B- L'EXIGENCE D'UNE MAJORITE IMPORTANTE POUR L'ADOPTION
DE
LA LOI
Le mot majorité est susceptible de plusieurs acceptions
en fonction du champ scientifique dans lequel on se retrouve. En droit
constitutionnel spécifiquement, il désigne « la
pluralité, c'est-à-dire le plus grand nombre de suffrages
exprimés »166 . Il est donc question des suffrages
exprimés par les parlementaires dans le cadre de la seconde lecture. Si
dans la première lecture tous les textes sont adoptés à la
majorité simple, en seconde lecture par contre les lois ordinaires sont
adoptées à la majorité absolue (1) et les lois portant
révision constitutionnelle à une majorité qualifiée
(2).
1- L'adoption des lois ordinaires à la
majorité absolue
Une loi ordinaire est une loi votée par le parlement
selon la procédure législative et dans les matières
expressément prévues par la constitution. C'est ce dernier
élément qui nous intéresse, élément
matériel de la loi ordinaire. En effet, la constitution détermine
l'élément
166AVRIL (P.) et GICQUEL (J.), Lexique de droit
constitutionnel, op. cit., p. 75.
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LA SECONDE LECTURE EN DROIT PARLEMENTAIRE CAMEROUNAIS
matériel de la loi en son article 26. C'est donc dans
le cadre de cet article précisant le domaine de loi que l'adoption
s'opère à la majorité absolue pendant la seconde
lecture.
La majorité absolue désigne selon le lexique des
termes juridiques « plus de la moitié des voix
»167. Le plus souvent la majorité absolue est
traduite par l'expression « 50+1 voix ». Ainsi, c'est donc cette
majorité qui est exigée pour l'adoption des lois ordinaires. A
cet effet, la constitution et les lois portant règlement
intérieur des assemblées disposent que les députés
et sénateurs adoptent les lois à la majorité absolue en
cas de seconde lecture168. Pratiquement, l'adoption du texte en
seconde lecture se traduira ainsi qu'il suit : à l'Assemblée
Nationale, sur 180 députés, l'adoption exige au moins 91 voix ;
au Sénat, sur 100 sénateurs, l'adoption exige au moins 51 voix.
Si ces voix ne sont pas atteintes, la loi n'est pas adoptée. Mais avec
le fait majoritaire, l'on voit mal comment ces cota ne seront pas atteints.
2- L'adoption des lois portant révision de
constitutionnelle à la majorité
qualifiée
Les lois portant révision de la constitution sont
celles qui ont pour objet la modification de toute la constitution ou de
certaines de ses dispositions. Ainsi, elles ne répondent pas au
même formalisme que les lois ordinaires dans la mesure où
« le parlement se réunit en congrès, lorsqu'il est
appelé à se prononcer sur un projet ou une proposition de
révision de révision de la Constitution »169
. Et pour l'adoption du texte, c'est « à la majorité
absolue des membres le composant »170, soit (280/2) +1=
141 voix pour l'adoption en première lecture.
En seconde lecture, la majorité exigée c'est la
majorité qualifiée. Cette dernière désigne la
« majorité exigeant des conditions plus difficiles à
réunir que la majorité absolue ; ex. majorité des 2/3
». Ainsi, cette majorité est importante du fait de la nature
du vote dans lequel elle intervient, notamment la révision de la
constitution. La constitution dispose donc que « la révision
est votée à la majorité des deux tiers des membres
composants le parlement »171, soit 280 (2/3) = 186 voix.
Si ce total important n'est pas atteint, la révision ne sera pas
adoptée en seconde lecture. Mais nul ne doute que le fait majoritaire
tournera à la faveur de l'adoption.
167 GUINCHARD (S.) et DEBARD (Th.), Lexique des termes
juridiques, 22e éd, DALLOZ, 2014-2015, p. 622.
168 Art 19 al. 3 C ; Art 24 al. 3 C ; Art 65 al. 2 du
règlement intérieur du Sénat; Art 77 al. 2 du
règlement intérieur de l'Assemblée Nationale.
169 Art 63 al. 3 C du 18 janvier 1996
170 Ibid.
171 Ibid.
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LA SECONDE LECTURE EN DROIT PARLEMENTAIRE CAMEROUNAIS
Au regard des développements qui
précèdent, il apparait clairement que le réexamen de la
loi en seconde lecture se fait suivant des modalités ambivalentes, ceci
traduisant un polymorphisme pour une même catégorie juridique
qu'est la loi172. C'est la raison pour laquelle les
finalités de ce réexamen sont variables.
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