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Du mercenariat aux entreprises de services de sécurité et de défense : la question de l'externalisation dans les forces armées françaises

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par François Le Gallic
Ecole de l'air - Sciences Po Aix - Diplôme de Sciences Po Aix 2013
  

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b) Claire Chennaut et les Flying Tigers

En 1946, l'officier supérieur Claire Chennaut, ancien chef des Tigres volants33 fonde une petite société de transport aérien, la Civilian Air Transport (CAT). Celle-ci a pour fonction d'alimenter en vivres mais aussi en armes les régions tenues par les forces du Kuomintang de Tchang Kaï-chek. Beaucoup de pilotes de cette compagnie sont d'ailleurs d'anciens Tigres volants. En 1950, la CAT passe sous le contrôle de la CIA, qui, pour maintenir une apparence de société civile, continue d'assurer des vols réguliers dans toute l'Asie (Hong Kong, Japon, Corée, Philippines...), tout en utilisant certains avions de la flotte pour assurer des missions secrètes. La CAT est également utilisée lors de la guerre de Corée et lors de la guerre d'Indochine34. En 1959, la CAT est réorganisée sous le nom d'Air America et assure des opérations sous couverture durant toute la guerre du Vietnam.

Par ailleurs, l'entreprise CAT n'est pas un cas isolé. DynCorp, société créée en 1946 et aujourd'hui l'une des plus importantes SMP, commença par assurer des missions de transport aérien pour les armées US sous le nom de California Eastern Airways Inc. (CEA). De plus, la guerre du Vietnam vit se multiplier le nombre de prestataires privés. A ce titre et comme le

32 CHAPLEAU Philippe, Les nouveaux entrepreneurs de la guerre : des mercenaires aux sociétés militaires privées, Vuibert, Paris, 2011, p. 64.

33 Les Tigres volants (en anglais Flying Tigers) était le surnom donné à une escadrille de pilotes volontaires américains. Basée en Chine durant la Seconde Guerre mondiale, elle participa à la guerre sino-japonaise et à la campagne de Birmanie avant d'être incorporée à l'United States Army Air Forces.

34 Deux pilotes de CAT furent d'ailleurs tués durant la bataille de Dien Bien Phu en mai 1954.

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rappelle Philippe Chapleau, « PAE (Pacific Architects and Engineers), société de génie civil fondée en 1955, a travaillé sur quelque 120 sites vietnamiens et employé près de 25 000 personnes qui construisaient des camps pour l'US Army et les entretenaient.35 » Et d'ajouter, « Vinnell (une filiale de Northrop Grumman, connue pour ses activités de formation de la Garde nationale d'Arabie saoudite et de la nouvelle armée d'Irak) est à l'origine une entreprise de travaux publics fondée en 1931 ; ses liens avec le Pentagone datent des années 1960 et de la guerre au Vietnam.36 »

En conclusion, l'exemple des sociétés militaires privées anglo-saxonnes nous apprend que la frontière entre le monde des entreprises et celui des armées n'est pas étanche. De multiples coopérations sont possibles. De façon étonnante, alors que la plupart des spécialistes français du milieu défense s'accordent pour une externalisation « raisonnée », c'est-à-dire une externalisation qui ne concerne pas des domaines jugés stratégiques, il faut constater que les Anglo-Saxons n'hésitaient pas, dès les années 1940, à sous-traiter à des sociétés privées des missions hautement sensibles. Toutefois, il faut concéder que dans le cas des SMP anglaises et américaines, les dirigeants sont toujours des vétérans et souvent d'anciens officiers supérieurs. Dans ces conditions, l'externalisation en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis ne doit pas être vue comme un processus irréfléchi mais plutôt comme une possibilité d'élargissement des moyens d'actions en matière de défense et de sécurité nationale.

Parallèlement, la France a également eu recours à des mercenaires après la Seconde Guerre mondiale. De façon étonnante, cet épisode n'a pas débouché, comme dans le cas de la Grande-Bretagne et des Etats-Unis, sur l'établissement d'un véritable réseau d'entreprises privées de sécurité et de défense. Le futur développement essaiera donc d'établir pourquoi le modèle français n'a pas suivi la même trajectoire que ses cousins anglo-saxons.

35 CHAPLEAU Philippe, Sociétés militaires privées. Enquête sur les soldats sans armées, Le Rocher, Monaco, 2005, p. 70.

36 CHAPLEAU Philippe, Les nouveaux entrepreneurs de la guerre : des mercenaires aux sociétés militaires privées, Vuibert, Paris, 2011, p. 57-58.

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