CHAPITRE 2 : LES CONSEQUENCES INCIDENTES DE LA
SECONDE
LECTURE
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La seconde lecture constitue un incident de procédure
législative du fait de sa capacité à affecter la
procédure législative initiale. De la sorte, sa nature incidente
ne peut qu'entrainer des conséquences incidentes tant sur la
procédure législative, que sur la loi. Le mot conséquence
revêt plusieurs significations dans le langage courant. D'une part, il
désigne la « suite qu'une action, un fait entraine »
et de la sorte s'assimile à un effet ou un
résultat145 . D'autre part, il est
appréhendé comme une locution adverbiale qui signifie «
compte tenu de ce qui précède »146.
C'est dans le premier sens que le mot conséquence sera
appréhendé car il se rapproche de sa signification juridique dans
la mesure l'effet renvoi à la conséquence
juridique147. En clair, par conséquences incidentes de la
seconde lecture il sera question d'aborder l'effet que la seconde lecture
entraine non seulement sur la procédure législative, mais aussi
sur la loi. Ainsi, la seconde lecture entraine la suspension de la
procédure législative (section 1) et le réexamen de la loi
(section 2)
SECTION 1 : LA SUSPENSION DE LA PROCEDURE
LEGISLATIVE
Etymologiquement, le mot suspension vient du latin
suspensio et renvoie à « l'action de suspendre et le
résultat de cette action ; mesure temporaire qui fait provisoirement
obstacle à l'exercice d'une fonction ou d'un droit, à
l'exécution d'une convention d'une convention ou d'une décision,
au déroulement d'une opération ou d'une instance..., soit
à titre de sanction, soit par mesure d'attente »148.
Au regard de cette définition, il ressort en gros que la seconde
lecture, de par son déclenchement, fait obstacle au déroulement
de la procédure législative (paragraphe 1) et suscite le report
de la consécration normative de la loi (paragraphe 2).
PARAGRAPHE 1 : UNE SUSPENSION SUSCITEE PAR LE
DECLENCHEMENT DE LA SECONDE LECTURE
Tel que précisé plus haut, plusieurs
autorités interviennent dans la procédure d'élaboration de
la loi, qu'il s'agisse du dépôt, de la délibération
ou de la promulgation. Cette dernière étape est de la
compétence principale du Président de la République s'il
ne formule aucune demande de seconde lecture. Ainsi, la provocation (A) de
seconde lecture entraîne la suspension de la procédure
législative bien qu'elle n'exige aucune condition (B).
145 Le Robert pour tous, op. cit., p. 225.
146 Ibid.
147 CORNU (G.), (dir.), op. cit., p. 386.
148 Ibid., p. 1006
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A- UN DECLENCHEMENT PROVOQUE
« Le Président de la République
promulgue les lois adoptées par le parlement dans un délai de 15
jours à compter de leur transmission, s'il ne formule aucune demande de
seconde lecture ou s'il n'en saisit le Conseil Constitutionnel
»149 . Au regard de cette disposition constitutionnelle,
il apparait clairement que le déclenchement de la seconde lecture est
mise en branle par le Président de la République (1), dans un
intervalle de temps bien précis (2).
1- La mise en branle par le Président de la
République
Au sens de l'article 31 alinéa 1 de la loi
constitutionnelle du 18 janvier 1996, le Président de la
République peut, dans les délais de la promulgation, retourner un
texte au parlement pour seconde lecture. Dans l'histoire constitutionnelle du
Cameroun, ce déclenchement de la seconde lecture n'a pas toujours
été l'apanage du Président de la République ; ceci
est due notamment aux diverses formes que l'Etat, le régime politique et
le gouvernement ont subi.
En effet, sous l'autonomie interne en 1958, la seconde lecture
qualifiée de nouvelle délibération comme en France
était mise en branle par le Premier Ministre chef du
gouvernement150. Dès l'accession du Cameroun oriental
à l'indépendance en 1960, la seconde lecture était mise en
branle par le Président de la république151 tandis
qu'en 1961 sous la république fédérale elle était
mise en branle au niveau fédéral « à l'initiative
du président de la république ou sur demande de l'un des premiers
ministres fédérés », et au niveau des Etats
fédérés par les Premiers Ministres152. C'est
depuis 1972153 que la mise en branle de la seconde lecture est
l'apanage du Président de la République et c'est le même
esprit qui structure la constitution de 1996. Cette mise en branle de la
seconde lecture est tout de mime circonscrite dans le temps.
149 Art 31 al. 1 C. du 18 janvier 1996
150 Art 9, Ordonnance n° 58-1375 du 30 décembre
1958 portant statut du Cameroun ; in GUIFFO MOPPO (J.-P.),
constitutions du Cameroun, op. cit. p. 25.
151 Art 34 Constitution du 4 mars 1960 ; in GUIFFO MOPPO
(J.-P.), constitutions du Cameroun, op. cit., p. 26
152 Art 18 loi n° 61-24 du 1er septembre 1961
; in GUIFFO MOPPO (J.-P.), constitutions du Cameroun, op.
cit., p. 95.
153 Art 29 Constitution de la République Unie du
Cameroun du 2 juin 1972 ; In GUIFFO MOPPO (J-P), constitutions du Cameroun,
op. cit., p. 135.
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2- La circonscription dans le temps
La constitution et les lois portant règlement
intérieur des assemblées précisent que c'est dans le
délai de la promulgation, 15 jours, que le Président de la
République peut formuler une demande de seconde lecture. Passé ce
délai la loi doit être promulguée.
Cependant, il faut souligner qu'au regard de l'histoire
constitutionnelle du Cameroun, les délais de mise en branle de la
seconde lecture n'ont pas toujours été de 15 jours. Ainsi sous
l'autonomie interne, la seconde lecture ne pouvait être formulée
que « dans un délai de 10 jours francs à compter du vote
de la loi »154. C'est depuis la constitution du 4 mars
1960, que les délais de formulation de la seconde lecture sont
passés de 10 à 15 jours. Ces délais constituent donc la
seule exigence pour demander une seconde lecture car hormis ce délai, le
déclenchement de la seconde lecture est inconditionnel.
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