A. LA CIJ
La Cour internationale de Justice (CIJ) en anglais :
International Court of Justice, ICJ), siégeant à La Haye
(Pays-Bas) dans le palais de la Paix, est établie par l'article 92 de la
Charte des Nations unies : « La Cour internationale de Justice constitue
l'organe judiciaire principal des Nations unies. Elle fonctionne
conformément à un Statut établi sur la base du Statut de
la Cour permanente de Justice internationale et annexé à la
présente Charte dont il fait partie intégrante. »
Elle a pour principales fonctions de régler des
conflits juridiques soumis par les États et de donner un avis sur des
questions juridiques présentées par des organes et agences
internationaux agréés par l'Assemblée
générale des Nations unies.
Elle a été créée en 1945,
après la Seconde Guerre mondiale, pour remplacer la Cour permanente de
justice internationale (CPJI), instaurée par la Société
des Nations (SDN). Elle a comme langues officielles le français et
l'anglais.
? Compétence contentieuse
Seuls les États ont qualité pour agir dans le
cadre de la compétence contentieuse. Ni en 1921 ni en 1945, les
États n'ont voulu limiter leur souveraineté en créant une
juridiction obligatoire de règlement des conflits. La CIJ n'est
compétente que lorsque les parties se soumettent à sa
juridiction. Il existe trois moyens d'y parvenir :
- Les deux parties concluent un compromis, convenant de
soumettre leur différend à la Cour ; ce mode de saisine se
rapproche assez du compromis d'arbitrage.
- Certains traités ou conventions comportent des
clauses compromissoires énonçant que les litiges concernant
l'interprétation ou l'application du traité devront être
soumis à la CIJ ; exemple : le traité liant les États-Unis
et le Nicaragua, ce qui a donné la célèbre
décision
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Nicaragua c. États-Unis de 1986 (activités
militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci).
- Un État peut souscrire à une
déclaration facultative de juridiction obligatoire (article 36-2 du
statut de la CIJ) ; cette déclaration peut se faire purement et
simplement, sous condition de réciprocité, ou pour un
délai de réciprocité ; des réserves (excluant
certains domaines de litiges) sont également possibles ; fin 1999, seuls
58 États sur 185 ont souscrit à une telle déclaration ;
ils sont 72 fin 2015.
La CIJ a des limites dans sa compétence : si un
État soulève une exception préliminaire à l'examen
du litige par la Cour, il appartient à celle-ci de juger si elle est
compétente ou non. C'est ce qu'elle a fait dans une série
d'arrêts de décembre 2004 opposant la
Serbie-Monténégro aux puissances qui l'avaient bombardée
en 1999 : confirmant un premier arrêt rendu à cette date par
lequel la République fédérale de Yougoslavie demandait que
des mesures conservatoires soient prises pour interrompre les bombardements
contre son territoire, la Cour a estimé qu'elle n'était pas
compétente pour se prononcer sur la question de la licéité
de l'usage de la force contre la Serbie-Monténégro au motif
principal que ce pays n'était pas membre de l'ONU à la date
où il a formé le recours.
Une fois rendue, la décision est obligatoire pour les
parties (art. 59 du Statut, art. 94 de la Charte). En cas de
non-exécution par l'une des parties, le Conseil de
sécurité peut être saisi par l'autre partie.
? Compétence consultative
La compétence contentieuse de la CIJ est limitée
aux États. Mais dans le cadre de la compétence consultative de
celle-ci, l'Assemblée et le Conseil de sécurité peuvent
lui adresser des questions. Cette compétence s'étend aux autres
organes et institutions de l'ONU (UNESCO, OIT, etc.), après accord de
l'Assemblée. Les États, eux, sont exclus de la compétence
consultative. Comme leur nom l'indique, les avis ne possèdent pas de
portée obligatoire. Ce caractère non contraignant ne signifie pas
que les avis consultatifs sont sans effet juridique, parce que le raisonnement
juridique qu'ils consacrent reflète les opinions autorisées de la
Cour sur des questions importantes de droit international. De plus, la Cour
suit essentiellement les mêmes règles et procédures qui
régissent ses jugements contraignants rendus dans des affaires
contentieuses. Un avis consultatif tire son statut et son pouvoir du fait de
l'émanation de la déclaration officielle de l'organe judiciaire
principal des Nations unies. Dans le cadre de cette
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procédure, la Cour peut décider souverainement
qu'il n'est pas opportun qu'elle se prononce.
? Droit international public
Les États membres des Nations unies ayant
expressément accepté la juridiction obligatoire de la Cour
internationale de justice.
La mission de la CIJ est « de régler
conformément au droit international les différends qui lui sont
soumis » (art.38 du Statut). Le droit applicable pour cela est :
-les conventions internationales, soit
générales, soit spéciales, établissant des
règles expressément reconnues par les États en litige ;
-la coutume internationale comme preuve d'une pratique
générale, acceptée comme étant le droit ;
-les principes généraux de droit reconnus par les
nations civilisées ;
-sous réserve de la disposition de l'article 59, les
décisions judiciaires et la doctrine des juristes publicistes les plus
qualifiés des différentes nations, comme moyen auxiliaire de
détermination des règles de droit.
Elle peut également statuer ex aequo et bono (en
équité), si elle y est autorisée par les deux parties.
Elle a néanmoins utilisé d'elle-même la notion
d'équité en tant que partie intégrante de
l'interprétation de la norme juridique, c'est ce qui est appelé
la « suppléance normative ».
En effet, comme elle l'affirme dans son arrêt Cameroun
septentrional (1963) : « sa fonction est de dire le droit mais elle ne
peut rendre des arrêts qu'à l'occasion de cas concrets dans
lesquels il existe, au moment du jugement, un litige impliquant un conflit
d'intérêts juridiques entre les États ».
? Limites de l'action
Depuis 1945, la CIJ est restée impuissante en ce qui
concerne les conflits majeurs entre États et par conséquent
politiquement plus sensibles, faute de saisine volontaire par les États.
Son action a donc été limitée aux conflits marginaux. La
CIJ a même eu un rôle dissuasif, une fois saisie, amenant les
États à s'entendre directement entre eux : ce fut le cas pour
l'Affaire relative à certaines terres à phosphate à Nauru
(1993), opposant Nauru à l'Australie, qui vit finalement le
désistement à l'instance des deux parties. Durant les
années 1970, beaucoup
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d'États ont même refusé de
comparaître devant la CIJ ; d'autres ont retiré leur
déclaration facultative de juridiction obligatoire après des
décisions leur ayant été défavorables (la France en
1974 après Essais nucléaires et les États-Unis en 1986
après Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et
contre celui-ci). L'Australie, en conflit avec le Timor oriental sur la
délimitation de leur frontière maritime commune, a retiré
ce point de la sphère de compétence qu'elle reconnaissait
à la CIJ.
La CIJ s'est même autolimitée pour ne pas se
discréditer dans le cas d'affaires sensibles. Ainsi, elle a
refusé de statuer dans certaines affaires notamment celle impliquant
l'Éthiopie contre l'Afrique du Sud et le Liberia contre l'Afrique du
Sud, 1966). Devant les refus de comparution, elle a souvent adopté une
position de retrait : elle jugeait qu'il n'y avait alors pas compétence,
ou que l'affaire était devenue de fait sans objet.
À noter toutefois que la CIJ statue sur des
différends entre États, tandis que la cours pénale
internationale juge la responsabilité pénale d'individus. Cette
distinction essentielle entre États et individus vient limiter, voire
empêcher, les éventuels conflits de compétence.
La CIJ n'est pas le seul moyen de règlement pacifique
des différends au niveau international mis à la disposition des
États. L'art. 33 de la Charte en précise un certain nombre :
« Les parties à tout différend dont la prolongation est
susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité
internationales doivent en rechercher la solution, avant tout, par voie de
négociation, d'enquête, de médiation, de conciliation,
d'arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou
accords régionaux, ou par d'autres moyens pacifiques de leur choix.
»
B. TRIBUNAL INTERNATIONAL DU DROIT DE LA
MER
Le Tribunal international du droit de la mer, né de la
convention de Montego Bay de 1982, qui empiète directement sur les
compétences de la CIJ en matière de délimitation maritime.
Le Tribunal international du droit de la mer (TIDM) est un organe judiciaire
indépendant, créé par la Convention des Nations unies sur
le droit de la mer en 1982 mais qui n'est officiellement entré en
fonction qu'en octobre 1996. Son siège est à Hambourg, en
Allemagne. Sur les aspects sous-marins, il complète le travail de
l'autorité internationale des fonds marins, également sous
l'égide de l'Organisation des Nations unies (ONU).
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? Mission
Le Tribunal international du droit de la mer instruit et juge
les différends auxquels pourraient donner lieu l'interprétation
et l'application de la Convention Montego Bay de 1982. Il confirme que le droit
applicable aux navires est celui de l'État du pavillon.
C. LA CPI
Entrée en vigueur en 2002, son siège est
à La Haye aux Pays-Bas. Signalons que la CPI est compétente pour
régler les manquements aux droits de l'homme et les crimes contre
l'humanité pouvant résulter des conflits frontaliers ou des
sécessions.
Certains États africains accusent la CPI de mener une
politique judiciaire néocolonialiste. L'un des principaux arguments au
soutien de cette thèse est le suivant : pendant les premières
années d'existence, les poursuites se sont concentrées sur le
continent africain. Par exemple, l'occasion du premier mandat d'arrêt
délivré Omar El Beshir, Jean Ping à l'époque
président de la Commission de l'UA a regretté « que la
justice internationale ne semble appliquer les règles de la lutte contre
l'impunité qu'en Afrique comme si rien ne se passait ailleurs, en Irak,
à Gaza, en Colombie ou dans le Caucase ». Le ministre gambien de
l'information a accusé la Cour de passer sous silence « les crimes
de guerre commis par les pays occidentaux ». Le Président namibien
Hage Geingob s'est dit pour sa part favorable à la création d'une
Cour de justice africaine qui remplacerait « celles imposées par
des pays étrangers »
? Annonce de retrait d'États
Africains
En octobre 2016, le Burundi annonce à la suite d'un
vote de son Parlement qu'il va se retirer de la Cour pénale
internationale, devenant le premier pays à prendre une telle
décision depuis l'entrée en fonction de la Cour en 2002. Les
autorités justifient cette décision par la « politisation de
l'action de la CPI » devenue selon eux « un instrument de pression
sur les gouvernements des pays pauvres ou un moyen de les déstabiliser
sous l'impulsion des grandes puissances ». Un an après la
notification de retrait au dépositaire du traité, le Burundi est
officiellement sorti du système du Statut de Rome bien que ceci n'ait eu
aucune conséquence juridique sur l'examen préliminaire en cours.
Quelques semaines plus tard, l'Afrique du Sud et la Gambie annoncent à
leur tour leur retrait de la CPI, déclenchant une crise au sein de
l'institution. En décembre 2016, la Namibie a déclaré
qu'elle conditionnait son maintien dans le système de la Cour à
l'adhésion au traité constitutif des Etats-Unis. En
février 2017, la Gambie annonce qu'elle demeure dans la CPI à la
suite de l'arrivée au pouvoir du nouveau président Adama Barrow.
En conséquence, la procédure de retrait est arrêtée.
De son côté, la Haute Cour
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de Pretoria rend un jugement début 2017 par lequel elle
invalide la sortie de l'Afrique du sud de la CPI pour vice de procédure,
le gouvernement ayant omis de consulter le Parlement. En conséquence, le
gouvernement annonce qu'il renonce au moins provisoirement tout en
précisant qu'il réfléchira à toutes les options
possibles.
Depuis près de la moitié d'un siècle, 57%
de cas des contentieux territoriaux portés devant la CIJ dans le monde
entier concernent l'Afrique. Pourtant certains conflits frontaliers africains
sont traités au niveau régional par l'UA. Ces statistiques
tristes nous amènent à tirer les conclusions ci-après :
O Depuis les indépendances, l'Afrique est le continent
le plus affecté par les différends de frontières
O Le constat est amer face à l'OUA et sa politique de
gestion des conflits de frontières auxquels sont confrontés les
Etats africains
° L'OUA a montré ses limites entant
qu'organisation continentale à résoudre les conflits frontaliers
de façon efficace.
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