I.2 Spécificités du management dans la
PME familiale au Cameroun
E. Kamdem (2002:24) considère le management comme une
série d'activités, en vue d'atteindre un certain nombre
d'objectifs, en prenant soin des biens et surtout des personnes.
Le management à l'africaine peut se définir
comme des manières de concevoir et de pratiquer l'organisation des
personnes et des biens; et qui soient authentiques, c'est-à-dire
adaptées au contexte (écologique, historique, politique,
technologique, économique et social) des sociétés
africaines. Le dirigeant africain, qu'il soit de l'Etat, de l'entreprise, du
village, de la société politique ou de la société
civile, a une vision du pouvoir qui est révélatrice d'un
désir de paternalisme récurrent, d'une volonté de
rayonnement personnel et d'un souci profond de légitimation
légale (Kamdem 2002 :359). Il ajoute que c'est ici qu'on touche le fond
du problème, qui est de savoir dans quelle mesure ces manières
sont susceptibles de conduire au succès économique et au
développement social.
I.2.1. Rôle de l'entrepreneur et style de management
au Cameroun
Les concepts entrepreneur, propriétaire- dirigeant,
dirigeant, sont souvent sujets à confusion. La principale
différence avancée par d'Amboise (Lalonde, 1985) entre
l'entrepreneur et le dirigeant est que, le premier en plus des rôles
qu'il peut jouer, assume seul les risques, tandis que le dirigeant apporte
uniquement son expertise. Dans la distinction entre entrepreneur et
propriétaire dirigeant, il souligne que l'entrepreneur est celui qui
dirige une entreprise dont il est le fondateur, tandis que le
propriétaire dirigeant peut assumer la direction d'une entreprise dont
il n'est pas le fondateur.
J. Schumpeter (1935) définit la fonction sociale de
l'entrepreneur essentiellement en termes d'innovation et de changement.
L'entrepreneur est donc celui qui arrive à faire une combinaison
nouvelle et évolutive des facteurs de production. Ainsi, le rôle
de l'entrepreneur est beaucoup plus important que celui du détenteur des
capitaux. L'entrepreneur est donc différent du rentier, qui se contente
simplement de placer ses capitaux pour de meilleurs profits. Au rôle
statique du rentier, s'oppose celui beaucoup plus dynamique de l'entrepreneur
dont J. Schumpeter (1935 : 345) propose une première typologie : le
fabricant commerçant, le capitaine d'industrie, le directeur et le
fondateur promoteur.
La problématique existentielle de l'entrepreneur
africain est abordée par P. Kammogne Fokam (1993), banquier et chef
d'entreprise camerounais, à travers une vision résolument
guerrière de l'environnement socio-économique et socio-politique.
Ce dernier selon lui, limite beaucoup les chances de succès de
l'entrepreneur : « Être entrepreneur en Afrique, constate-t-il,
c'est demander à David de se lancer quotidiennement dans un combat de
front contre Goliath » (Kammogne Fokam, 1993:33).
Au Cameroun, à partir d'une série
d'études de terrain, E. Kamdem (1996), a élaboré un cadre
typologique des entrepreneurs camerounais.
Une première catégorie regroupe des personnes
exerçant ou ayant exercé dans les milieux d'affaires, sans pour
autant être portées par une saine et profonde ambition
d'épouser plus longtemps le métier d'entrepreneur. De ce fait,
elles vont davantage chercher à jouer sur le registre, non des relations
d'affaires proprement dites, mais, davantage sur celui des réseaux
d'influence de nature beaucoup plus socio-politique. Chez --elles, la vocation
d'acteur socio-politique prime sur celle de l'entrepreneur créatif et
innovateur (Kamdem, 2002 :142). On recense au sein de cette première
catégorie le modèle d'entrepreneur résigné,
l'entrepreneur pleurnicheur, l'entrepreneur mystificateur. La deuxième
catégorie est celle des vrais entrepreneurs (au sens de Schumpeter). Ces
derniers reflètent moins des archétypes camerounais et africains
comme les premiers, mais, sont des modèles classiques qu'on retrouve
dans la plupart des sociétés au sein desquelles la fonction
d'entrepreneur est déterminante. Le modèle d'entrepreneur
professionnel au Cameroun comprend le profil de l'entrepreneur
débrouillard et celui de l'entrepreneur challenger.
Si de nombreux auteurs se sont intéressés aux
caractéristiques du système de management dans les entreprises
africaines, on peut observer qu'à chaque fois, ils n'ont pas
suffisamment développé les aspects familiaux. Cette situation
s'explique par la non prise en compte de la distinction entreprise familiale et
non familiale qui incontestablement apporte un éclairage nouveau
à la compréhension de leurs comportements managériaux.
Afin d'éviter cette confusion, nous avons choisi de nous
intéresser, dans un premier temps, aux spécificités de
chaque type d'entreprise, puis, en second lieu, à leurs traits
communs.
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