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L'interventionnisme public dans le développement contemporain du capital-risque français

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par Pascal MOLINELLI
Université Panthéon Assas - Magistère de juriste d'affaires - DJCE 2012
  

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2. Articulation entre label et véhicules français de capital-risque.

Le règlement envisagé ne crée pas à proprement parler un véhicule dédié au capital-risque mais opte pour une solution plus subtile. Au lieu d'imposer la création d'un véhicule spécifique, le règlement propose un label. Ce système suggère le maintien des véhicules nationaux de capital-investissement, leur dénomination resterait ainsi inchangée. En revanche, sous réserve du respect de certaines exigences, ces véhicules pourraient exercer un droit d'option et ainsi bénéficier du label « FCRE ». Il y a aurait donc une superposition de qualificatifs, avec un véhicule de droit national à l'origine, et l'octroi possible d'un label « FCRE » en supplément. Cette idée évite la création, par les Etats, d'un régime fiscal dédié aux fonds de capital-risque européen. Une telle acception de la notion de label pourrait

41 Directive 2004/39/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 concernant les marchés d'instruments financiers

permettre aux gestionnaires d'envisager la création d'un véhicule national disposant d'un régime fiscalement incitatif, tel qu'un FCPI, pour permettre aux souscripteurs soumis à imposition française de bénéficier des dispositifs fiscaux du véhicule, et par la suite d'obtenir le label FCRE dans l'optique de procéder à une commercialisation du fonds dans toute l'Union. Chaque pays de commercialisation réservera alors l'accueil fiscal qu'il souhaite à ces fonds. Toute la difficulté de l'opération consisterait alors pour le gestionnaire à faire coïncider les exigences liées au maintien de la qualification de véhicule national (FCPI en l'occurrence) avec celles liées au FCRE. A tel point que les gestionnaires de fonds de capital-risque pourraient préférer opter pour l'agrément lié à directive AIFM, dont les exigences sont déjà largement appliquées en droit français.

La principale contrainte inhérente à l'octroi du label concerne la composition de l'actif du fonds. En effet, 70% des apports en capital et du capital souscrit non appelé doit être investi dans des PME. Plus précisément, l'actif éligible est défini comme suit : « entreprise de portefeuille éligible»: une entreprise qui, à la date où elle fait l'objet d'un investissement par le fonds de capital-risque éligible, n'est pas cotée sur un marché réglementé au sens de l'article 4, paragraphe 1, point 14), de la directive 2004/39/CE, emploie moins de 250 personnes, a un chiffre d'affaires annuel qui n'excède pas 50 millions d'EUR ou un total du bilan annuel qui n'excède pas 43 millions d'euros, et qui n'est pas elle-même un organisme de placement collectif ».

L'actif éligible n'est donc pas strictement similaire à celui pris en considération dans le cadre de certains véhicules français tels que les FCPI, les FCPR ou encore les FIP. En effet, le FCPI vise certes des PME, mais ces dernières doivent présenter un caractère innovant, lequel est apprécié soit par un organisme spécifique (OSEO), soit par appréciation des dépenses de recherche et développement. De plus, les critères relatifs à la taille de la société ne s'appliquent pas aux FCPI, contrairement au calcul lié au label. Les sociétés composant le portefeuille des FCPI ne sont donc pas nécessairement prises en considération dans le calcul du seuil nécessaire à l'obtention du label. Donc, outre des seuils différents (60% dans un cas et 70% dans l'autre), le calcul de ces derniers s'opère à partir de données différentes.

FCPI

FCRE

Seuil : 60%

Composition de l'actif éligible : Société non

cotées issues de l'UE et présentant un
caractère innovant.

Investisseurs : toutes qualités.

Seuil : 70%

Composition de l'actif éligible : Société non cotée employant moins de 250 personnes, ayant un CA inférieur à 50M ou un total de bilan annuel inférieur à 43M.

Investisseurs : professionnels.

Par conséquent, le label FCRE s'apprécie indépendamment des qualifications juridiques nationales et des conditions qui leur sont propres. Le risque étant que le respect des critères nécessaires au label ne soit pas compatible avec le respect des critères du FCPI, auquel cas l'obtention du label ne pourrait s'effectuer qu'au détriment de la qualification de FCPI. Tout sera alors question de composition de portefeuille, mais également de qualité des souscripteurs. En effet, les FCRE sont réservés à des investisseurs professionnels et, en

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certaines hypothèses, à des personnes fortunées, tandis que les FCPI ne distinguent pas selon

la qualité de l'investisseur.

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Modélisation réalisée par Hiram-Finance42

Un autre cas de figure semble envisageable. Il concerne l'hypothèse où les Etats opteraient

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impliquerait la création d'un cadre fiscal attractif, sur la base des modèles FCPR ou FCPI. Ce

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nouveau véhicule, non coordonné par nature, sera de toute façon soumis à la plupart des

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exigences applicables aux OPCVM coordonnés, et évoluera donc dans un cadre réglementaire

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national exigeant.

Cette comparaison entre véhicules nationaux et FCRE démontre également une différence de perception pouvant exister sur la notion de capital-risque. Les critères de l'actif éligible en vue de bénéficier de la qualification de FCRE sont principalement liés à la taille de l'entreprise. La notion de capital-risque semble ainsi à première vue déconnectée de celle d'innovation. Investir dans une PME relève dès lors de la notion de capital-risque. Une telle conception s'émancipe d'une définition fondée sur l'innovation et le potentiel de développement. Conceptuellement, le FCRE semble plus proche du FCPR que du FCPI, l'idée étant de favoriser le financement de PME. Le capital-risque européen semble donc avant tout se définir comme une source financement pour les PME, généralement jeunes. Ces fonds de capital-risque pourraient donc être utilisés aussi bien en matière de capital-risque qu'en matière de capital-développement.

Ce constat peut néanmoins être tempéré. Cette définition adoptée par la commission n'atteste pas nécessairement d'une différence de conception.

Les critères retenus par la Commission dans sa proposition ne mentionnent pas la nécessité

42 Hiram Finance, Revue technique, régulation des marchés financiers, Janvier 2012, n°9, publication du 16 janvier 2012

3S2

d'investir dans de jeunes sociétés innovantes. Néanmoins, ce choix ne signifie pas pour autant que la Commission s'éloigne d'une conception du capital-risque fondée sur l'innovation. D'ailleurs, dans le premier considérant de la proposition de règlement, le capital-risque est ainsi défini : « Le capital-risque constitue un mode de financement d'entreprises, généralement de très petite taille, qui se trouvent aux premiers stades de leur existence et qui présentent un fort potentiel de croissance et de développement ». En fixant des critères fondés uniquement sur la taille de l'entreprise, et sur un investissement direct au sein de cette dernière, la proposition de règlement confère en réalité aux investisseurs une grande liberté d'appréciation. Le critère d'innovation ne disparaît pas nécessairement, il est simplement fondé sur la libre appréciation des investisseurs, et non sur l'appréciation d'un tiers (OSEO par exemple dans le cas de la France). Par définition, l'attrait inhérent à une PME est inéluctablement lié au potentiel offert par cette dernière. On pourrait dès lors considérer qu'un investissement dans une PME relève souvent du capital-risque.

Une telle conception du capital-risque peut surtout être liée à des considérations pratiques. Il semble en effet difficile d'apprécier le caractère innovant d'une société in abstracto. Les critères liés au montant des dépenses de recherche et développement pourraient s'avérer arbitraires, notamment au sein d'une Union européenne dont les cultures sont considérablement variables, certains pays favorisant de telles dépenses, d'autres moins. Un tel critère pourrait donc pénaliser les sociétés de certains Etats. Quant à la création d'une agence spécialisée dans la qualification de sociétés innovantes, elle impliquerait des moyens conséquents, et devrait mettre en oeuvre des critères qui seraient par définition difficilement harmonisables à l'échelle européenne. Cette définition adoptée par la Commission est donc probablement motivée par un certain pragmatisme.

La logique est similaire s'agissant des FCPR. Non seulement le seuil diffère, mais l'actif éligible n'est pas exactement identique puisque dans un FCPR de simples actions non cotées sont prises en considération tandis que le FCRE ajoute des conditions supplémentaires.

3. Les prémices d'une institutionnalisation des activités de capital-risque en Europe.

L'adoption de ce règlement permettrait également d'organiser les activités de capital-risque à l'échelle européenne. L'Autorité Européenne des Marchés Financiers (AEMF) devrait ainsi être chargée de gérer une base de données centrale contenant tous les fonds de capital-risque éligibles enregistrés au titre du présent règlement43.

La notion de confiance mutuelle, indispensable à la mise en place de passeports européens, impliquerait également une obligation de transparence entre les différentes autorités de contrôle impliquées. Transparence qui serait concrétisée, dans le cadre de ce règlement, par des échanges d'informations entre autorités compétentes des Etats membres d'accueil et d'origine, ainsi qu'avec l'AEMF. Mais le principe de confiance mutuelle serait avant tout perceptible au stade de l'agrément et des contrôles effectués par les autorités compétentes.

L'autorité compétente de l'État membre d'origine se verrait ainsi investie de la charge de veiller à ce que le gestionnaire de fonds de capital-risque respecte les exigences qui lui sont imposées en vue de bénéficier du label44.

43 Considérant 23 proposition de règlement de la Commission.

44 Considérant 20 proposition de règlement de la Commission.

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci