§2- L'EXECUTION DE L'OBLIGATION D'ENTRETIEN
L'article 27 de loi n° 95-73 désigne les
ministères chargés de l'équipement96 par le
biais de ses services ou sous son autorité pour « entreprendre
les travaux de protection, d'entretien, et d'aménagement
programmés et ce en collaboration avec le ministère chargé
de l'Environnement, les collectivités locales ou avec les personnes
physiques ou morales autorisées à utiliser le domaine public
maritime... » pour exécuter cette obligation d'entretien.
Cependant , il faut noter que ni l'A.P.A.L, ni même
l'A.N.P.E. n'ont été citées dans cette liste
établie par l'article 27 de la loi n° 95-73 contrairement à
l'art 3 de la loi n° 95-72 qui a octroyé à l'A.P.A.L. des
pouvoirs étendus en ce qui concerne la protection du littoral y compris
le domaine public maritime97.
Cette discordance entre les 2 textes est un terreau fertile
pour les éventuels conflits de compétences entre les
différents intervenants.
Néanmoins on pourrait comprendre les termes «
...en
collaboration avec le ministère chargé de
l'environnement », que contient le texte comme une implication de l'agence
qui est une structure publique sous tutelle du ministère de
l'environnement.
96 Le Ministère de l'Equipement et de l'Habitat est
chargé de l'administration du domaine public relatif à l'exercice
de ses attributions et propose les expropriations entrant dans le cadre de ses
activités et il est de même chargé de la
délimitation du domaine public maritime.
97 Loi n°95-72 du 24 juillet 1995, portant
création d'une agence de protection et d'aménagement du littoral,
art. 3 : « l'agence assure l'exécution de la politique de l'Etat
dans le domaine de la protection du littoral en général et du
domaine public maritime en particulier.
A cette fin, elle est notamment chargée de :
- la gestion des espaces littoraux et le suivi des
opérations d'aménagement et de veiller à leur
conformité avec les règles et les normes fixées par les
lois et règlements en vigueur relatifs à l'aménagement de
ces espaces, leur utilisation et leur occupation ;
- la régularisation et l'apurement des situations
foncières existantes à la date de publication de la
présente loi et contraires aux lois et règlements relatifs au
littoral et au domaine public maritime en particulier et ce conformément
à la législation en vigueur et tout en respectant le principe du
caractère non saisissable, non susceptible d'hypothèque,
inaliénable et imprescriptible du domaine public maritime ;
- l'élaboration des études relatives à la
protection du littoral et à la mise en valeur des zones naturelles et
entreprendre toutes les recherches, études et expertises à cette
fin ;
- l'observation de l'évolution des
éco-systèmes littoraux à travers la mise en place et
l'exploitation de systèmes informatiques spécialisés.
Il est improbable que l'A.P.A.L. puisse effectuer les
opérations d'entretien du domaine public maritime sous le contrôle
du ministère de l'Equipement et de l'Habitat qui n'est pas son
autorité de tutelle, car elle relève de la tutelle du
ministère de l'Environnement et de l'Aménagement du
Territoire.
l'A.P.A.L98 est notamment chargée de la
protection du littoral en général et du domaine public maritime
en particulier contre les empiètements.
Cela s'effectue d'une manière préventive par la
soumission obligatoire de nouvelles implantations et projets
d'aménagement à son approbation préalable, et d'une
manière curative en ce qui concerne les constructions établies
sur le domaine public maritime en violation des lois et règlements,
créant des situations foncières à régulariser.
l'A.P.A.L est chargée aussi de la gestion, l'occupation
et l'exploitation des espaces littoraux, soit directement, soit indirectement
par des personnes publiques ou privées cocontractantes.
L'A.P.A.L est considérée comme un «
observatoire du littoral »99 puisqu'elle est chargée du
suivi des entreprises d'aménagement et d'équipement et de
garantir leur conformité avec les règles et les normes
fixées par les lois et règlements en vigueur relatifs à
l'aménagement de ces espaces.
98 Elle a été créée sous forme
d'établissement public à caractère industriel et
commercial dont l'appartenance à la catégorie entreprise publique
n'est pas clairement affirmée par le texte.
99 En France, le développement du tourisme et des
industries, l'extension des villes et la diversification de leurs
activités ainsi que le souci de protéger la nature sont donc
à l'origine de l'élaboration par l'Etat d'une politique globale
d'aménagement des espaces littoraux. Cette politique volontariste s'est
traduite notamment par la mise en place du Conservatoire de l'Espace Littoral
et des Rivages Lacustres, créé par la loi 75-602 du 10 juillet
1975 insérée dans le code rural.
Cet établissement public à caractère
administratif a reçu, au terme de l'art. L.243-1 du Code Rural,
"mission de mener, après avis des conseils municipaux
intéressés, une politique foncière de sauvegarde de
l'espace littoral, de respect des sites naturels et de l'équilibre
écologique... ","Il peut présenter aux collectivités
publiques toutes suggestions en rapport avec sa mission".
En Angleterre une politique globale d'aménagement des
zones littorales a été définie dès 1972 par une
circulaire. C'est d'ailleurs l'exemple anglais du National Trust qui a servi de
modèle pour la création du conservatoire. Il s'agit d'un
organisme dû à une initiative privée, crée en 1895,
sous la forme d'une fondation par trois philanthropes, Miss Octavia HILL, Sir
Robert HUNTER, et le Chanoine RAUNSLEY. Il bénéficie toutefois de
l'appui des pouvoirs publics et une loi de 1907 l'autorise à prononcer
l'inaliénabilité de ses propriétés. Il dispose,
grâce à la générosité des citoyens, d'un
domaine immobilier important, dont l'accès est très largement
ouvert. Il réalise également ses deux objectifs de conservation
des sites ou des monuments et de mise à la disposition du public
grâce à des conventions qu'il conclut avec des
propriétaires privés. Si la mission du National Trust
dépasse la seule conservation du littoral, celle-ci constitue
néanmoins une part importante de son activité et l'a conduit
à acquérir 46000 hectares près de la côte, depuis
l'opération "Neptune" lancée à partir de 1965.
Toutefois le législateur n'a pas transposé
purement et simplement ce "patron" britannique mais a essayé de traduire
en termes de droit français les idées qui ont fait la
réussite de cette institution en les insérant dans le cadre
très classique de l'établissement public national.
Elle est chargée, par ailleurs, d'assurer la sauvegarde et
la conservation des zones sensibles.
Elle veille ainsi à la maîtrise des immeubles,
soit par l'acquisition à l'amiable, soit, le cas échéant,
par leur expropriation par l'Etat à son profit, ou encore par la
conclusion d'accords de partenariat avec les propriétaires les obligeant
à gérer les terres en question, conformément à un
cahier des charges.
Elle a aussi une mission de recherche et d'étude en vue
d'observer l'évolution des écosystèmes littoraux et la
constitution d'une banque de données informatisée.
Malgré les compétences qui lui ont
été attribuées, cette institution souffre du manque de
moyens matériels et humains et d'un problème de coordination avec
les autres institutions intervenantes en la matière, ce qui ne permet
pas à la protection préventive du domaine public maritime d'avoir
les résultats escomptés.
En définitive, on peut dire que l'administration peut
accomplir un rôle capital en matière de protection du domaine
public maritime et limiter ainsi les atteintes et les dégradations qu'il
subit.
Seulement, dans le cas où cette protection
préventive ne suffirait pas, il serait primordial d'appliquer des moyens
de protection répressifs.
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