1.2 La motivation hors du musée
On a pu observer de quelle façon est mesurée la
motivation dans le musée. Il est à présent
intéressant de se demander comment la motivation est
étudiée en dehors du musée, et essentiellement de savoir :
comment peut-on quantifier la motivation ? On s'intéressera
donc principalement aux modèles théoriques utilisés pour
construire des échelles de motivation en dehors des musées.
De nombreuses théories expliquent la motivation en
psychologie, prenant en compte différents aspects et composantes. Deci
et Ryan (1985) ont proposé un modèle inspiré de la
découverte de Harlow (1950 cité dans Fenouillet, 2003) de
l'existence d'une motivation interne ; l'auteur observe que des singes sont
capables d'apprendre sans avoir besoin de récompense.
1.2.1 Quantifier la motivation : Le modèle de Deci
et Ryan (1985)
Le modèle proposé par Deci et Ryan (1985,
cité dans Vallerand & O'Connor, 1991 et dans Desrochers, Comeau,
Jardaneh, & Green-Demers, 2006) est assez utilisé actuellement pour
construire des échelles de motivation. Ce modèle propose de
quantifier la motivation selon un continuum de motifs : du moins
autodéterminé au plus autodéterminé. En effet, le
postulat de base de ce modèle est qu'un sujet retire plus de
bénéfice d'une activité s'il pense la faire volontairement
que s'il est contraint.
Les auteurs mentionnent trois types d'états :
motivation intrinsèque (le sujet s'engage de son propre gré dans
une activité), motivation externe (le sujet se sent obligé,
contraint par des
pressions externes), et amotivation (absence de motif). La
motivation externe est divisée en plusieurs types de régulation
également, de la moins autodéterminée à la plus
autodéterminée.
Desrochers, Comeau, Jardaneh, & Green-Demers (2006)
proposent d'élaborer une échelle de mesure de la motivation
à jouer du piano selon le modèle de Deci et Ryan. Les sujets
doivent choisir la raison pour laquelle ils jouent du piano parmi les motifs
proposés (échelle de Likert en sept points). Plusieurs motifs
sont proposés pour chaque type de motivation identifié par Deci
et Ryan :
État motivationnel
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Type de régulation
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Exemples d'items
J'apprends à jouer du piano ...
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Amotivation
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Aucun
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... mais je ne sais pourquoi je fais cela ... mais je crois
que je perds mon temps ... mais je ne suis pas intéressé à
pratiquer
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Extrinsèque
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Externe
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... parce que mes parents me forcent à le faire ... parce
qu'on me félicite quand je joue
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... parce que je me sens fier de pouvoir jouer
... parce que j'aurais honte si j'abandonnais l'étude du
piano
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... parce que cette activité m'aide à
l'école
... parce que cette activité m'aide à atteindre
mes objectifs personnels
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... parce que la musique est importante dans ma vie ... parce
que je veux devenir musicien
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Intrinsèque
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... parce que j'adore jouer du piano ... parce que j'aime le
son du piano ... parce que j'aime apprendre de nouvelles pièces au
piano
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Tableau 1 Exemples d'items de l'échelle de
motivation (Desrochers, Comeau, Jardaneh & Green-Demers, 2006)
On obtient ainsi six types de motivation différents du
moins autodéterminé au plus autodéterminé :
amotivation, externe, introjectée, identifiée,
intégrée, et intrinsèque. Les études ayant
utilisée cette échelle permettent de s'apercevoir que les formes
de motivation les plus autodéterminées (intrinsèque,
intégrée et identifiée) sont « associées
à des attitudes positives, des émotions agréables et des
comportements constructifs. Inversement aux formes non
autodéterminées de la motivation (c'est-à-dire
introjectée, externe ou l'amotivation) qui sont associées des
attitudes négatives, des émotions désagréables et
des comportements peu constructifs ou destructeurs. »
Les résultats démontrent que plus les
motivations sont autodéterminées et plus l'intérêt
pour les activités musicales est grand. Les auteurs mentionnent qu'un
des apports de ce type d'échelle est de « prédire les gains
effectués au cours de l'apprentissage ». En effet, la motivation la
plus forte aura pour conséquence une plus grande pratique de
l'instrument et donc des progrès plus grands.
Ce modèle est également à l'origine de
nombreuses échelles, utilisées dans plusieurs domaines et qui ont
démontré leur validité ; relations interpersonnelles,
sports, loisirs, éducation, monde du travail, prévention de
troubles de santé... (Desrochers, Comeau, Jardaneh, & Green-Demers,
2006 ; Vallerand & O'Connor, 1991).
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