier cas, le
non-paiement des primes par les constructeurs assurés peut faire l'objet
d'une exception opposable au bénéficiaire de l'assurance
responsabilité.
Dans le second cas, il peut s'agir des exclusions de risques
tel que les phénomènes naturels ayant un caractère
catastrophique (tremblement de terre, ouragans,...) , les
conséquences d'incendie ou d'explosion ou les travaux ayant
motivé des réserves du maître de l'ouvrage à la
réception, si le sinistre a pour cause l'origine de ces réserves,
etc.
On ne saura pourtant oublier que les droits du
bénéficiaire de l'assurance responsabilité naissent au
jour du dommage, et que les exceptions nées postérieurement ne
peuvent lui porter atteinte. Ils sont cristallisés au jour du dommage
qui constitue le sinistre en assurance responsabilité. Cela
étant, les droits du bénéficiaire seront établis
non seulement à l'égard des auteurs du préjudice, mais
également à l'égard de l'assureur contre lequel le
bénéficiaire dispose d'un droit propre conféré par
la loi. Ainsi, un manquement des constructeurs à leurs obligations
commis postérieurement au sinistre ne sera pas opposable aux personnes
lésées ou à leurs ayants droits. L'assureur
responsabilité est donc mis dans la situation d'une caution puisqu'il
doit acquitter envers le bénéficiaire une dette de ses
assurés à l'égard desquels il doit sa garantie.
Dès le début de ce chapitre nous l'avons vu,
l'assurance décennale est généralement guidée par
le principe de double assurance ou double garantie d'assurance.
Ce faisant, il s'impose également au maître de
l'ouvrage l'obligation de souscrire une assurance appelée assurance
dommages- ouvrage.
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