Paragraphe 2. Théorie du
choix public et autonomie des établissements
Ce paragraphe discute de la théorie du choix public et
de l'autonomie des établissements scolaires. Il met évidence le
caractère inéquitable de l'accès à une
éducation de qualité dans un système éducatif
piloté suivant la théorie du choix public.
A) Théorie du
choix public
La théorie du choix public prône la
création d'une compétition entre les établissements
scolaires en indexant l'allocation des ressources publiques à la
performance de l'école. Les parents pourraient choisir les
établissements qui offrent le niveau de qualité le plus
élevé pour placer leurs enfants. Ce choix de la part des parents
créerait une compétition entre les établissements qui par
la suite conduirait à des efforts de la part de ces derniers pour
augmenter le niveau de la performance. Bien que cette théorie ne remette
pas en cause la gestion publique de l'éducation, elle explique qu'il est
plus difficile que les usagers du système éducatif aient
accès à une éducation de qualité lorsqu'il s'agit
d'un dispositif de gestion publique axée sur une bureaucratie
professionnelle (Meuret, 2000). Les ressources allouées à un
établissement scolaire n'ont pas souvent été
utilisées pour créer un environnement favorable à
l'apprentissage des élèves (problème principal-agent). Au
contraire, elles ont été utilisées pour améliorer
uniquement les conditions de travail pour le personnel enseignant (Glazerman,
1998).
Dans les pays à régime démocratique,
l'éducation a été identifiée comme l'une des
revendications populaires pour avoir accès à la justice sociale.
Cela dit, permettre à toutes les catégories sociales d'avoir
accès à un enseignement de qualité a été
l'objectif principal de la plupart des plans stratégiques pour le
secteur de l'éducation. La théorie du choix public est en faveur
d'une organisation de la carte scolaire de manière à rendre le
système éducatif équitable en permettant l'accès
à des écoles de qualité à tous (François et
Poupeau, 2008; Garcia et Poupeau, 2003).
En effet, les autorités pourraient utiliser la
théorie du choix public pour offrir aux familles la possibilité
d'envoyer leurs enfants dans une école qui garantit un niveau de
performance acceptable si les allocations étaient utilisées pour
améliorer la qualité de l'éducation. Il se trouve que les
différences de performance soient identifiées au sein d'un
même secteur, c'est-à-dire public ou privé. Garcia et
Poupeau (2003) ont fait remarquer qu'une concurrence se crée entre les
familles pour le choix de l'école ou entre des zones voisines pour la
localisation spatiale de l'école. Dans ces conditions, une école
réputée comme efficace va attirer un public qui lui permet de
tenir son niveau d'efficacité ou l'améliorer. Il s'est
révélé que ce choix est effectué justement en
fonction du niveau de satisfaction des familles par rapport aux
résultats scolaires. Le choix d'une école au lieu de l'autre
émane le plus souvent de la différence de performance
observée dans les progressions des élèves à
mi-parcours ou aux examens officiels de fin de cycle. Dans le cas où la
qualité n'est pas la même partout, ce sont les enfants issus de
familles aisées qui en bénéficient puisque ce sont eux qui
sont en mesure de faire des choix véritablement opportunistes (Meuret,
2000). La concurrence entre les établissements scolaires ne fait que
creuser les différences de performance entre les écoles des zones
défavorisées et celles qui se sont localisées dans des
quartiers aisés. Les parents économiquement ou intellectuellement
plus avancés seraient en mesure de profiter mieux de cette situation de
concurrence et de scolariser leurs enfants dans les meilleurs
établissements (Meuret, 2000). Plus le niveau de formation des parents
est élevé, plus ces derniers sont à même de choisir
les meilleures écoles pour leurs enfants (OCDE, 2005).
Des études ont montré que les
élèves issus des familles défavorisées seront
accueillis dans des écoles à faible performance (Glazerman,
1998). François et Poupeau (2005) ont constaté qu'en France, un
filtrage social s'opère pour le choix des écoles en fonction des
catégories sociales. Les catégories à revenu
élevé contournent les établissements pour avoir un
meilleur placement que les gens des classes moyennes qui eux-mêmes
fuiraient les écoles localisées dans les quartiers populaires.
Certaines familles choisissent de préférence des écoles
privées au lieu d'accepter la «mixité sociale» dans les
écoles publiques. Cet évitement ne fait qu'accentuer les
différences de performance entre les écoles
défavorisées et celles dites favorisées (François,
2002).
Par rapport à la théorie du choix public, on
voit que les choix individuels des écoles par les parents
d'élèves, sont rapportés à des variables telles que
l'appartenance sociale, l'âge scolaire, l'établissement de secteur
et les établissements publics environnants. Les effets du contexte
socio-spatial des établissements sur la probabilité individuelle
d'être scolarisé dans son établissement de secteur ont
été mis en évidence par Garcia et Poupeau (2003).
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