Pour conclure sur cette thématique, nos
répondants ont été séduits par l'idée de
mettre en place ce type de d'ateliers par niveaux : nous pouvons dire qu'une de
nos hypothèses est confirmée. Les formateurs ressentent le
réel besoin d'avoir une formation recentrée sur leurs attentes.
Il faut savoir prendre en compte la spécificité individuelle de
chacun. De ce fait, la mise en pratique de ces actions de formation peut
supprimer certaines contraintes. Nous pensons aux inégalités en
termes de compétences numériques, d'information sur l'outil et de
pratique sur l'outil. Il faut relever « cette capacité de s'adapter
aux besoins d'apprentissage des individus », selon V. Duveau-Patureau
(2004).
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Thématique 2 :
Aujourd'hui, la digitalisation est considérée
comme une évidence pour l'avenir de la formation. Il semble important
d'éviter les conflits d'usage des technologies. Pour cela, il faudrait
éloigner les personnes de leurs craintes et les rapprocher des
intérêts qu'ils peuvent tirer du digital. Nous parlons d'une
renormalisation des pratiques dans le sens où la personne doit
abandonner ses normes habituelles vers des nouvelles. En outre, cette
évolution apporte un autre tournant à la posture du formateur, il
faut donc s'assurer que chacun de nos interlocuteurs le reconnaisse.
Notre questionnement, vis-à-vis de
l'intérêt de la digitalisation de la formation auprès des
formateurs, semble confirmer nos dires. Pour la majorité d'entre eux,
ils sont au courant de l'ère du digital qui s'ancre dans leur domaine,
tandis que pour d'autres, ça reste peu lucide.
Le formateur E4 a conscience que nous sommes dans
l'ère du digital : « Comme dit, moi je pense que on est
déjà en plein dedans » (E4, annexes, ligne 1362). Les
intérêts qu'il évoque sont alors, la possibilité de
suivre plusieurs groupes en même temps et individualiser le parcours
selon les besoins des stagiaires « nous dans les métiers de
terrain on est déjà là-dedans parce que on travaille
déjà avec le numérique parce que le numérique en
fait il nous permet de mettre les autres en double fil pour t'occuper de
l'individualisation de la formation » (E4, annexes, lignes
1369-l371). A cela, l'E1 rajoute que le digital permet de « diminuer
des coûts de production ou de formation [...] (E1, annexes, lignes
242-243) Par le digital, on on met des richesses, des connaissances en
ligne. » (E1, annexes, ligne 250).
Cependant, ces avis ne semblent pas être
partagés par tous, la formatrice E5 continue à défendre,
tout au long de l'entretien, la place de l'humain dans la pédagogie :
« Non toujours pas, encore une fois c'est parce que j'aime tellement
mon métier, j'aime tellement avoir du public parce que je reviens
toujours au même, ne pas oublier l'humain, » (E5, annexes,
lignes 1636-1637).
Les intérêts de la digitalisation de la
formation s'accompagnent de l'évolution de la posture du formateur. Il
n'est plus seulement un transmetteur de savoir mais aussi un animateur et un
accompagnateur. En outre, il serait nécessaire d'insister sur le fait
que le
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digital ne parviendrait pas à remplacer le formateur qui
possède la stratégie pédagogique. Il conviendrait donc de
définir les outils digitaux au service de sa pédagogie, et non
l'inverse. Le formateur E7 évoque le terme d'« expert » pour
désigner le formateur futur : « pour pouvoir travailler comme
ça, il faudrait être expert quand même pour utiliser ce
genre de choses-là » (E7, annexes, lignes 2471-2472),
même si le contact direct avec les stagiaires reste interrogatif
« est-ce qu'ils auront beaucoup de contacts avec les stagiaires je
sais pas, en tout cas ce que je souhaite pour demain, c'est que toutes les
personnes qui veulent être formateur soient motivées pour
l'être » (E7, annexes, lignes 2472-2474).
Cette nouvelle fonctionnalité repose la question de
l'acceptation ou de la non-acceptation de la part des formateurs : «
certains sont réfractaires ils préfèrent quand même
le présidentiel, moi non moi j'ai toujours suivi la technologie, la
technique par rapport aux entreprises, donc là ça suit son cours,
c'est un peu la crainte de rater des choses ou de pas utiliser la bonne
méthode parce qu'on est quand même sous quelque chose où on
reste quand même autodidacte sur le digital puisqu'on est on est les
premiers à prendre » (E1, annexes, lignes 261-265).
Néanmoins, cette nouvelle posture ne signifie rien de
positif pour certains qui ont cette « peur » de se retrouver face
à des machines et non face à un public, c'est le cas de la
formatrice E5 : « J'ai peur, je vais pas te mentir, je vois bien que
c'est la distance qui va prendre le dessus, je le vois bien mais après
voilà. On fera ce qui y'a et puis c'est tout » (E5, annexes,
lignes 1648-1650). Le point qui peut être bénéfique est que
l'E5 a conscience qu'il n'y a pas d'échappatoire et que le digital
pèsera plus que le traditionnel. L'E1 vient confirmer ses propos en
évoquant que cette digitalisation serait un incontournable dans la
formation des formateurs :« Je pense que dans quelques années,
ça fera partie de la formation des formateurs, ce sera
intégré dans les parcours des formateurs, eux ils seront plus en
transition puisqu'ils seront directement dans les processus nous on sera
obligé de s'adapter, de déconstruire, de construire à
nouveau et d'accepter les nouvelles méthodes » (E1, annexes,
lignes l72-l76).