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Accompagnement et formation à  la transformation digitale.


par Melek BAHAR
INSPE Strasbourg - Master Ingénierie de Formation et des Compétences 2020
  

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3. ANALYSE ET RÉSULTATS

3.1. Analyse des entretiens et résultat

Les résultats qui ont découlé de nos entretiens vont nous permettre de vérifier la véracité de nos hypothèses pour aboutir à notre plan d'action. Pour cela, nous avons souhaité scinder les hypothèses par thématique en récoltant les similitudes, les contradictions et les éléments supplémentaires qui semblaient pertinents.

3.1.1. L'hypothèse 1

Pour rappel, notre première hypothèse concerne le rapport de notre population de formateurs aux outils digitaux. Dès la prise de nos fonctions d'ingénieurs de formation, nous avons réuni un ensemble de documents pour réaliser un diagnostic sur la réalisation des formations des formateurs à la multimodalité et aux outils digitaux propres à l'AFPA (Annexe 2). En parallèle, pour confirmer nos supports, nous sommes allés à la rencontre des formateurs sur le terrain. Ce que nous avons constaté est que nous étions face à une partie des formateurs qui avaient entièrement intégré les dispositifs digitaux dans leurs pratiques pédagogiques, et une autre partie qui préférait tout de même rester à l'écart. En effet, les entretiens vont nous permettre d'élucider les prises de positions et à mieux comprendre les effectifs des formateurs formés à ces outils.

Nous avons scindé notre hypothèse en trois thématiques.

Thématique 1 :

Sachant que l'avènement des nouvelles technologies impacte profondément le marché de la formation, pour rester compétitive, ces derniers tentent d'adopter des solutions novatrices pour se différencier de leurs concurrents. Nous parlons de digitalisation de la

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formation, ou d'e-formation, ou d'e-learning dans le cadre de la formation. En d'autres termes, l'enjeu des organismes dans la conduite de ces changements organisationnels, structurels et culturels, est d'instaurer de nouvelles pratiques à leurs collaborateurs pour se situer à l'ère du digital. Cependant, pour mener à bien ces projets, il est évident de prendre en compte les spécificités individuelles de chacun. Également, il faut être attentif sur les types de formation, les publics de stagiaire, et les méthodes pédagogiques adoptées. Il est à savoir que les formateurs sont libres de choisir d'intégrer les outils digitaux dans leurs pratiques ou non.

Dans le cadre de notre enquête, nous sommes face à un public qui possède diverses caractéristiques qui pourraient expliquer l'adhésion ou non aux outils digitaux. Il faut tenir compte de la singularité des individus et de leur activité. Ce qui en ressort sont : leurs antécédents, leurs expériences professionnelles, leurs environnements de travail et leurs pratiques pédagogiques habituelles.

Tout d'abord, nous abordons les expériences professionnelles des formateurs. Selon nous, elles sont l'une des raisons qui expliquent certaines positions à l'égard des outils digitaux. Particulièrement, nous faisons un lien entre les expériences professionnelles et les générations des individus. Dans ce contexte, nous tentons de comprendre l'aisance à l'usage du digital. En effet, L.Marchand (2003) démontre que l'âge est l'un des éléments les plus indicatifs considérant les anciennes générations moins à l'aise avec l'informatique, de peur de faire une mauvaise manipulation, que les générations qui ont été plus souvent en contact avec l'ordinateur. Mais bien que des générations soient similaires, nous comprenons que d'autres facteurs plus déterminants entrent en jeu ...

Nous trouvons qu'il serait intéressant de ressortir les points suivants :

Notre premier formateur en assistant-comptable (E1) âgé entre 50 et 55 ans, déclare avoir une bonne connaissance du domaine informatique. Nous le confirmons par ses propos : « J'étais un peu geek dans le temps, donc je me tiens au courant des évolutions » (E1, annexes, lignes 97-98). Cela nous conforte sur l'idée qu'il a conscience des transformations rapides qu'engendre la technologie sur son secteur d'activité : « on a des réseaux partout, de la 5G, du très haut débit, techniquement y'aurait plus de limite pour les outils liés à la formation surtout » (E1, annexes, lignes 100-101).

Notre deuxième formatrice dans la même tranche d'âge que le premier (50-55 ans) et aussi dans l'assistanat en comptabilité, travaillait auparavant dans le domaine de

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l'informatique : « pendant 10 ans je suis restée dans l'informatique, dans les logiciels, dans l'accompagnement » (E2, annexes, lignes 307-308), et lors de son entrée à l'AFPA, elle a découvert la plateforme de formation Mètis pendant sa formation DFA : « Devenir formatrice à l'AFPA » : « Alors moi, j'ai découvert Mètis quand j'étais en DFA en mars 2017 donc on s'est pris une journée pour découvrir la plateforme Mètis » (E2, annexes, lignes 502-503). Ces propos sont essentiels pour comprendre que la formatrice possède déjà une aisance technologique, et a déjà connaissance de la plateforme dès les débuts de sa fonction.

Notre troisième formatrice en CIP (Conseiller.e. en Insertion Professionnelle), âgée entre 50 et 55 ans, a une ancienneté de seize à l'AFPA. Elle a été longtemps formatrice pour les ADVF (Assistant.e. de vie aux familles) puis depuis une année elle exerce ses fonctions de formatrice pour la formation CIP. Lors des formations en ADVF, cette dernière n'a pas eu besoin d'utiliser les outils digitaux car elle considérait que ce n'était pas indispensable pour la culture du métier « moi personnellement j'ai très peu utilisé du fait de manque de connaissance et en lien aussi avec la culture du métier qui était pas assez développée » (E3, annexes, lignes 751-753). Autre point qui est important à relever, c'est qu'elle n'a pas utilisé la plateforme de formation car elle manquait de connaissance. Cela revient à interroger sur la diffusion d'information de la part de la direction vers ce projet de changement.

Notre quatrième formatrice (E4), âgée entre 30 et 35 ans, est une ancienne stagiaire de l'AFPA dans le cadre de la formation FPA : Formation Professionnelle des Adultes : « Moi ce qui va être pas mal c'est que je vais pouvoir t'en parler des 2 côtés parce que je l'ai connu en tant que stagiaire et maintenant formateur » (E4, annexes, lignes 1041-1042). Son ancien statut de stagiaire lui donne l'avantage d'avoir déjà eu recours à la plateforme de formation, elle aurait donc une vision complémentaire dans l'usage de la plateforme. Cela lui donne une meilleure aisance pour s'approprier l'outil dans son rôle de formatrice.

Notre cinquième formatrice, âgée entre 40 et 45 ans, en secrétariat médico-social a toujours été attiré par le contact direct avec l'humain. C'est surtout cet aspect qui l'a orienté à devenir formatrice dans ce domaine : « je peux pas dire mon métier est ma passion mais on est pas loin, j'adore ce que je fais, j'ai besoin d'être en contact avec les gens, avec mon public et c'est le fait justement d'être en contact que je suis comme un poisson dans l'eau, c'est ce qui me convient ». (E5, annexes, lignes 1514 ;1516). Nous comprenons clairement par cette phrase que l'intégration du digital avec les formations à distance (ou les formations mixtes) peut être compliqué par cette formatrice.

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Notre sixième formatrice (E6) est une formatrice en secrétaire-assistant.e, âgée entre 55 et 60 ans, elle a été l'une des premières à être formé sur la plateforme Mètis et a connu son évolution au cours du temps : « quand on a mis en place la fameuse plateforme tertiaire et c'était le début entre guillemets du digital qui allait peut-être arriver. Donc j'ai été dans les prémices avec mes collègues » (E6, annexes, lignes 1702-1703).

Notre dernier formateur en formation professionnelle des adultes (E7), âgé entre 60 et 65 ans était en pré-retraite et possédait une ancienneté de 32 ans au sein de l'organisme. Il déclare que durant toute sa carrière, il n'a pas eu un recours courant aux technologies : « Moi j'utilise l'ordinateur juste pour projeter des PowerPoint ou des documents qui doivent être sur écran et vue. Mais, appart ça je n'ai pas trop utilisé d'autre environnement numérique parce que ce n'était pas à l'ordre du jour » (E7, annexes, lignes 2287-2289). Il faut porter son attention sur la dernière phrase qui sous-entend que l'usage des plateformes de formation n'était pas d'actualité et pas obligatoire, donc le formateur préférait rester sur ses pratiques habituelles.

Deuxièmement, pour optimiser au mieux l'utilisation du digital dans la formation, il faut, selon nous, disposer du matériel et de l'équipement adéquats. Nous savons que l'AFPA souhaite promouvoir au mieux ses outils auprès des formateurs à la demande de ses clients et du marché concurrentiel, mais nous nous sommes posé la question de l'environnement de travail pour réaliser cette promotion dans de bonnes conditions. Comme le souligne E.Baudoin et L.Tahssain-Gay (2013), « L'environnement spatial et temporel peut ainsi être décrite par les salaries comme facilitant ou à l'opposé entravant ». L'environnement de travail viendrait donc influencer la performance des formateurs, en fonction de l'accès aux ressources informatisées, à un ordinateur ou à un autre moyen, selon E. Bernadin et C.Krohmer (2019). C'est pourquoi, pour utiliser aisément la plateforme de formation, il faut réadapter l'environnement en fonction des besoins de l'outil. La stratégie de l'organisme repose souvent sur des formations à distance pour réunir des stagiaires de différentes localisations. Dans ce contexte, les formateurs utilisent tous les moyens mis à disposition sur la plateforme de formation pour communiquer avec leurs stagiaires (communication en synchrone ou asynchrone).

Par les différentes réponses que nous avons recueillies, nous faisons le constat qu'il peut y'avoir des dysfonctionnements en termes de matériel et d'équipement. Les formateurs se disent ne pas disposer de moyens idéaux dans la réalisation de leurs missions en ayant

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recours au digital. Par exemple, pour l'E2 qui est en formation mixte (un jour en présentiel par semaine et le reste à distance), elle confirme : « Alors, actuellement c'est peu moyen, c'est un peu moyen par rapport à cette action » (E2, annexes, ligne 327), « moi j'ai un petit PC portable c'est pas évident. Voilà on fait avec » (E2, annexes, ligne 335).

La formatrice E5 travaille avec la plateforme de formation et explique la problématique qu'elle rencontre régulièrement : « Un peu lent, mais bon après on n'est pas sur du matériel nouvelle génération, mais après on travaille avec » (E5, annexes, lignes 1519-1522).

Nous pouvons encore confirmer les défauts d'équipement et de matériel par la formatrice E3, « Ce qui était souvent un frein c'est que [...] à chaque fois c'était compliqué au niveau informatique y avait toujours un truc qui n'allait pas, ça ramait, c'était trop et du coup c'était pas encourageant alors ce qui fait que au démarrage si ça fonctionne pas, on se retrouve surtout en difficulté on a plus envie d'y aller, retourner puisque si c'est encore une autre difficulté » (E3, annexes, lignes 803-805).

Une des dimensions de la fracture numérique, selon A. Ben Youssef (2004) repose sur le fait que « l'utilisation des TIC repose sur de nombreux services. L'absence de ces services produit une sous-utilisation importante de ces usages », soit, dès lors qu'un dysfonctionnement apparait dans l'utilisation d'un dispositif numérisé cela contraint l'usager et l'oriente vers des pratiques plus traditionnelles abandonnant le digital causé par une mauvaise expérience.

Troisièmement, certains formateurs sont toujours attachés à l'image du formateur en face à face pédagogique avec son stagiaire. Pour eux, le contact humain bien plus qu'une évidence c'est un besoin. Ces formateurs disposent déjà d'habitudes en matière de pratiques pédagogiques, ils préfèrent rester dans leur « zone de confort » car c'est ce qui fait le sens de leur métier. Nous pouvons illustrer ces propos en citant l'E5 qui exprime son épanouissement dans son rôle de formatrice grâce à ce contact humain qu'elle privilégie « j'adore ce que je fais, j'ai besoin d'être en contact avec les gens, avec mon public et c'est le fait justement d'être en contact que je suis comme un poisson dans l'eau, c'est ce qui me convient » (E5, annexes, lignes 1514-1516).

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"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite