II-2-3 Les prédictions de la théorie
cognitive du CA
Relativement peu d'études concernant directement le CA
découlent des approches stratégiques (défensive et
offensive) de la gouvernance. Elles apportent cependant une nouvelle
justification du CA dont le rôle serait également de faciliter le
développement des compétences et d'aider à la construction
de nouvelles options stratégiques. Une telle perspective conduit
à des prédictions différentes de celles issues de la
perspective contractuelle traditionnelle. Ainsi, une question telle que celle
de la composition du CA reçoit une réponse originale.
Si dans la perspective financière, la performance
dépend du contrôle du dirigeant par le CA qui, en
conséquence devrait être composé très
majoritairement d'administrateurs indépendants, dans la perspective
stratégique cognitive, le CA doit être composé en
priorité des administrateurs pouvant contribuer au
mieux à la création de compétences dynamiques et aider le
dirigeant à concevoir une vision facilitant l'apprentissage
organisationnel. Les qualités demandées aux administrateurs ne se
conçoivent plus alors en termes d'indépendance et d'expertise en
matière de contrôle, selon la distinction interne/externe, mais en
fonction des contributions cognitives pouvant s'intégrer dans un projet
collectif. Ace titre, le critère de diversité du conseil prend le
pas sur celui d'indépendance. Goodstein, Gautam et Boeker (1994)
montrent ainsi que la diversité des membres du CA a un effet
significatif sur les changements de stratégie dans les environnements
turbulents ; inversement, la proportion d'administrateurs externes n'a pas
d'effet significatif sur l'importance de ces changements.
Le CA, bien que faisant l'objet d'une forte attraction de la
part de milieux professionnels, demeure cependant assis sur de fortes bases
théoriques. Aussi, le courant contractuel le présente comme un
mécanisme devant participer à la réduction des coûts
d'agence résultant d'éventuels conflits d'intérêts
entre les dirigeants et les autres parties prenantes, tandis que pour le
courant cognitif ou stratégique, le conseil doit faciliter le
développement de stratégies conduisant à la
création de valeur. Il faut cependant noter que les théories du
CA doivent être présentées, mieux elles l'ont
été, comme des aspects particuliers des théories de la
gouvernance qui ont connu un renouvellement important ces dernières
années. Ce renouvellement favorisé par exemple par le
caractère immatériel de la nouvelle économie, le
rôle fondamental qu'y jouent l'innovation et la connaissance a par
conséquent conduit à reconsidérer la fonction du CA.
Il semble que la fonction de discipline des dirigeants
associée au CA dans la conception traditionnelle reste insatisfaisante ;
elle doit évoluer pour s'adapter aux nouvelles configurations
organisationnelles et aux nouveaux schémas de création de valeur.
Une théorie du CA doit prendre en compte les deux rôles,
fondamentaux et indissociables, de cet organe, surveillance certes, mais
également aide, sinon guide à la création de valeur.
Enfin, les théories du CA et de la gouvernance, pour être
pertinentes, doivent également rendre compte de la diversité du
CA sur le plan
international. A ce titre, il semble difficile de faire
abstraction des cadres institutionnels spécifiques à chaque
nation et qui conditionnent fortement les différents systèmes
nationaux de gouvernance.
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