2. Mesures de Représailles
Les représailles est un terme qui, à ce jour, a
quelque peu perdu la faveur de la doctrine, sans doute, parce qu'il
évoque l'idée de vengeance et du recours à la force
armée.
Les représailles sont des actes qui, par leur nature
même, sont illicites mais exceptionnellement justifiés à la
lumière d'un acte illicite antérieur commis par l'Etat contre
lequel elles sont dirigées44. La Commission du droit
international, qui emploie le terme «contre-mesures» pour
désigner de tels actes, considère que l'illégalité
initiale constitue une circonstance qui exclut d'avance
l'illégalité de la réponse.
44 Dans la décision de la CIJ intervenue en
1986 entre les Etats-Unis et le Nicaragua, le juge international a
qualifié de représailles l'appui des Etats-Unis aux
activités militaires et paramilitaires des contrats au
Nicaragua (soutien financier, entraînement, fourniture d'armes, de
renseignements et de soutien logistique) parce que cet appui constituait une
violation du principe de non-intervention, alors qu'il a
considéré que l'interruption de l'aide économique à
ce même Etat ou la réduction du quota d'importation du sucre
étaient des mesures de rétorsion.
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Définies par l'Institut du Droit International comme
des « mesures de contrainte dérogatoires aux règles
ordinaires du droit des gens prises par un Etat à la suite d'actes
illicites commis à son préjudice par un autre Etat et ayant pour
but d'imposer à celui-ci, au moyen d'un dommage, le respect du droit
»45 les représailles se différencieraient ainsi
des rétorsions sur deux points: D'abord, elles sont des réactions
à un acte illicite, puis elles s'exercent par des moyens qui auraient
été illicites si le comportement initial qui les explique n'avait
pas été lui-même illicite. Ce sont donc des mesures
illicites par nature mais dont la licéité découle du fait
qu'elles sont destinées à combattre un acte illicite
antérieur. Par contre, sont exclues des contre-mesures, les
représailles armées qui sont à priori interdites par le
droit international46.
Au nombre de ces mesures figurent notamment les pressions
économiques. Leur but est d'entraver les relations économiques et
financières normales, soit en ne respectant pas les accords en vigueur,
soit en prenant des décisions qui vont à l'encontre des
règles régissant ces relations.
Ø Restrictions et/ou embargo commercial sur la
vente des armes, la technologie militaire et la coopération
scientifique
Le 4 août 1990, les Communautés
européennes ont pris une série de décisions à
l'égard de l'Irak qui comprenaient notamment un embargo sur la vente
d'armes et d'autres équipements militaires, et la suspension de toute la
coopération technique et scientifique.
Ces mesures ne peuvent constituer des contre-mesures que si
à la base, comme cela était le cas dans chaque cas
d'espèce, il existait des accords de coopération.
45Annuaire I.D.I, 1934, p.708.
46 L'usage des représailles armées
est strictement interdit par le droit international. Elles ne peuvent
découler que d'un cas de légitime défense ou être
décidées que par le Conseil de Sécurité de l'ONU en
application du chapitre VII de la Charte (art. 42). Par ailleurs, la CDI a
exclu la légitimité des représailles armées dans sa
définition des contre-mesures. Toutefois, dans un aspect terminologique,
le terme "représailles" tend aujourd'hui à n'être
utilisé que pour désigner, en général, les
politiques de contrainte comportant un recours à la force (rapport
2001 de la CDI, p. 181).
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Ø Restrictions aux exportations et/ou importations
à destination et en provenance de l'Etat qui commet des violations :
interdiction totale de relations commerciales
A la suite de l'invasion de l'Afghanistan en 1979, les
Etats-Unis ont décrété un embargo céréalier
à l'encontre de l'URSS; les Communautés européennes ont
imposé une interdiction totale sur les importations en provenance de
l'Argentine pendant le conflit des Falkland-Malvinas en 1982; les Etats-Unis
ont suspendu leurs relations commerciales avec l'Ouganda en 1978, en
réaction contre les violations des droits de l'homme.
Toutes ces mesures avaient été prises en
violation des accords commerciaux existants entre différents Etats.
Ø Interdiction des investissements
En 1985, la France a interdit tous les nouveaux
investissements en Afrique du Sud, suite à un durcissement de la
répression liée à l'apartheid. Cette mesure avait
été prise alors même qu'il existait un engagement entre les
deux Etats dans le domaine des investissements.
Ø Gel des capitaux
Le 4 août 1990 les Communautés européennes
ont décidé de geler les avoirs irakiens sur le territoire des
Etats membres.
Ø Suspension des accords relatifs au transport
aérien (ou autres accords)
Le 26 décembre 1981, les Etats-Unis ont suspendu
l'US-Polish Air Transport Agreement (accord sur le transport aérien
entre les Etats-Unis et la Pologne) de 1972 à la suite de la
répression du mouvement Solidarité par le gouvernement
polonais.
Il parait jusqu'ici judicieux de noter la différence
entre ces deux notions qui réside dans le caractère licite ou
illicite des moyens mis en oeuvre pour faire cesser l'illicéité.
En ce qu'en cas de représailles, les mesures sont illicites et, en cas
de mesures de rétorsion, les moyens mis en oeuvre sont licites.
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