III.3. La coopération dans l'équipe
organisatrice
L'organisation de soirées est le terrain de
l'entre-aide. J'ai pu l'observer lors de l'après-midi de
préparation de la soirée du 5 avril. Emilie, une
bénévole d'Hadra, l'explique : "Mais c'est pas parce que je
suis pas sur un planning que je donne pas un coup de main.". Nous ne
sommes pas sur le terrain de l'entre-aide pour survivre mais de l'entre-aide
pour se faire plaisir. Voilà, un trait intéressant dans la
culture techno telle qu'elle s'est présentée à moi. Les
membres de l'organisation ont le sentiment d'agir ensemble pour un même
but, ce qui semblerait les conduire à être solidaires les uns
vis-à-vis des autres. Elle expose d'ailleurs deux raisons de devenir
organisatrice : "parce que j'aimais bien participer, comment dire, à
aider à développer le mouvement en France, qu'il fallait
participer". Dès lors, on peut parler de l' "équipe"
organisatrice au sens de "groupe de personnes travaillant à une
même tâche ou unissant leurs efforts dans le même
dessein" possédant l' "esprit d'équipe", c'est-à-dire
de l' "esprit de solidarité qui anime les membres d'un même
groupe"60, comme dans le sport. Mais l'analogie avec le sport
ne va pas jusqu'à l'affrontement de deux équipes adverses lors
d'un match et au type de "configuration" décrit par Norbert Elias et
Eric Dunning à propos du football car les règles du jeu sont
différentes61. En revanche, n'existe-t-il pas une dynamique
de groupes propre aux organisations de fêtes techno ? Au cours de
l'enquête, des liens sont apparus entre les différentes
organisations étudiées ce qui peut laisser penser que des
interdépendances puissent exister entre elles comme la
compétition.
Pour conclure cette partie consacrée aux groupes
d'organisateurs dans l'organisation "à l'arrache", je ne peux pas
infirmer l'existence d'une communauté. Les organisateurs se rassemblent
dans des groupes afin de poursuivre leur mouvement. La "communauté
trans(e)centale" fournit bien un motif pour organiser des fêtes techno :
appartenir à une communauté dont le but est de réunir les
conditions de l'effervescence sociale. Mais celui-ci va au-delà de ce
que j'ai pu observer dans la réalité. En effet, les organisations
que j'ai observé étaient composé d' individus unis par les
liens d'affectivité et un projet commun, organiser une fête
ensemble. L'être ensemble est-il transcendental ?
IV. Le caractère underground de la fête
techno
L'organisation "à l'arrache" peut être
définie par le choix délibéré de faire sans
référence, aux normes artistiques et/ou aux les normes
juridiques. Dans la musique, cette "non référence" porte le
60 Dictionnaire Larousse de la langue.
61Elias N. et Dunning E., Sport et
Civilisation : La violence maîtrisée, 1998, Fayard p. 284.
nom d' "underground". Mais pour qualifier l'organisation
"à l'arrache" d'organisation underground, il faut tout d'abord
définir l'évolution de ce terme. Je propose ensuite de retracer
l'expérience d'une organisation pour comprendre l'effet de
l'institutionnalisation sur ce caractère underground.
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