L'engagement unilateral( Télécharger le fichier original )par Ramsès VOUGAT Université de Ngaoundéré (Cameroun) - Master II 2010 |
B- L'obligation issue de l'engagement unilatéral, une obligation potestative.18. La seconde objection à l'endroit de l'engagement unilatéral vient deELIAS38(*) et porte le nom de l'impossibilité. Selon cet auteur, si la volonté est souveraine, elle devrait être capable non seulement de lier unilatéralement son auteur, mais également de le délier : si le sujet peut se lier par sa seule volonté, alors il doit pouvoir se délier de même. Or, il ya d'engagement qu'irrévocable. Ce qui enlève toute utilité à la théorie de Siegel. Cette vision a connu une fortune considérable au sein de la doctrine.Elle a été reprise maintes fois par nombre d'auteurs39(*). Ce qui reviendrait à reconnaitre la validité des obligations purement potestatives, contrairement à l'article 1174 du Code civil40(*). 19.Cette critique n'est pas à l'abri d'objections. Elle ne se justifie qu'à l'aune de la théorie de l'autonomie de la volonté.C'est pourquoi M. MARTIN DE LA MOUTTE qui, pourtant n'admet pas la force obligatoire de l'engagement unilatéral, a fait remarquer que cet argument « vaudrait également contre l'obligation contractuelle si l'on fonde celle-ci sur la seule volonté du contractant »41(*). Or, l'on ne cesse de proclamer aujourd'huile déclin de la théorie de l'autonomie de la volonté. Il est admis en matière contractuelle que « la force obligatoire ne vient pas de la promesse, mais de la valeur que le droit attribue à la promesse. Cette valeur procède d'une norme extérieure qui seule détient les moyens propres à la garantir l'exécution de la promesse »42(*). En matière d'engagement unilatéral, l'on dira de même. Mais la question qui vient immédiatement à l'espritest celle de savoir si l'ordre juridique est prêt à reconnaitre un tel pouvoir créateur d'obligations à l'acte juridique unilatéral? Personne ne répond plus par la négative. 20.En outre, cette vision de ELIAS trouve sa plus farouche et pertinente critique dans les idées de M. FLOUR qui affirme que « la liberté susceptible d'être reconnue à chacun est de se lier ou non ; elle n'est pas de se lier et de se délier »43(*). Tout individu est donc libre de s'engager ou non, lorsqu'il choisit librement de s'engager ; il perd du même coup sa liberté. C'est une vérité d'évidence qui vaut pour tout engagement. Il convient enfin de dire que le pouvoir de la volonté unilatérale ne constitue une anomalie qu'à l'aunede la seule théorie de l'autonomie de la volonté dont la brièveté du règnen'a d'égale que la pauvreté de sa substance. D'autres fondements l'accueillent volontiers.Même si l'on ne cesse de décrier à tort ou à raison les dangers qui leurs sont liés. * 38 R. ELIAS, Théorie de la force obligatoire de la volonté unilatérale, Thèse, Paris 1909. * 39 H., L., J. MAZEAUD et F. CHABAS, Obligations : théorie générale, 9e éd., Montchrestien-Delta, n° 360, p.336 : « si l'on décide que le débiteur peut s'engager par sa seule volonté, on devrait également admettre qu'il pourra se dégager »par ce même fait. * 40 L'art. 1174 du Code civil est libellé comme suit : «Toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige ». * 41 J. MARTIN DE LA MOUTTE, op. cit., n° 287, p. 266. * 42 F. TERRÉ, Ph. SIMLER et Y. LEQUETTE, Droit civil : Les obligations, 10e éd., Dalloz, 2009, n° 28, p.33 * 43 J.-L. AUBERT, J. FLOUR, E. SAVAUX, Droit civil : les obligations, Vol.1, L'acte juridique, 13e éd. T.1, Sirey, 2008, n° 500, p.411. |
|