Les ONG et la transformation des conflits dans le territoire d'Uvira.par Christian KIKA KITUNGANO Université Officielle de Bukavu, UOB - Licence en sociologie 2016 |
3. Causes et conséquences des conflits dans le territoire d'UviraLes causes des conflits sont diverses et imbriquées. Il est donc difficile de délimiter clairement et de mesurer exactement l'influence des différents facteurs. Ceux-ci peuvent aller d'une situation sociale déstabilisante, se caractérisant par l'extrême disparité sociale ou des phénomènes d'exclusion, à l'absence de mécanismes de conciliation pacifique, des intérêts des divers groupes de la société. Une compréhension globale et attendue des conditions nécessaires pour que l'Etat et la société civile puissent coopérer de manière satisfaisante est indispensable pour comprendre les origines et la dynamique des conflits violents86(*). Des capacités locales de résolution de conflit peuvent déjà être en place. En leur apportant un soutien, dans la mesure du possible, on peut contribuer à renforcer les possibilités de paix et de développement. Les théories qui cherchent à expliquer les causes des conflits et les conditions dans lesquelles ils éclatent, distinguent en général les facteurs structurels d'une part et les facteurs accélérant ou déclenchant de l'autre87(*). a. Les facteursstructurels Les conditions structurelles qu'il faut considérer sur le long terme, sont celles qui créent un climat propice à un conflit violent, sans pour autant en rendre l'éclatement inévitable. Il s'agit des facteurs politiques, sociaux et économiques qui sont imbriqués tels que : la densité de la population, l'exode rural, le niveau et répartition des richesses et des chances, l'état de la base de ressources, la structure et la composition ethnique de la société et les fondements historiques des relations entre groupes. Chaque fois, qu'une communauté fouille des exactions dans leur milieu vers une autre communauté. Elle se trouve d'abord victime de mépris et d'isolement par d'autres communautés à l'intérieur de ce territoire. Certains types d'organisation socio-économique peuvent porter en eux des germes d'un conflit. C'est ainsi que les sociétés très stratifiées ou un groupe politiquement dominant contrôle l'appareil gouvernemental, l'accès aux richesses, à l'instruction et au statut social sont souvent extrêmement vulnérables. Les Barundi qui sont confrontés à l'ère actuelle au conflit identitaire, au niveau du territoire d'Uvira, ils sont quasi inexistants dans la gestion des affaires publiques, ils sont taxés d'étranger par d'autres communautés du territoire. Les Bavira et les Bafuliru en connivence avec d'autres communautés des territoires voisins sont imbriqués dans cette lutte. Pour eux le départ de Barundi vers le Burundi reste une piste de solution au problème. b. Les facteurs accélérant ou déclenchant Les facteurs accélérant ou déclenchant sont les événements, actions et décisions qui suscitent l'escalade de la violence. Ces facteurs dépendant essentiellement de contexte propre à un pays, il n'est pas possible d'en faire une liste type. Et pour le cas d'Uvira, il s'agit par exemple de l'originalité d'une identité. Les Bafuliru qui se disent des vrais congolais et que les Barundi et Banyamulenge sont des étrangers. Chaque communauté réinvente son histoire récente afin de légitimer sa présence et son droit de gouverner. Sauvegarde de l'espace foncière. Ici c'est pire. Les problèmes entre les éleveurs des vaches (Barundi et Banyamulenge) et les agriculteurs (Fuliru) lorsque les vaches abiment les produits champêtres des Bafuliru. A ce moment les deux communautés engagent des hostilités sans merci. c. La participation politique et gestion de la chose publique Le processus de changement profond entraine souvent des fractures sociales et politiques. L'absence d'opportunité de participation de la société civile aux processus politiques et sociaux peut fragiliser les structures traditionnelles d'autorités ; le changement peut même parfois entrainer une perte d'identité culturelle et le déracinement ou la marginalisation des communautés. Les transitions politiques engendrent aussi des tensions, surtout lorsque l'équilibre du pouvoir change, au profit de certains groupes et au détriment d'autres. Des luttes pour le pouvoir peuvent aussi éclater entre les groupes de participants au processus de développement mais concurrents, même lorsqu'ils profitent toutes les prospérités économiques. La communauté Bafuliru accuse le gouvernement de la RDC d'être à la base de mésentente qui se produit dans la politique. Dans l'armée par exemple, beaucoup d'officiers Banyamulenge possèdent de grades de généraux ; les communautés Bafuliru, Bavira et les reste estiment que les Banyamulenge sont privilégiés. Une autre communauté, les Barundi pour leur part se dit discriminé. Ils ne participent plus à la gestion du pouvoir public au niveau national, provincial et territorial. Tout cela, a des répercussions sur les vécus quotidiens de la population. En outre, la gestion de groupement pose problème, les Bafuliru qui contestent régulièrement le pouvoir de Kinyonyi Ndabagoye III. Ils accusent celui-ci de s'accaparer le pouvoir. Aux pouvoirs, il ya quatre ans, il est toujours objet de contestation. La paix est possible lorsque les communautés voisines (Bafuliru et Bavira) reconnaîtront le pouvoir coutumier de Barundi. d. Les inégalités économiques Une croissance socio-économique déséquilibrée et une répartition inégale de ses fruits peuvent aussi contribuer à accroitre les tensions. Elles peuvent déranger le schéma établi de production et de distribution des revenus et de la richesse. Les ressources et les avantages qu'en découlent peuvent parfois profiter qu'aux groupes qui tiennent en mains l'appareil d'Etat. C'est ainsi que peuvent se trouver marginalisés les groupes vulnérables et les régions les moins dynamiques laissées de côté. Ce phénomène est particulièrement grave lorsqu'il s'accompagne d'un sentiment croissant d'injustice, et que les dispositifs institutionnels pour y remédier font défaut comme c'est souvent le cas parmi les populations urbaines en forte croissance. Dans la plaine de la Ruzizi, une chefferie plus exposée aux conflits entre les communautésBafuliru, Barundi et Banyamulenge. Les sources sont bien situées au niveau de la gestion de la terre. Il s'agit ici de rivalité foncière entre le Barundi et le Bafuliru qui remonte depuis l'époque coloniale. Dans cette région, la terre est un marqueur clé de l'identité collective et source de revenu. Des leur arrivée dans la région, les Barundi se servaient de réserves des classes délaissés par les Bafuliru. A ces jours, les Barundi sont considérés comme de sans-abris. Les conflits violents font des victimes, mais il est souvent difficile de savoir exactement le nombre des personnes et des biens qui en sont victimes. Leurs conséquences dans les pays touchés sont nombreuses et diverses. Les conflits violents tuent de plusieurs manières : les combats font des victimes parmi les civils et les militaires, les maladies sont plus fréquentes et la criminalité violente s'accroit. Les guerres entrainent des migrations résurgence des hostilités. Les communautés qui se disputent autour d'intérêt commun ou divergent déchirent le tissu social. Il est question, dans ce point, de parler nécessairement des conséquences économiques et des conséquences sociales88(*). a. Les conséquences économiques Elles se traduisent par une montée du chômage et une perte de revenu, car les conflits perturbent l'activité économique ; détruisent l'infrastructure, génèrent l'incertitude, font augmenter les coûts de transaction et favorisent la fuite des capitaux. Les dépenses sociales sont souvent comprimées afin de permettre une hausse des dépenses militaires. L'économie subit de changements structurels. Il importe de traiter les conséquences d'un conflit violent, non seulement pour des raisons humanitaires, mais aussi pour réduire la probabilité de récurrence des conflits. Une guerre civile prolongée induit l'inverse du développement. En voici, un certain nombre des conséquences : v Déclin économique L'économie ralentit généralement par rapport au rythme qu'elle affichait, en temps de paix. Elle se trouve considérablement réduite par rapport à ce qu'elle aurait été sans le conflit. Comprendre ce processus de contradiction économique aide à concevoir de mesures correctives pour l'après conflit. Il est aujourd'hui difficile de savoir à quoi repose l'économie du territoire si on essaie de mettre à coté le port de Kalundu et le frontière de Kavinvira. Aucun industrie n'est à signalé, aucune activité champêtre de renom n'est à pointer du doigt. La sucrerie de Kiliba à son époque employait un nombre important de la population du territoire se trouve aujourd'hui par terre. Suite au pillage perpétré par l'armée rwandaise sous l'égide de l'AFDL. Pendant ce temps, la population du territoire vit dans le chômage. Les petites activités exercées servent à la survie des ménages. Parmi ces activités, nous citons la pêche pratiqué par les communautés Bavira, Bafuliru et Babembe pour la plupart ; l'élevage des vaches et des moutons exercé par les Banyamulenge et les Barundi qui sont de peuple pasteur ; l'agriculture pratique encore par le Bafuliru et Bavira mais aussi le reste des communautés du territoire. v Infrastructure L'héritage le plus visible d'un conflit est la destruction de l'infrastructure publique. Cependant, la dégradation de l'infrastructure à la suite d'un conflit n'est pas uniquement provoquée par les dégâts directs. Dès lors qu'il relève son budget militaire, l'Etat comprime les investissements et les dépenses publiques qui étaient destinés à l'entretien de l'infrastructure. Les fonds publics font cruellement défaut. Le territoire d'Uvira se trouve actuellement dans l'ère du renouveau. Pendant le règne du RCD, une rébellion soutenue par le Rwanda pour renverser le régime de Kabila ; des écoles, des Eglises ont été détruites par la guerre et pillés. Dans plusieurs endroits occupés par la rébellion les écoles sont abandonnées. v Fuite des capitaux Pendant un conflit, la peur et l'absence d'opportunités incitent les individus à chercher refuge à l'étranger, tant pour eux-mêmes que pour leurs actifs. Les mieux placés pour s'expatrier sont ceux qui disposent des qualifications, ils peuvent plus facilement financer leur émigration et sont mieux accueillis dans le pays hôte. Par conséquent, le pays d'origine perd ses travailleurs qualifiés ; l'hémorragie des qualifications s'accompagne d'une fuite des capitaux. Les individus déplacent leurs actifs à l'étranger, pour les mettre en sécurité et parce que le retour sur les investissements dans leur pays diminue à mesure que sa situation économique se dégrade. Il en résulte une grave pénurie de compétences, une diaspora importante, un effondrement de l'investissement privé et une accumulation de richesse privée à l'étranger. D'après notre enquête, la majorité des personnes qui possèdent des moyens financiers épargnent leurs actifs au Burundi pays voisin, le Rwanda et la Tanzanie. Pendant cette même période, le territoire a perdu sa main d'oeuvre intellectuel ; les uns se sont dirigés à Bukavu et territoires voisins pour des raisons de sécurité et d'autres au Burundi jusqu'à changer même la nationalité. Cette fuite des capitaux laisse un handicape au développement économique du territoire. b. Les conséquences sociales C'est le point focal de cette section. Ces conséquences comportent alors : v Taux de mortalité Les militaires et les civils périssent dans les opérations militaires et le nombre total de morts causées par la guerre englobent les morts des combats et les décès dus à la recrudescence de la violence unilatérale, des maladies, de la famine, de la malnutrition et de la criminalité. Le conflit communautaire c'est pire. La violence conduit à la perte des vies humaines, le massacre de Katogota lors de la rébellion du RCD occasionné par le conflit armé, le massacre de Mutarule quant à ce, est occasionné par le conflit communautaire. Des corps sans vue d'un membre d'une communauté ramassé dans certains endroits. v Les conséquences durables Les conflits continuent d'affecter la vie des individus bien après la fin des hostilités, non seulement ils tuent, mais aussi ils provoquent des handicapés qui subsistent après une blessure ou une maladie. L'une des affectations qui touchent le plus le territoire est le VIH/SIDA. Cette maladie peut contracter par des relations non protégées ou contamination du sang par le virus. Les conflits conduisent à la propagation rapide de VIH. Les soldats qui risquent leurs vies à la guerre ne craignent pas cette maladie. Selon toujours notre enquête, des militaires appartenant à tel ou telle communauté expose une autre communauté à ce danger. Ils propagent la maladie. Les cibles sont des femmes qui sont transformées pour esclaves sexuels. Les populations civiles sont souvent victimes de droits de l'homme et notamment de violences sexuelles.En général, les déplacements de population pendant les conflits fragilisent la cohésion et les relations sociales, ce qui peut conduire à la promiscuité. Comme indiqué, les forts taux de prévalence s'expliquent aussi par la pauvreté, qui semble également creuser les disparités entre hommes et femmes. Bien que les femmes soient les plus exposées au risque de contracter le virus. Il semble qu'elles ne peuvent pas demander à leurs partenaires d'utiliser des préservatifs. Avec le développement de groupes armés dans le territoire d'Uvira, la population est victime de pillage des petits et des grands bétails. Bien que ces actes aient été posées par les rebelles, les communautés se responsabilisent le fait. Comme résultat, la violence se déclenche. v Déplacement de la population Après le déclenchement de conflit, on constate d'un pays à l'autre, d'une région à l'autre, d'un territoire à l'autre ou d'un village à un autre, le déplacement massif de la population suite aux exactions de la part des protagonistes. Les conflits violents ont des conséquences diverses sur les enfants filles et garçons et sur les femmes. Le cas le plus récent est celui de Mutarule où les habitants ont quitté le village pour se refugier à Sange. De là, ils ont mené une vie pénible malgré quelques assistance en vivre et non vivre de la part de l'ONG UNCHER. La cité d'Uvira aujourd'hui fait face à l'exode rural. Certains habitants d'autres groupements environnants quittent leurs milieux pour se réfugier dans la cité d'autres se dirigent à Gatumba au Burundi, pays voisin. v Les changements structurels Les activités les plus vulnérables à la fuite des individus qualifiés et l'augmentation des attitudes opportunistes sont les fonctions publiques, la justice, la comptabilité et la médecine. Par définition, tous les métiers nécessitent des compétences, mais aussi de l'honnêteté. Les fonctionnaires effectuent des tâches difficiles à surveiller. C'est l'une des raisons pour lesquelles les activités relèvent du secteur public. L'accroissement des comportements opportunistes est donc particulièrement dommageable. La fuite des cerveaux et l'augmentation de l'opportunisme ont pour conséquence une dégradation des performances dans le secteur public comme dans le secteur privé. La composition sectorielle de l'économie se modifie pendant une guerre civile, notamment parce que les activités n'ont pas, toutes, le même degré de vulnérabilité. Si les combattants raflent les biens meubles comme les bétails ou volent des cultures, les ménages ruraux risquent d'opter pour les activités de subsistance moins vulnérables. Un conflit prolongé est susceptible d'éloigner l'économie rurale des activités commerciales. Etant donné que nous avons suffisamment parlé des conséquences du conflit armé, la nécessité de veiller au conflit non armé s'impose. Dans ce cas, nous allons sans doute parler des effets des conflits sur le lien social et les effets des conflits sur l'individu. v Rupture des liens sociaux Les conflits peuvent au renforcement du lien social. Les individus se regroupent autour d'une cause commune, définissent leurs buts et les moyens d'y parvenir, tout en mettant en place des règles qui permettent de décider comment une lutte, une solidarité mécanique89(*)se met en place parce qu'on a une situation où des individus ayant des conditions d'existence commune et luttant pour le même objectif se réunissent. v Les effets des conflits sur l'individu90(*) Le conflit a aussi un effet direct sur l'individu ; quand celui-ci décide de s'investir dans un mouvement social, il renforce sa socialisation en intégrant un groupe et améliore son estime de lui-même. En effet, il défend ses droits, ce qui lui permet de ne pas se satisfaire d'une position qu'il perçoit comme dominée. Mener le conflit lui apporte des compétences, des connaissances et des nouvelles interactions sociales. C'est en outre un moyen de modifier son identité sociale et de répondre à ses besoins de reconnaissance sociale91(*) La faiblesse qu'on vient de remarquer chez un être humain se résume dans le fait que les individus sont incapables de ne pas puiser à ce qu'ils font lorsqu'ils agissent avec autrui dans des circonstances qu'ils ont l'habitude de pratiquer ou qu'ils parviennent à identifier de façon correcte92(*) Evaluer les actions des confessions religieuses dans la transformation des conflits à travers leurs organisations associatives dans un contexte de pauvreté, nous pousse d'abord à comprendre leurs remettes. Philippe Patou93(*) parle des plans de licenciement qui se multiplient, laissent prévoir un accroissement important du chômage, alors que la population s'appauvrit, la misère s'étend, détruit des familles, des femmes et des hommes, réduit à aller se nourrir et contraint de se priver de tout ; les Eglises restent comme on pouvait le prévoir désespérément muettes, sourdes et aveugles aux cris et aux larmes de ceux que le capitalisme, le libéralisme et la mondialisation mettent à terre et piétinent. Cet auteur se pose la question de savoir «Quel évêque, quel cardinal a-t-on entendu protester contre la crise financière, sociale et humaine en critiquant les effets néfastes du capitalisme, du libéralisme et de la mondialisation ? » Aucun, bien attendu, l'Eglise reste l'allié des puissants, des riches et des parvenus94(*). Comme l'on vient de voir à travers la réaction de Patou, nous allons sans doute parler de la notion d'acteur dans les conflits. Ces acteurs peuvent être caractérisés ou catégorisés en deux. A ce titre on peut situer des acteurs directs et des acteurs indirects. a) Acteurs directs : Sont ceux qui interviennent de manière directe dans les conflits ; ils sont considérés comme des protagonistes c'est-à-dire des parties en conflit. Sont des personnes qui apparaissent sous plusieurs formes dans les conflits, des personnes étant à l'origine du conflit ou qui influencent ce dernier. Nous pouvons dans ce cas citer les individus ou groupe d'individus, les communautés tribales ou ethniques, les groupes armés, les autorités tant locales, nationales et internationales. Les communautés banyamulenges, Bafuliru, Barundi, Bavira et les membres de la diaspora de ces communautés citées, sont considérés comme des acteurs directs car ils sont directementimpliquésaux conflits déclenchés entre ces parties. b) Acteurs indirects : Sont des acteurs qui apparaissent dans un conflit avec le statut de chercher la solution aux problèmes qui les oppose. Nous pouvons à ce niveau noter le statut d'arbitre et/ou de médiateur. Etant donné qu'il est difficile d'énumérer les acteurs des conflits sans pour autant être en présence de conflit, nous reviendrons sur ce point dans le troisième chapitre de ce travail. Les acteurs indirects sont des ONG, des confessions religieuses, le gouvernement congolais et d'autres personnes qui se fixent l'objectif de mettre fin à la rivalité qui oppose les communautés du milieu. c. Des tensions dans la chefferie plaine de la Ruzizi Le conflit dans la plaine de la Ruzizi entraine des divergences qui se font sentir au niveau local où la gestion des localités et cités reste paralysée. v La Cité de Sange dans la tourmente. Le chef de cité est aussi absent car il n'est pas accepté par la communauté Bafuliru. Les hommes interrogés à Sange ont montré que la gestion communautaire est actuellement faite par les Bafuliru sans prendre en compte les besoins des communautés Barundi et banyamulenge. Ces derniers, refusent quant à eux d'être dirigés par un chef mufuliru. Dans ce contexte, « c'est la loi de la jungle qui est appliqué, les plus forts résistent ». Nos enquêtées ont expliqué qu'en cas de différends, lesmilitaires ou les policiers s'interposent. En cas de litiges entre voisins, le chef de quartier s'arrange pour réunir les deux parties, et si le litige persiste, il les réfère à la police. Cependant, « les policiers font payer les amendes non prévues par la législationcongolaise »95(*). La justice est mal rendue et la corruption est visible à tous les niveaux. De même, certaines femmes ont noté qu'à cause de l'absence d'autorité, les gens ont recours aux sages du milieu ou parfois aux unités de la police. Comme ces personnes ne parviennent généralement pas à résoudre les problèmes, la gestion communautaire reste faible et l'instauration d'un leader équitable encore plus importante. La cité de Sange se trouve dans deux chefferies. La première est dans la chefferie de Bafuliru et la seconde et dans la plaine de la Ruzizi. Le conflit est inévitable, chaque chefferie réclame le monopole de la gestion pouvoir de la cité. Le chef de cité est désavoué par les deux chefferies. A l'heure actuelle, c'est la chefferie de Bafuliru qui gère la cité. Ce pouvoir est contesté par les Barundi et Banyamulenge. Actuellement, suite au massacre de 2014 à Mutarule, les communautés Bafuliru et Barundi refusent absolument un chef qui n'appartient pas à leur communauté.Des tensions s'aggravent de deux côtés. Le conflit entre éleveurs et agriculteurs dans la Plaine de la Ruzizi a éclaté entre un groupe de jeunes Bafuliru et une coalition de Banyamulenge et Barundi, propriétaires des vaches. La communauté Barundi raconte que les Bafuliru auraient blessé leurs vaches pendant la saison sèche de 2014, ce qui constitue une provocation extrême. Pour se venger, les Barundi et Banyamulenge ont tué 37Bafuliru le 6 juin 2014 à Mutarule, dont des femmes et des enfants, dans une Eglise. Ni la police ni les FARDC (les forces armées congolaises) ne sont intervenues pour sauver les vies humaines. Par la suite, la communauté Bafuliru a conclu que les communautés Barundi et Banyamulenge étaient responsables du massacre de Mutarule96(*). Cette attitude affichait par les FARDC démontre combien de fois le pouvoir en place est incapable de gérer le conflit et en même temps assurer la sécurité de personnes et de leurs biens à Mutarule. * 86 LE WIS COSER, idem, p.34 * 87Ibidem. * 88 www.afdb.org consulté le mardi 15 Avril 2016 * 89E.DURKHEIM cité par M.MONTOUSSE et G.RENOUARD, in 100 fiches pour comprendre la sociologie, 3e éd, Bréal, 2006, p.33 * 90 CHRISTINE MARSAN, Gérer les conflits, Dunod, Paris, 2005, p.5 * 91 www.kartable;fr/ recherche terminale consulté le 15 Avril 2014 * 92 S. MESURE et P. SADIVAN, Le dictionnaire des sciences économiques et humaines, 1er éd, Paris, quadrige, PUF, 2006, p.188 * 93 P. PATOU, la misère, analyse sociologique, philosophique et politique, Paris, l'Harmattan, 2010, p.76 * 94 P. PATOU, idem, p.78 * 95 Rapport Surch for Common Ground, étude sur le conflit en plaine da la Ruzizi, 2015, p.10 inédit * 96Analyse de Conflit « Hauts Plateaux de Mwenga - Plaine de la Ruzizi », SFCG, octobre 2014, p. 22. |
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