2- Approche de Frydenberg et Lewis (1993)
Les travaux de Frydenberg et Lewis (1993) portent surtout sur
l'étude des réponses de coping chez les adolescents. Il s'agit
d'expliquer les mécanismes adaptatifs de coping face au stress des
adolescents, dans une perspective développementale, en tenant compte
aussi bien des aspects individuels que situationnels. Il faut rappeler que la
période de l'adolescence en tant que phase de transition entre l'enfance
et l'âge adulte, fait généralement référence
à de multiples changements physiologiques, psychologiques ou sociaux qui
surviennent : la maturation sexuelle, le développement de la
pensée formelle, la crise identitaire, les évènements et
tracas de la vie quotidienne. On peut noter par exemple, que l'adolescent et le
jeune adulte connaissent un développement important du lobe frontal qui
serait associé à une plus grande sensibilité au stress
(Kay, 2010). En outre, selon Bergonnier-Dupuy et Esparbès-Pistre (2000)
l'adolescence est également le moment où la demande d'envisager
ou d'opérer des choix engageant leur vie professionnelle future
amènent les jeunes à se poser bon nombre de questions, qui
représentent un stress perçu de façon
particulièrement intense par certains, au point de les conduire à
l'échec scolaire. L'adolescence est aussi une période critique
dans l'apparition de nombreux troubles psychiatriques (Romer & Walker,
2007), le stress chronique durant cette période est une variable
déterminante dans le développement des problèmes de
santé mentale.
Dans le même ordre d'idées, Frydenberg (1997)
considère que l'adolescence est vécue à travers les
interactions entre les jeunes et les contextes dans lesquels ils se
développent; ainsi, les tâches développementales
associées à l'adolescence peuvent être posées comme
un ensemble unique de facteurs de stress et de contraintes. Unique, dans la
mesure où le stress ne se manifeste pas de la même manière
aux différents âges de la vie (Marcia, 2010). Par exemple, les
soucis financiers ne sont généralement pas une source directe de
stress à l'enfance, mais le
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deviennent avec l'évolution de l'âge ; en outre,
les attentes de la société envers les individus diffèrent
selon leur tranche d'âge. Compas, Ledoux et Phares (1989) divisent
l'adolescence en trois étapes (12-14 ans, 15-17 ans et 18-20 ans) et
identifient six sources de stress : le stress familial (ce sont les pressions
parentales, qui seraient plus présentes chez les jeunes adolescents) ;
le stress associé aux pairs (les bagarres et les problèmes avec
les amis, observés davantage entre 15 et 17 ans) ; le stress
académique (performances aux examens et aux travaux, beaucoup
vécu par les adolescents plus âgés), le stress face
à l'autonomie (quitter la maison familiale), le stress dans les
relations intimes (séparations et disputes amoureuses), le stress
relié à l'amitié (amis ayant des problèmes
personnels).
La plupart des adolescents traversent
généralement cette étape de passage de l'enfance à
l'âge adulte sans difficulté majeure, tandis que certains y
parviennent moins bien (Frydenberg, 1997; Kay, 2010). L'adaptation de
l'adolescent à ces différentes exigences, est obtenue à
travers un processus qui implique des stratégies cognitives et
comportementales visant à éliminer ou à réduire les
demandes, à les redéfinir afin de les rendre plus maniables, ou
encore à gérer la tension qui est ressentie à la suite de
l'expérience de ces demandes. La capacité de parvenir à
cette adaptation dépendra du répertoire des stratégies
d'adaptation connues par l'adolescent (Frydenberg & Lewis, 1993).
En effet, l'approche conceptuelle de Frydenberg et Lewis
postule un large éventail de stratégies de coping « en
théorie le nombre d'actions de coping (y compris les pensées et
les sentiments) auxquelles les personnes ont recours pour gérer leurs
préoccupations, est infini...» (Frydenberg, 1997, p.38), qui
varient selon le contexte et la nature du facteur de stress. Cette conception
peut être présentée comme une extension du modèle
transactionnel de Lazarus et Folkman, qu'elle enrichit en passant d'une
catégorisation dichotomique des stratégies de coping à
trois groupes de styles de coping. Dans cette approche théorique, le
style
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de coping fait référence à certaines
caractéristiques relativement stables des individus ; à la
tendance d'une personne à agir d'une façon constante face
à un ensemble de circonstances ou de stresseurs. Il existerait un style
de coping propre à chaque individu, chacun mobilisant
préférentiellement certaines stratégies plutôt que
d'autres, pour faire face aux pressions internes et externes de la vie
quotidienne. Le modèle proposé et utilisé lors de leurs
recherches menées auprès des adolescents suggère trois
types de coping : le coping productif, le coping non-productif et la
référence aux autres. Le style référence aux autres
est une particularité de cette approche, comparée à la
conception dichotomique de Lazarus et Folkman. Les stratégies
centrées sur le problème ont été combinées
avec les stratégies centrées sur l'émotion ; en plus, des
stratégies de recherche de soutien social et d'évitement sont
rajoutées pour former en tout trois types de styles de coping.
Le style productif inclut les stratégies qui
fonctionnent pour résoudre des problèmes et rester optimiste, en
forme, calme et socialement engagé (Frydenberg, 1997). Le style
référence aux autres comprend des stratégies qui
consistent à se tourner vers autrui pour demander de l'aide. Ces deux
styles de coping sont dépeints comme des stratégies efficaces
à l'instar des stratégies centrées sur le problème
de Lazarus et Folkman (Frydenberg, op-cit; Frydenberg & Lewis, 1993). Par
contre, le coping non-productif qui réfère à
l'évitement du problème, est décrit comme non
fonctionnel.
En résumé de ce chapitre, l'état de
stress est d'après le modèle transactionnel, une
représentation interne d'une transaction particulière et
problématique entre une personne et son environnement. Le stress peut
alors se définir comme un état psychologique qui implique
à la fois des aspects cognitifs et émotionnels. La nature
subjective du stress explique que les mêmes sources de stress provoquent
des
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réactions différentes selon les personnes : ce
qui est stressant pour l'un peut être totalement anodin pour l'autre. Le
stress subjectif implique également que les niveaux de stress varient
pour une même personne selon les circonstances. Par conséquent,
certaines personnes sont mieux armées que d'autres face au stress et
l'efficacité des stratégies de coping varient selon l'individu et
les circonstances auxquelles il est confronté.
Les deux modèles théoriques
présentés mettent en évidence la relation qui existe entre
les styles de coping chez les adolescents et le stress. Cette relation
d'influence réciproque est conceptualisée comme un processus
psychologique élaboré par le sujet pour s'adapter et
résoudre ses difficultés à partir de certaines habitudes
cognitives et comportementales. Les différentes interprétations
positives ou négatives de l'évènement,
élaborées par l'individu pour appréhender la situation
stressante, peuvent accroitre ou réduire l'intensité du stress
perçu et influencer ses comportements d'ajustements. Ajustements qui
à leur tour, serviront à réguler le stress en vue de le
rendre plus tolérable ou faire disparaitre ses manifestations. Le style
productif et le style référence aux autres apparaissent comme les
styles de coping les plus à même de modifier la situation
stressante et de réduire les tensions, contrairement au style non
productif qui parait inadapté pour surmonter des épreuves ou des
obstacles.
En ce qui concerne notre étude du stress en contexte
scolaire, on peut s'attendre à ce qu'à chaque étape de son
« métier » d'élève, l'apprenant obligé de
fournir un travail intellectuel, de produire certaines performances pour
atteindre la réussite, soit exposé au stress scolaire. Ce stress
devrait être encore plus notoire dans les classes d'examen, où le
risque de se voir éjecté du système scolaire en cas
d'échec est plus prégnant. D'après les modèles
théoriques présentés, le niveau de stress scolaire
perçu devrait être fort si l'élève présente
une tendance favorable à
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des stratégies de coping non fonctionnelles. À
l'inverse, le niveau de stress scolaire a plus de chance d'être faible ou
tolérable, en cas d'investissement de l'élève dans des
stratégies productives de résolution des problèmes, et des
styles de coping se référant à l'aide de l'entourage.
La nécessité d'examiner les travaux
antérieurs menés sur nos variables à l'étude pour
affiner nos prédictions, s'impose. C'est l'objet du chapitre suivant.
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