Chapitre I : APERÇU DE LA SUCCESSION EN DROIT
POSITIF CONGOLAIS
L'évolution du droit successoral en République
Démocratique du Congo depuis des années à nos jours est
d'une extrême complexité. La retracer dans sa diversité et
ses multiples détours excéderait les limites d'un simple
Précis, aussi se contentera-t-on d'en esquisser les grandes lignes. Ce
raccourci aura pour objet de montrer quelle place la dévolution
légale et le pouvoir de la volonté ont tour à tour
occupé dans l'organisation du droit successoral.
La codification de 1804 joue, en matière successorale
comme dans les autres domaines du droit civil, le rôle de premier
plan15. C'est pourquoi, depuis 1987 la famille, en droit congolais,
était soumise à une diversité des règles juridiques
du fait de l'existence d'un droit écrit colonial d'une part et de la
multiplicité des coutumes d'autre part. Chemin faisant, ces deux ordres
juridiques préjudiciaient simultanément à coup sûr
la cohésion, la paix et la justice familiales.
Le régime des successions n'en a pas moins souffert.
Une harmonisation et une codification s'imposaient. Ainsi, la loi n°87/010
du 1er aout 1987 portant code de la famille fut mise sur pied. Elle
entra en vigueur une année après sa promulgation. Cette loi
véritable monument juridique complet, traite toutes les questions
relatives aux droits de la personne et ses rapports de famille. Elle
réserve une attention particulière à la question des
successions. En fait, en ce domaine, elle s'est écartée quelque
peu des coutumes pour faire droit à l'impératif du
développement et de l'évolution.
15 F. TERRE et Y. LEQUETTE, Droit civil les
successions, les libéralités, Paris Dalloz,
3éd, 2002, p. 906.
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Plus de 30 ans après et en dépit d'une large
diffusion avec la modification intervenue en 2016, les pratiques locales et
même les juges continuent à résister au changement
opéré par le législateur16.
Pour BOMPAKA NKEYI, succéder signifie remplacer une
personne à la tête de ses biens17. Ce remplacement
devrait être priorité réservée aux enfants du de
cujus. Concernant le sort des héritiers dans nos coutumes KENGO WA DONDO
affirme que celles-ci donnent des solutions diverses car en règle
générale elles excluent de la succession le conjoint survivant et
même parfois les enfants pour retenir divers parents dont notamment les
oncles et les frères.
AMSATOU avec sa logique négro-africaine, les
successions concernent surtout les fonctions. Selon lui, parler de succession
aux biens lignagers, c'est penser plutôt à la succession aux
fonctions exercées sur les biens. Par exemple, ce n'est pas la terre en
tant que telle qui entre dans la succession, mais la fonction du gérant
de la terre. La mort en Afrique n'entraine pas cessation de la
personnalité et porte rupture avec le de cujus, bien au contraire le
successeur est présenté comme étant désormais le
« de cujus vivant », mieux le remplaçant-incarnation
du de cujus dont il portera le nom et certains signes symboliques. La force
vitale se transmet ainsi entre les vivants et les morts18
Ce présent chapitre consacré aux notions
théoriques se propose de répondre avec détails
nécessaires, à quelques questions notamment sur les notions de la
succession, la dévolution successorale, la liquidation de la succession
et le partage de la succession entre les héritiers, qui doit partager et
comment doit il procéder enfin à quel tribunal doit-on s'adresser
en cas de contestation.
16 APRODEPED, Les droits successoraux de la veuve
et des orphelins en droit congolais, Kinshasa, 2007, p. 15.
17 BOMPAKA NKEYI., Notes du cours des
régimes matrimoniaux, successions et libéralités,
Kinshasa, Faculté de droit, UPC, Année académique
2019-2020, inédit, p. 44.
18 J-P. MULUME, cité par APRODEPED,
Op.cit, p. 12.
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Ainsi, les notions sur la succession (section 1)
d'une part et la dévolution de la succession (section
2) d'autre part constituent l'objet du présent chapitre.
Section 1: Notions sur la succession
Cette première section est articulée autour de deux
paragraphes essentiels. De la notion de la succession
(§.1) et les différentes sortes de succession et
son cas d'ouverture en droit positif congolais (§.2).
§.1 : Notion de la succession
Succéder signifie remplacer une personne à la
tête de ses biens comme expliciter ci-haut. On peut la remplacer à
la tête de tous ses biens (succession à titre universel) ou
seulement de certains d'entre eux (succession à titre particulier).
Ainsi, la succession c'est, entendons-nous, le remplacement à titre
universel ou particulier pour cause de mort. Les biens se transmettent pour
cause de mort soit en vertu de la loi (c'est la succession ab
intestat), soit par testament (c'est la succession testamentaire).
Le code de la famille ne dit pas ce que l'on entend
précisément par succession mais ce terme revêt deux
acceptions qu'il tire du langage juridique. Dans un premier sens, par
succession, on entend le mode de transmission pour cause de mort, du patrimoine
du de cujus à un ou plusieurs patrimoines des survivants. Il s'agit
d'une définition liée à la conception traditionnelle qui
désigne la transmission des biens d'une personne du fait de sa mort.
Le terme succession possède un deuxième sens. Il
désigne aussi l'objet de la transmission, l'héritage ou le
patrimoine transmis qui comprend tous les droits que le défunt
exerçait de son vivant, à l'exception de ceux qui, par leur
nature ou en vertu d'une disposition de la loi, sont tellement inhérents
à la personne et échappent à toute
transmission19. De manière simple on entend
19J. YAV KATSHUNG., Op.cit, pp. 13-21.
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par succession tout court, le remplacement à titre
universel pour cause de mort20
Le patrimoine du défunt comprend non seulement tous ses
biens mais aussi ses dettes. En d'autres termes, la succession comprend les
biens et les dettes du défunt au moment du décès. Ce sont
tout d'abord les biens immobiliers et tous les biens immobiliers que le
défunt possédait au moment du décès. La succession
comprend encore toutes les donations que le défunt a faites de son
vivant.
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