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Valorisation en agriculture des apports organiques contenus dans les déchets urbains:qualité des matières organiques et service écosystémique

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par Marie Virginie FALINIRINA
Ecole supérieure des sciences agronomiques Antananarivo - Doctorat en sciences agronomiques 2010
  

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CHAPITRE 3 : DYNAMIQUE DE TROIS MATIERES ORGANIQUES : FUMIER, COMPOST ET TERREAU DANS UN FERRALSOL. EFFET DES QUANTITES APPORTEES EN RELATION AVEC LA QUALITE DES MATIERES ORGANIQUES.

3.1. Introduction

Dans les pays en développement, les pratiques agricoles de fertilisation et d'amendement des sols cultivés sont traditionnellement basées sur le recyclage de matières organiques. Il est montré par ailleurs l'importance de l'entretien du statut organique des sols tropicaux pour maintenir durablement leur qualité et leur capacité de production, mais également pour valoriser au mieux les techniques d'intensification telle que l'utilisation d'engrais chimiques. Les matières organiques introduites dans un sol sont une source d'éléments nutritifs disponibles pour les plantes et les organismes vivants dans le sol, et permet ainsi d'entretenir son stock de matière organique et la vie biologique du sol. La minéralisation des matières organiques dans le sol est un processus complexe pour lequel interviennent les conditions environnementales (température, porosité des sols, propriétés chimiques), les organismes vivants du sol (plante, microorganismes, faune du sol), et la nature des matières organiques. De ces interactions entre paramètres qui peuvent varier au cours du temps et dans l'espace, sont déterminées les quantités de nutriments disponibles pour les plantes. La complexité des interactions doit être prise en compte pour comprendre la minéralisation d'une matière organique apportée au sol. Ainsi, le phénomène du «priming effect» d'une matière organique apportée, est exemplaire à ce titre. Ce processus qui se traduit par une sur-minéralisation apparente est expliqué par des interactions entre microorganismes aux comportements physiologiques différents et des apports de matières organiques exogènes plus ou moins dégradables. (Kuzyakov et al., 2006 ; Kuzyakov et Bol, 2006) définissent ainsi une succession de 4 phases lors d'un apport organique dans un sol.

(1) l'apport d'une matière organique facilement utilisable est préféré par les microorganismes actifs du sol entrainant ainsi une diminution de la minéralisation de la matière organique native du sol ;

(2) si l'apport organique est suffisant, la biomasse microbienne active qui profite de cet apport organique exogène présente ainsi une forte croissance, c'est une phase d'activation microbienne ;

(3) quand l'apport organique exogène facilement utilisable est consommé alors les microorganismes actifs se tournent vers la matière organique native du sol la plus utilisable ;

(4) Enfin, un équilibre entre microorganismes et matières organiques du sol plus ou moins utilisables se reconstitue à l'image de l'état initial. C'est la phase de déclin de l'activité microbienne qui peut prendre en fonction de la nature des microorganismes et de la matière organique de quelques jours à plusieurs semaines.

Les études théoriques démontrent que les prédictions de la minéralisation des matières organiques sont qualitativement meilleures si on introduit un contrôle de la décomposition des matières organiques par la diversité et la quantité des microorganismes du sol (Fontaine et Barot, 2005 ; Manzoni et Porporato, 2009). De nombreuses études sur les fertilisants ou amendements organiques ont concerné l'effet de l'origine, de la nature et ou des processus de fabrication des matières organiques utilisées (Bernal et al., 1998 ; Busby et al., 2007 ; Thuriès et al., 2002 ; Tognetti et al., 2008). D'autres études ont montré l'interaction dans les caractéristiques des matières organiques apportées avec la texture des sols sur lesquels elles sont appliquées (Pedra et al., 2007; Abiven, 2004). Leur valeur agronomique est alors évaluée par divers indicateurs mesurés qui vont de l'analyse chimique du produit à son évolution au cours d'une incubation in vitro dans un sol de référence (Francou, 2003; Francou et al., 2005). Cependant, l'analyse des pratiques traditionnelles agricoles dans les pays tropicaux montre une diversité non seulement de la qualité des produits utilisés mais également dans leurs modes d'apport au sol. Ces matières organiques peuvent être broyés ou non, enfouis ou demeurer en surface, apportés localement ou épandus sur le champ. Ainsi, des techniques d'apport localisé au niveau de la plante sont répandues dans les agrosystèmes des pays en développement facilitées par des pratiques agricoles généralement manuelles. La pratique du « zaï » dans les zones arides sub sahariennes en est une illustration. Cette pratique associe un contrôle de l'alimentation en eau et celui de la fertilisation nutritive au niveau de la céréale cultivée. Cette pratique participe à la sécurité alimentaire d'une population dans une situation de risque climatique et socio-économique élevée. De même, dans ces zones semi-arides, seul un parcage prolongé d'animaux domestiques, et donc un dépôt de fèces conséquent sur une zone bien délimitée permet d'assurer un arrière effet suffisamment long pour les plantes cultivées (Freschet et al., 2008). Notons enfin que cette question renvoie également au rôle de l'organisation spatiale entre organismes, ressources organiques et minérales et habitats environnementaux dans le fonctionnement durable des sols et au-delà des écosystèmes notamment en zone tropicale (Masse et al., 2007). Par exemple, dans les savanes de Côte d'Ivoire, la production primaire des savanes sur des sols naturellement peu fertiles d'un point de vue physico-chimiques s'expliquerait par la concentration spatiale des éléments nutritifs et

la faculté des plantes à exploiter efficacement ces zones grâce à des stratégies d'exploration du sol par le système racinaire (Abbadie et al., 1992 ; Mordelet et Menaut, 1997). L'apport localisé permet de donner directement à la plante les éléments nutritifs dont elle a besoin. Les quantités de matières organiques nécessaires par unité de surface peuvent être réduites ce qui est non négligeable dans des conditions de pénurie en matières organiques fertilisantes. Peu d'études sur la dynamique d'apports organiques dans les sols ont abordées la question sous l'angle de la technique de l'apport localisé dans les sols. Dans un modèle simplifié, on peut assimiler un apport localisé à l'introduction dans un sol d'une quantité élevée de matière organique par unité de surface ou par unité de masse de sol. On peut alors se poser la question sur les processus de minéralisation qui adviennent dans cette situation de forte concentration d'une ressource organique par rapport à la biomasse microbienne du sol ainsi que vis-à-vis de la minéralisation de sa matière organique native. De même, les conditions environnementales qui régissent les interactions entre matière organique et biomasse microbienne peuvent être modifiées et agir en retour sur la dynamique des nutriments et du stockage de matière organique dans les sols.

Une première approche pour répondre à ces questions est d'observer la minéralisation de matières organiques apportées à des doses croissantes dans un sol incubé dans des conditions contrôlées du laboratoire. Busby et al. (2007) ont suivi la minéralisation de matières organiques issues de déchets municipaux compostés ou non dans deux types de sol ; ils ont appliqué des quantités apportées selon un gradient allant de 1 à 8. Ils observent un taux de minéralisation inversement proportionnel à la quantité de carbone organique apportée quelque soit le type de sol mais uniquement pour des matières organiques brutes telle que des déchets municipaux qui n'ont pas subis de compostage préalable. En revanche, pour des matières compostées, le taux de minéralisation du C n'est pas affecté par le temps d'incubation, le type de sol ou la dose d'application.

Ce travail a pour objectif d'étudier la minéralisation de matières organiques apportées dans un sol en fonction des leurs caractéristiques et des quantités apportées. Ce travail présente les résultats de deux expérimentations in vitro de sols incubés avec des matières organiques à dose d'apport croissante. La première expérimentation analyse les dynamiques de minéralisation du carbone et de l'azote organique. Une deuxième expérimentation répétée dans les mêmes conditions a permis de mesurer l'évolution de la biomasse microbienne au cours de l'incubation.

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