De la psychanalyse du sujet connaissant à l'objectivité scientifique dans l'épistémologie Bachelardienne( Télécharger le fichier original )par Merleau NSIMBA NGOMA Université chrétienne Cardinal Malula RDC - Licence en philosophie et lettres 2009 |
II.1.4. L'obstacle de la connaissance pragmatique et unitaireNous examinons ici deux principes explicatifs : l'unité de la nature et le principe utilitaire, deux autres obstacles nécessitant la purification. Le premier principe correspond à une tendance à unifier les phénomènes au sein d'une seule et même nature. Les préscientifiques avançaient alors comme hypothèses toutes les difficultés vont se résoudre grâce à une nature et une et homogène. Ils considéraient l'unité comme un principe toujours désiré, toujours réalisé à bon marché. Pour eux, « il faut directement avoir à l'esprit que ce qui est vrai du grand l'est du petit et vice-versa, et à la moindre dualité, on doit soupçonner une erreur »114(*). Quant à l'utilité, il faut aussi l'exorciser car elle conduit également à des généralisations exagérées : c'est une utilité d'origine humaine que l'on cherche dans tous les phénomènes. Le besoin d'unité et d'utilité pose un certain nombre de faux problèmes. Voilà pourquoi l'esprit moderne a rompu avec ce mythe de l'unité. Ainsi, « il pense en particulier le problème théologique sur le plan différent de celui du problème cosmologique ». 115(*) Bref, un esprit qui se veut moderne doit se libérer de ce besoin d'unité et d'utilité afin de progresser librement vers la vraie réalité. C'est cela la préoccupation de la science contemporaine : elle « s'instruit sur des systèmes isolés ». 116(*) En effet, les valorisations substantialistes et verbales conduisent pour la plupart de temps à l'unitarisme de la connaissance. Gaston Bachelard trouve en cette formulation une grande erreur et un grand obstacle de la connaissance pragmatique, qui, dans son vocabulaire consiste à « vouloir expliquer un phénomène par son utilité, comme si le monde était organisé comme une gigantesque et merveilleuse machine dans laquelle chaque pièce à une place et y joue un rôle en vue du tout ».117(*) Les explications grecques les plus mythiques mais aussi les plus bêtes, remarque l'auteur, ont été données suivant ce procédé et heurtant à une telle difficulté : « l'esprit préscientifique expliquerait le tonnerre comme le bruit par Jupiter pour féconder la terre et les semences ; les raies du potiron seraient tracées afin qu'on le découpe facilement en parts égales en famille ; la pluie ne serait que l'eau du bain par lequel la vierge Marie nettoie son fils Jésus -Christ »118(*). Ce thème de l'harmonie du monde, ce thème « d'une weltanschauung », ce thème où « toutes les difficultés se résolvent devant une vision générale du monde, par simple référence à un principe général de la Nature »119(*) un tel thème n'épargne pas les grands scientifiques, constate, Bachelard. Il en trouve un exemple intéressant chez Newton, à propos de la nature des comètes. Voilà ce qu'il en écrit : « loin que les comètes soient dangereuses ...Elles sont, selon Newton, des nombreux bien faits du créateur ... (Newton) soupçonne que les vapeurs qui sortent d'elles sont attirées dans les orbites des planètes, et servent à renouveler l'humanité de ces globes terrestres qui diminue toujours. Il pense que la partie la plus élastique et la plus subtile de l'air que nous respirons nous vient des comètes... il me semble que c'est deviner en sage, et que c'est tromper, c'est se tromper en grand homme ». 120(*) Toutes les illustrations qu'il décèle de l'histoire des sciences tous ces pertinents exemples qu'il y rencontre amènent Bachelard à la considération que l'attitude pragmatique est catastrophique pour la science. Non seulement elle constitue un des plus grands obstacles épistémologiques, mais encore parce qu'elle est une bonne source d'incompréhension sur la nature même de la science. * 114 Ibid., p. 86 * 115 Ibid., p.87 * 116 Ibid., p.90. * 117 G. BACHELARD, la formation de l'esprit scientifique, p.91 * 118 Ibid., p.92 * 119 Ibid., p.93. * 120 Ibidem. |
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