SECTION 2 : LA SOUMISSION DIFFICILE DU PHENOMENE
FINANCIER PUBLIQUE A LA RIGIDITE DU DROIT
La soumission difficile du phénomène financier
publique à la rigidité du droit est due aux caprices des finances
extérieurs qui augmentent. Il nous consistera de voir dans un premier
temps le budget programme importé d'ailleurs qui conduit à une
soumission difficile à la rigidité du droit (paragraphe 1), et
dans un second temps le budget programme étant une
conditionnalité des bailleurs de fonds (paragraphe 2).
PARAGRAPHE 1 : UN MIMETISME INSTITUTIONNEL DIFFICILE A
REALISER
Parlant de l'origine du budget programme, parce
qu'importé de l'extérieur, la transposition du budget programme
dans les pays africains est vécue comme une commande exogène de
l'action publique imposée par les évidences du contexte des
administrations qui doivent être plus compétente. Cette
réforme est alors vécue simultanément comme une
nécessité fonctionnelle liée à l'évolution
du contexte dans lequel elle s'insère. Cet outil semble avoir fait ses
preuves ailleurs et donc proposé aux pays africains comme modèle
de gestion efficace de l'action publique à travers son transfert dans
leurs administrations. De tous ces fait, il parait difficile pour ces pays
Africains de se soumettre à la rigidité du droit en
matière financière publique.
En plus, une grande variété de notion est alors
utilisée pour rendre compte de ce caractère exogène des
politiques publiques. Certains préfèrent la notion de transfert
qui se rapproche selon la métaphore biologique, de la greffe, la
transplantation, la transposition, ou encore de la circulation. D'autres
l'abordent sous un vocable moins tranché et emprunte donc la notion de
convergence en rapport avec la préoccupation de la diffusion, la
généralisation, l'imitation, l'isomorphisme.
Quoi qu'il en soit, pour utile que puisse être
l'exercice de la clarification notionnelle, son intérêt nous
semble limité, car en fait toutes ces notions ont un trait commun : la
réplique totale ou partielle d'un modèle considéré
comme meilleur à celui qu'il est censé remplacer. Pour nous, la
transposition du budget programme dans les pays africains renvoie à
toutes ces réalités de transfert qui consistent à
transposer des connaissances propres à un modèle -passé
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LE BUDGET PROGRAMME ET ETAT DE DROIT AU CAMEROUN
ou présent - dans un nouvel environnement. Il ne
découle pas d'une réflexion endogène,
réfléchie et mûrie de l'intérieur.
Ainsi au Cameroun, l'instauration du nouveau régime
financier qui consacre l'utilisation du budget programme est l'aboutissement
d'un processus. À la suite du constat relevant la
nécessité de réformer la gestion des finances publiques au
Cameroun, plusieurs responsables du ministère des finances (MINFI), ont
été envoyés en formation et en mission en France pendant
près de 5 ans pour s'approprier les fondements et le mécanisme de
fonctionnement de la loi organique en France (la LOLF) afin adapter ce
modèle au contexte camerounais. Ce travail a été fait avec
l'appui des agences techniques qui continuent de mettre leurs expertises
à la disposition du MINFI97.
S'agissant des capacités des administrations, notons
que non seulement cet outil ne relève pas d'un choix
délibéré, mais en plus, il n'est pas fortement
popularisé et internalisé dans les pays
bénéficiaires. Et pourtant, il intervient dans un contexte
où les administrations publiques sont fortement affaiblies par 30 ans
d'ajustement et ainsi dépouillées des ressources humaines en
capacité de s'approprier le budget programme.
En effet, les politiques d'ajustement structurel ont
contribué non seulement à affaiblir l'État avec l'exigence
du « moins d'État », mais elles ont spécialement
démantelé l'administration dans leur capacité à
mener une réflexion endogène et à conduire les
réformes. Les agents publics, pendant longtemps confinés à
exécuter des réformes conçues de « Washington »
sont subitement et sans préparation inviter à assumer la
responsabilité de la mise en oeuvre d'un processus participatif lourd et
complexe qu'impose le budget programme.
Pour conclure, le budget programme, modèle
importé de l'extérieur ne permet pas une réelle
appropriation du phénomène financier publique qui conduit
à une soumission difficile à la rigidité du droit. Ce
budget programme apparait aussi comme une conditionnalité des bailleurs
de fonds.
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