A- LA PROMULGATION DE LA LOI
Selon Pierre AVRIL et Jean GICQUEL, « la promulgation
est l'acte par lequel le chef de l'Etat atteste l'existence de la loi et donne
l'ordre aux autorités publiques de l'observer et de la faire observer en
la rendant exécutoire »109 . Dans le même
esprit, le vocabulaire des termes juridiques définit la
promulgation comme étant « le décret par lequel le chef
de l'état constate que la procédure d'élaboration de la
loi a été régulièrement accomplie et rend
exécutoire le texte adopté par le parlement ou par le peuple
»110. Au regard de ces définitions, il apparait que
la promulgation est une opération qui rend la loi exécutoire par
le truchement du Président de la République. La constitution du
Cameroun dispose à cet effet que « (1) le Président de
la République promulgue les lois adoptées par le parlement... (2)
A l'issue de ce délai, et après avoir constaté sa carence,
le président de l'Assemblée Nationale peut se substituer au
Président de la République »111. Il ressort
de cette disposition constitutionnelle que la promulgation est une
opération relevant du Président de la République (1), avec
une possible substitution du président de l'Assemblée Nationale
(2).
105 Art 66 Al. 4 du règlement intérieur du
Sénat, Art 78 Al. 3 du règlement intérieur de
l'Assemblée Nationale
106 Idem, aux alinéas 7
107 Idem, aux alinéas 8
108 Art. 29 Al.2 C. du 18 janvier 1996
109 Lexique de droit constitutionnel, op. cit., p.
95.
110 CORNU (G.), (dir.), op. cit., p. 817.
111 Art 31 Al 1 et 2 C. du 18 janvier 1996
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LA SECONDE LECTURE EN DROIT PARLEMENTAIRE CAMEROUNAIS
1- Une opération relevant du
Président de la République
La promulgation est une opération qui relève de
la compétence du Président de la République en vertu d'une
exigence de la théorie de la séparation des pouvoirs :
l'exécutif est chargé de l'exécution des lois. Ainsi, si
le législatif légifère, l'exécutif met en
exécution. En tant que chef de l'exécutif, le Président de
la République promulgue les lois. Le mot « promulgue » au
présent de l'indicatif érige une obligation à
l'égard du Président de la République112, une
compétence liée113. De la sorte, il atteste que la loi
a été régulièrement votée114 et
lui donne une existence juridique en l'insérant dans l'ordre
juridique.
La promulgation doit intervenir dans le délai de 15
jours qui suivent la transmission du texte par le Président de
l'Assemblée Nationale. Elle se fait par un décret portant
promulgation signé par le Président de la République. Ce
décret n'est pas distinct de la loi mais rattachée à elle
et constitue un acte de gouvernement car entrant dans les rapports entre
l'exécutif et le législatif115 ; à cet effet ce
décret est injusticiable. Mais si dans ce délai le
Président de la République ne promulgue pas la loi, il peut y
avoir possible substitution du président de l'Assemblée
Nationale.
2- Une possible substitution du président de
l'Assemblée Nationale
Etymologiquement le mot substitution dérive du latin
substitutio et est susceptible de plusieurs acceptions.
Premièrement, il désigne le remplacement d'une personne par une
autre116. Deuxièmement, il désigne l'action pour une
personne de se mettre à la place d'une autre et d'agir à sa
place117. Les deux acceptions seront prises en compte dans la mesure
où elles traduisent le remplacement du Président de la
République par le président de l'Assemblée Nationale, bien
que ce remplacement soit conditionné.
En effet, deux conditions sont exigées pour que le
président de l'Assemblée Nationale puisse se substituer au
Président de la République dans la promulgation de la loi :
l'écoulement des délais et le constat de la carence. La
première condition exige donc que, pour qu'il y'ait substitution, les 15
jours se soient écoulés. La seconde condition exige le
112 DUGUIT (L.), Manuel de droit constitutionnel,
4e éd. 1923, p. 517.
113 GOUNELLE (M.), Introduction au droit public,
2e éd, Montchrestien, 1989
114 CC, Décision n°85-197 du 23 Aout 1985,
évolution de la nouvelle Calédonie, (15)
115 Sur la notion d'actes de gouvernement, lire KAMTO (M.),
« Actes de gouvernement et droits de l'homme au Cameroun », Lex Lata,
n° 026, mai 1996, pp. 9-14 ; ATEMENGUE (J. de N.), « Les actes de
gouvernements sont-ils une catégorie juridique ? Discussion autour de
leur origine française et de leur réception camerounaise »,
Juridis Périodique, n° 42, avril - mai - juin 2000, pp. 102-109.
116 CORNU (G.), (dir.), op. cit., p. 994.
117 Ibid.
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LA SECONDE LECTURE EN DROIT PARLEMENTAIRE CAMEROUNAIS
constat de la carence du Président de la
République. La carence désigne « (...) l'inaction ou
l'abstention consistant à ne pas prendre une disposition dont le besoin
se fait sentir »118 ; ainsi, le président de
l'Assemblée Nationale doit constater l'inaction ou l'abstention du
Président de la République pour pouvoir se substituer à
lui, bien que dans la pratique il n'a jamais fait usage de ce droit
malgré les nombreuses carences constatées119.
La procédure législative normale commence avec
le dépôt des projets ou propositions de loi et se termine avec la
promulgation de la loi. Au regard des prérogatives dont disposent les
autorités intervenant dans ce processus, certains freins ou blocages
peuvent être mobilisés et affecter positivement ou
négativement la procédure : ce sont les incidents de
procédure législative.
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