Section 2 : Bref historique
Pour mieux appréhender les concepts et notions objet de
notre étude, il convient de compléter les définitions
précédemment fournies par un bref rappel historique. Cette
section y sera essentiellement consacrée. Ainsi s'agira-t-il pour nous
de faire un état des lieux des OGM dans le monde dans un premier
paragraphe, puis aborder la question de l'évolution et
l'élargissement du concept de sécurité alimentaire dans un
second paragraphe.
Paragraphe 1 : l'état de la transgenèse dans
le monde
L'avènement des OGM dans le monde n'est pas le fruit
d'une génération spontanée, mais au contraire le
résultat d'un long processus scientifique. Plusieurs étapes ont
donc précédé l'essor des biotechnologies modernes.
-Avant la transgenèse:
1 L'amélioration génétique par
sélection et par croisement : l'amélioration
génétique des végétaux est pratiquée depuis
très longtemps. Plusieurs siècles avant Jésus-Christ, dans
la vallée de l'Euphrate, des fermiers sélectionnaient les
meilleurs plants en conservant minutieusement leurs semences pour la saison
suivante. La pratique de la sélection s'est transmise jusqu'aux
Amériques. Par la suite s'est ajoutée une nouvelle méthode
d'amélioration génétique : le croisement entre
espèces proches parentes. Les techniques de
croisement se sont imposées dans le domaine agricole au
XIXème siècle. La plupart des
végétaux que nous consommons aujourd'hui
seraient des hybrides résultant de nombreuses années de
sélection et de croisement des meilleurs descendants de plantes. Le
croisement est considéré comme une technique
d'amélioration génétique puisque le matériel
génétique des plantes résultantes est différent des
plantes souches ou plantes mères. Jusque-là, cet
échange de gènes par croisement n'était possible qu'entre
espèces proches parentes. Ce n'est que beaucoup plus tard que
l'amélioration génétique entre espèces
éloignées sera réalisée par le biais de la
transgenèse.
2 La découverte de la structure de
l'ADN
La molécule d'acide désoxyribonucléique
ou ADN est au centre de la transgenèse. Incluse dans chaque cellule de
la majorité des êtres vivants, elle contient les
éléments d'informations nécessaires à
l'accomplissement de diverses fonctions des cellules de l'organisme. Cette
longue molécule est divisée en milliers d'unités
nommées « gènes ». Ce sont les gènes
qui sont transférés d'une espèce à l'autre lors
d'une modification génétique par
trangenèse. En 1944, Oswald Théodore AVERY et
ses collaborateurs, les scientifiques canadiens Colin MACLEOD et Maclin Mc
CARTY font la preuve que l'ADN porte les éléments d'informations
nécessaires au maintien de la vie. Puis en 1953, James Watson et Francis
Crick parviennent à dévoiler la structure à double
hélice de l'ADN. Cette découverte est d'autant plus importante,
qu'elle permettra ultérieurement, de comprendre le fonctionnement de
cette molécule fondamentale.
3 L'universalité de l'ADN
Dans les années 60, l'universalité du code
génétique est démontrée. Les scientifiques cumulent
les preuves que la molécule d'ADN est présente chez la
majorité des êtres vivants et que son mode de fonctionnement est
universel. En fait les différences que l'on observe d'une espèce
à une autre sont le résultat de variations dans la disposition
des composantes de l'ADN.
4 Franchir la barrière des
espèces
La découverte de l'universalité de l'ADN et de
son fonctionnement a permis aux scientifiques d'envisager qu'un gène de
n'importe quelle espèce puisse être ajouté et fonctionner
chez n'importe quelle autre espèce. A l'époque, cette idée
défiait l'imagination et ouvrait la porte à un éventail de
nouvelles possibilités d'amélioration génétique
notamment chez les plantes cultivées.
- La naissance de la transgenèse
5 Les premiers OGM
Les années 70 marquent probablement la naissance des
premiers OGM. Une première transgenèse est réalisée
en 1973 lorsqu'un gène d'amphibien est inséré dans l'ADN
d'une bactérie. En 1978, un gène codant pour l'insuline est
introduit dans la bactérie Escherichia Coli afin que
cette dernière produise de l'insuline humaine. En 1983, le Canada
autorise la production commerciale d'insuline à partir de
l'Escherichia Coli génétiquement modifiée.
Aujourd'hui, cette insuline est utilisée dans le traitement du
diabète.
6 Les années 80 et le développement
d'une technique d'insertion chez les végétaux
La technique la plus fréquemment utilisée pour
accomplir une transgenèse chez les végétaux est le
transfert du gène par l'entremise d'une bactérie du sol
appelée agrobacterium tumefaciens. Cette
bactérie est utilisée comme véhicule du gène
d'intérêt, cest-à-dire, le gène
précisément recherché pour ses propriétés.
C'est dans les années 80 que des chercheurs comprennent comment cette
bactérie a la capacité de transférer son ADN dans le
matériel génétique de certaines plantes. De nouvelles
voies sont donc explorées. Est-ce que cette capacité pourrait
être utilisée aux fins de la transgenèse?
Des chercheurs de l'Université de GAND en Belgique
développent alors des bactéries aptes à être
insérées dans un gène d'intérêt dans l'ADN de
la plante.
7 Les années 90 et l'approbation des
OGM
Les années 90 sont marquées par l'approbation
des OGM dans le domaine agricole principalement. C'est au cours de cette
période que la multiplication commerciale des semences
génétiquement modifiées a commencé dans un
très petit nombre de pays, au Canada et aux Etats-Unis d'Amérique
notamment. Mais l'apparition des OGM sur le marché mondial ne s'est
faite que récemment, en 1994. C'est d'ailleurs là une cause
explicative de leur quasi méconnaissance par le grand public.
Avec l'apparition des OGM, une question peut être
soulevée, selon les opinions de chacun. La transgenèse peut
être perçue comme une méthode scientifique au même
titre que les méthodes utilisées précédemment. Il
est également possible de considérer qu'il s'agit d'une rupture
importante dans la manipulation du vivant car elle permet de franchir la
barrière des espèces. Il s'agit là d'une question
très importante qui remet en cause certaines représentations
culturelles et spirituelles sur ce qu'est la vie.
Au demeurant, l'étude historique des OGM depuis dix ans
montre bien les différences entre les Etats. Les Etats-Unis
d'Amérique, pionniers en matière d'OGM depuis 1986 ont largement
fait des adeptes dans de nombreuses régions du globe. Sans nul doute,
l'attitude des Américains face aux OGM a contribué au
développement de cette nouvelle technologie dans
l'industrie agroalimentaire. Depuis seulement quelques mois,
des groupes de personnes scandant des slogans « non aux OGM
» ont fait leur apparition dans ce pays qui compte déjà
une vingtaine de plantes transgéniques commercialisables dont le coton,
le maïs, le soja et le
colza en sont les principales. L'avancée mondiale dans
l'exploitation des plantes transgéniques laisse la France et l'Europe
quelque peu en retrait. Les biotechnologies modernes sont en France très
mal perçues par une franche importante de la population. L'affaire du
sang contaminé et la crise de la vache folle y ont
fortement contribué. A l'heure actuelle, la politique européenne
est influencée par deux courants contradictoires : celui de la marche en
avant vers les OGM dans un contexte de concurrence mondiale, de
potentialités économiques dont il est difficile de s'exclure, et
celui de la prévention et de la précaution. Quant à
l'Afrique, elle vient en dernière position dans la production et la
commercialisation des OGM, juste derrière l'Europe et l'Asie. Plusieurs
facteurs peuvent expliquer ce manque d'engouement des africains à
l'égard des biotechnologies modernes : le fort Ancrage dans la coutume,
la tradition et même la religion et le manque de technologie
appropriée dans une Afrique scientifique balbutiante encore
confrontée au sempiternel problème de pauvreté. Dans cette
indifférence quelque peu conditionnée des Africains à
l'égard des biotechnologies modernes, à l'heure actuelle, seule
l'Afrique du Sud est reconnue officiellement comme producteur de cultures
commerciales d'OGM sur le continent noir.
Aujourd'hui, on estime à un peu plus de quarante
millions d'hectares, la surface de terres qui fait l'objet d'expérience
de cultures génétiquement modifiées dans le monde. C'est
une véritable révolution génétique qui se produit
sous nos yeux. Une chose est certaine, c'est que la transgenèse a
gagné du terrain ces dernières années avec tout de
même des fortunes diverses. La principale entrave qui ralentit son
expansion résulte des préoccupations liées au besoin de
plus en plus croissant de sécurité alimentaire.
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