La Loi SRU : une loi en péril ? Controverses et difficultés d'application( Télécharger le fichier original )par Caroline Levron Université Paris X-Nanterre - Science sociale, sociologie-économie 2007 |
1.3.3. 1991 : la Loi d'Orientation pour la Ville (LOV)1.3.3.1. Une loi née dans l'urgenceDepuis le début des années 1980, les émeutes urbaines sont devenues un événement récurent en France. En 1979, ont éclaté les premières affrontements avec la police, à Vaulx-en-Velin dans la banlieue de Lyon. Deux ans plus tard et en 1983, la cité des Minguettes à Vénissieux, toujours dans la banlieue lyonnaise, s'embrase à son tour. Ces deux événements connaissent une couverture médiatique de grande ampleur. Cependant dans un premier temps, les politique sociales peinent à être mises en oeuvre. La réponse de Gaston Defferre, alors ministre de l'Intérieur est de préconiser une réponse policière ferme. A partir de 1981, apparaissent les premières politiques pour les banlieues mais la question de la mixité sociale reste « en sommeil ». En octobre 1990, la cité du Mas du Taureau à Vaulx-en-Velin est à nouveau le lieu de violentes émeutes urbaines. L'événement encore hautement médiatisé fait redécouvrir ce qui a été appelé « le problème des quartiers sensibles » et « le mal-être des banlieues ». En effet, ce coup-ci les incidents ne passent pas inaperçus, d'autant plus que la crise économique a également contribué à accentuer la ségrégation urbaine. D'anciens quartiers populaires sont devenus des lieux de relégation pour les familles en difficultés. Dans les mois qui suivent, les événements de Vaulx-en-Velin font l'objet d'analyses, d'expertises, de déclarations, de reportages journalistiques en cascade ; les journaux y consacrent régulièrement leur une. Des sociologues comme Alain Touraine s'expriment sur le sujet et tire la sonnette d'alarme : « Le problème d'aujourd'hui n'est pas l'exploitation, mais l'exclusion »35(*). La question de la ségrégation sociale qui jusqu'alors passait presque inaperçue arrive en force au premier plan, d'autant que de nouvelles émeutes éclatent dans les mois qui suivent, dans des cités de Mantes-la-Jolie ou Sartrouville. Le sujet devient alors un enjeu politique de premier ordre. En décembre 1990, le Président de la République François Mitterrand en visite à Bron, une commune proche de Vaulx-en-Velin, dénonce « la terrible uniformité de la ségrégation, celle qui regroupe des populations en difficulté dans les mêmes quartiers, qui rassemble les enfants d'origine étrangère dans les mêmes écoles » et ajoute qu'« il faut casser partout le mécanisme de l'exclusion »36(*). Dès cet instant, la lutte contre la ségrégation spatiale et sociale devient une priorité. Des décisions en faveur des quartiers sont rapidement prises. Un plan de rénovation des quartiers défavorisés est annoncé, tout comme la création d'un Ministère de la Ville. Son tout nouveau ministre socialiste Michel Delebarre présente à l'Assemblée Nationale en mai 1991, une loi nommée dans un premier temps « Loi anti-ghetto », et qui sera promulguée en juillet 1991 sous le nom « Loi d'Orientation pour la Ville » (LOV). * 35 Conférence organisée par la Délégation Interministérielle à la Ville, 19 décembre 1990. Cité dans TISSOT Sylvie, L'Etat et les quartiers : genèse d'une catégorie de l'action publique. Paris : Seuil, collection Liber/Pierre Bourdieu, 2007. * 36 Cité dans TISSOT Sylvie, op. cit. |
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