Le législateur OHADA dans l'harmonisation du droit bancaire.par Maxime TAKPONON Université de Parakou - Master en Stratégie et Ingénierie Juridique des Entreprises 2018 |
CHAPITRE II: L'absence d'un droit bancaire OHADALe législateur OHADA ne s'est pas prononcé sur la question de l'édiction de normes dans l'environnement bancaire, et cela au vu de plusieurs facteurs. En effet, deux blocs sont apparus dans l'environnement juridique OHADA. Sont apparus d'une part les matières ayant fait l'objet d'une uniformisation à l'origine, c'est-à-dire celles énumérées par le traité fondateur, et d'autre part celles dont l'uniformisation fait seulement suite à l'extension dédiée ultérieurement par le conseil des ministres. Le droit bancaire fait partie des matières de ce deuxième bloc. Elle est qualifiée par le législateur OHADA de matière de la deuxième génération d'actes uniformes. Le deuxième facteur d'absence du législateur OHADA est que le droit bancaire a déjà fait l'objet d'une réglementation communautaire, ce qui pourrait accroitre les risques de conflits avec les organisations sous régionales. Dans la pratique, l'absence d'un droit bancaire OHADA se caractérise déjà par la différence des outils de gestion UEMOA et OHADA (Section 1). Aussi, le législateur OHADA, dans sa volonté affichée d'unifier le droit du monde des affaires se fait remarquer ici par son manque de leadership (Section 2). Section 1: La différence des outils de gestion UEMOA et OHADAL'UEMOA s'affirme clairement dans le monde de la banque grâce à certains outils de gestion, propre au domaine. Ainsi, l'entreprise bancaire, société commerciale, dispose, contrairement à toutes les sociétés commerciales classiques, d'un système comptable qui lui est propre. Cette différence avec le système comptable OHADA est clairement constatée (Paragraphe 1). Le développement et la complexité croissante des opérations bancaires et financières, la réglementation et le système de surveillance des établissements de crédit ont nécessité la création et l'utilisation d'un outil comptable propre à l'activité bancaire. C'est à ce titre que le PCB affiche une grande divergence avec le Plan Comptable classique (Paragraphe 2). Paragraphe 1 Une différence constatée dans le droit comptableL'OHADA et l'UEMOA ont conçu leurs propres plans comptables chacun. Ceci a pour conséquence la naissance d'une certaine hétérogénéité des référentiels comptables en vigueur(A), qui affectent la fiabilité des informations comptables émanant des entreprises. Ainsi, la spécificité de la société commerciale bancaire vient avec l'utilisation d'un outil comptable différent, le Plan Comptable bancaire (B). A- L'hétérogénéité des référentiels comptables en vigueurLa présence de plusieurs référentiels comptables dans l'OHADA ne date pas d'aujourd'hui. En effet, dans la zone, s'appliquaient au moins cinq référentiels comptables91(*). Cette hétérogénéité ne permettait pas les comparaisons entre entreprises d'un même secteur, a fortiori de secteurs différents. Elle a compromis l'agrégation des données issues des entreprises et la prise de décision stratégique aux plans national et communautaire.92(*)Ce mélange avait pour conséquences la naissance d'une pluralité des bilans et états financiers. Ce phénomène affectait la fiabilité des informations comptables émanant des entreprises dans la mesure où les états produits ne donnaient pas une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat des entreprises de la zone. A tout ceci ce sont ajoutés l'obsolescence des normes comptables. Ces normes ont été longtemps désuètes au regard des normes comptables internationalement admises et auxquelles les investisseurs et les partenaires au développement sont devenus particulièrement sensibles93(*). Même si d'un point de vue pratique, le maintien du Plan Comptable adoptée par l'UEMOA est méritoire94(*), d'un point de vue juridique, il eut été indiqué de faire prévaloir directement le texte de l'OHADA pour plusieurs raisons. La spécificité de cette organisation est qu'elle a pour objectif d'harmoniser ou d'unifier le droit des affaires, dont le droit comptable est l'une des branches. La seconde raison est que le nombre des Etats parties à l'OHADA est plus important que celui de l'UEMOA95(*), et donc que le SYSCOHADA répondrait significativement à la volonté d'unifier du législateur OHADA. Ce dualisme normatif est source d'insécurité juridique et judiciaire, et commande instamment le dépassement des clivages existant entre l'OHADA et l'UEMOA pour tendre résolument vers un seul référentiel comptable applicable dans l'espace OHADA. En effet, la Conférence des Chefs d'Etat et de Gouvernement de l'OHADA tenue le 17 octobre 2013, constatant la coexistence de deux référentiels comptables dans l'espace géographique OHADA à enjoint le conseil des ministres de poursuivre la révision de l'Acte Uniforme portant Organisation et Harmonisation des Comptabilités des Entreprises pour en faire « l'unique référentiel en vigueur dans les Etats parties ». Ce dualisme juridique est manifesté par l'exclusion du champ d'application de l'AUOHC. Les assurances, les établissements financiers et notamment les banques, qui sont assujettis à des plans comptables spécifiques. * 91 Les deux référentiels comptables français de 1957 et de 1982, et trois adaptations au plan OCAM. * 92 AUHDC, introduction * 93 AUHDC, introduction * 94 Elle consiste à apporter au SYSCOA les modifications qu'implique l'Acte Uniforme de l'OHADA relatif au Droit Comptable * 95 Dix Sept pays pour l'OHADA contre huit pour l'UEMOA |
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