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Du mercenariat aux entreprises de services de sécurité et de défense : la question de l'externalisation dans les forces armées françaises

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par François Le Gallic
Ecole de l'air - Sciences Po Aix - Diplôme de Sciences Po Aix 2013
  

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E) Le service étranger suisse

Acriter et fideliter15, devise de la Garde suisse pontificale

Si pour beaucoup la Garde suisse pontificale n'est pas autre chose qu'une originalité qu'ils regardent avec un oeil bienfaisant, un peu à l'image des Welsh Guards protégeant le palais de Buckingham à Londres, il faut rappeler qu'il s'agit là du dernier vestige du mercenariat suisse. En effet, la Suisse était à l'époque médiévale une contrée où l'économie n'était pas aussi florissante qu'aujourd'hui. Celle-ci reposait principalement sur l'agriculture, l'artisanat et le commerce. Or, quand l'hiver arrivait chaque année, beaucoup d'hommes dont le métier était l'élevage se retrouvaient sans emploi. C'est pourquoi, les perspectives offertes par le mercenariat ne laissèrent pas indifférents. D'ailleurs, les Suisses excellaient dans le combat à pied. La victoire en 1315 à Morgarten (au sud de Zurich) de quelque mille cinq cents paysans helvètes contre 4 000 à 8 000 soldats de l'armée des Habsbourg leur assura une solide réputation.

Curieusement, ce ne sont pas des compagnies qui géraient ces mercenaires mais les autorités publiques. En effet, comme le rapporte Philippe Chapleau, « le service étranger était une véritable affaire d'Etat, les cantons puis la Confédération imposant un contrôle strict sur les recrutements et se transformant eux-mêmes en entrepreneurs militaires qui sous-traitaient les levées à des agents professionnels, confiaient les unités à des capitaines et en retiraient des profits substantiels. Ainsi, dans le Valais, les pensions étrangères ont longtemps permis de ne pas lever d'impôts.16 »

15 « Courage et fidélité ».

16 CHAPLEAU Philippe, Les nouveaux entrepreneurs de la guerre : des mercenaires aux sociétés militaires privées, Vuibert, Paris, 2011, p. 54-55.

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Au final, la Suisse fut l'un des pays les plus pourvoyeurs de mercenaires. On en retrouvait aussi bien en Italie, qu'en Espagne ou encore en France. Dans ces conditions, il n'était pas rare que des mercenaires suisses s'affrontassent. Ainsi, la bataille de Malplaquet, qui eut lieu en 1709 au cours de la guerre de Succession d'Espagne, vit s'affronter les troupes du Royaume de France contre celles de la Grande Alliance (Archiduché d'Autriche, Provinces-Unies, Royaume de Grande-Bretagne). Durant cette bataille, huit mille mercenaires suisses périrent, par respect du contrat signé.

F) Les corsaires

« L'homme né pour la liberté, sentant qu'on cherche à l'asservir, aime souvent mieux se faire corsaire que de

devenir esclave. », Beaumarchais

Historiquement, la tradition corsaire serait anglaise et remonterait à 1243. Le roi Henri III Plantagenêt aurait alors accordé la première Letter of Marquee ou Lettre de Course17. Toutefois, ce sera surtout aux XVe, XVIe et XVIIe siècles que ce nouveau type de mercenariat fleurira.

Cependant, avant d'étudier la réalité de ce phénomène, il convient de bien comprendre la différence qui existe entre un corsaire et un pirate. Dans le cas de la course, le roi délègue à un armateur le droit d'armer un bateau et un équipage. Le corsaire est donc un mercenaire au sens noble du terme. Pour reprendre la formule latine de Wolf, non privatum, sed publicum bellum gerunt (« ils ne font pas leur guerre privée, mais la guerre nationale à titre privée »). C'est pourquoi, une fois le navire de course arrivé au port, un juge de paix répartissait le butin entre le corsaire, l'armateur18 et le royaume. A l'opposé, le pirate est un hors-la-loi des mers. Il n'a pas de pavillon de nationalité et s'attaque aux navires de commerce dans son seul intérêt.

Par ailleurs, il est possible de recenser deux raisons à l'origine de la course. Tout d'abord, les corsaires étaient des gens normaux, c'est-à-dire des marins ou des pêcheurs qui ne

17 CHAPLEAU Philippe, Les mercenaires : De l'antiquité à nos jours, Editions Ouest-France, Rennes, p. 29.

18 Il arrivait parfois que le corsaire et l'armateur fussent la seule et même personne (exemple : Robert Surcouf).

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pouvaient plus exercer leur activité habituelle en temps de guerre et qui se reconvertissaient momentanément dans la chasse au butin. Ensuite, le développement des corsaires fut principalement la conséquence d'une volonté du pouvoir royal. En France, il faudra attendre 1630 et Richelieu pour voir se créer une véritable marine militaire. Auparavant, le roi de France faisait la guerre avec des particuliers, moyennant un intéressement aux résultats. Ce fut le cas de François Ier (1494-1547) qui, cherchant à briser le monopole des Espagnols, aida l'armateur normand Jean Ango (1480-1551) à armer des navires français. Toutefois, même en présence d'une marine royale, Louis de Pontchartrain, Secrétaire d'Etat à la Marine à partir de 1690, encouragera systématiquement la guerre de course. En Angleterre, la reine Elisabeth (1533 - 1603) utilisa les corsaires pour d'une part, ne pas ruiner le développement économique de son pays dans l'établissement d'une flotte gigantesque, et pour d'autre part, saper les fondements de la puissance espagnole dont la richesse provenait principalement des cargaisons d'or du Nouveau monde.

Il faut également rappeler que les corsaires n'avaient pas mauvaise réputation comme ce fut le cas par la suite. Au contraire, ils étaient vus comme des héros et récompensés comme tels. Outre-Manche, Francis Drake (1545-1596) et Walter Raleigh (1552-1618) furent anoblis par la reine et finirent vice-amiraux d'Angleterre. S'agissant de la France, Jean Bart (1650-1702), célèbre corsaire dunkerquois, fut décoré de l'ordre de Saint-Louis et termina sa vie au rang de chef d'escadre de la Marine royale, soit l'équivalent d'un contre-amiral aujourd'hui. Autre exemple, Robert Surcouf (1773-1827), corsaire malouin, fut décoré de la légion d'honneur.

En conclusion, s'il est vrai que la course fut une réussite économique19 qui permit de pallier l'absence de marine royale, elle ne fut pas pour autant une réussite sur tous les plans. D'un point de vue militaire, la course n'a jamais permis de remporter de guerres, pour la bonne et simple raison que les corsaires s'attaquaient principalement aux navires de commerce. D'autre part et d'un point de vue éthique, la course fut critiquée par les philosophes des Lumières et les autorités religieuses parce qu'elle frappait des particuliers, c'est-à-dire des victimes innocentes.

19 Robert Surcouf fera vaciller l'économie anglaise en capturant au total une cinquantaine de navires de commerce.

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