2. Catégories de contre-mesures:
La pratique démontre que ces mesures se
répartissent en deux grandes catégories à savoir, les
mesures de rétorsion et les représailles non armées.
a. Les mesures de rétorsion
Il convient d'entendre par mesures de rétorsion des
actes inamicaux, voire préjudiciables, mais intrinsèquement
licites, qui répondent à un acte antérieur qui pourrait
lui aussi avoir été inamical mais licite, ou illicite au plan
international.
La notion de rétorsion s'applique, en droit
international, à une conduite « inamicale» de la part d'un
État à l'encontre d'un autre, mais une conduite, s'il faudrait
que l'on reprenne la définition avancée par la Commission du
droit international, qui ne doit pas être incompatible avec une
obligation internationale de l'État recourant à la mesure de
rétorsion, alors même qu'elle peut être une réponse
à un acte internationalement illicite posé par l'État
cible de la mesure de rétorsion43. En d'autres termes, la
mesure de rétorsion ne doit pas comporter une
42 BULA BULA (S.), Droit international public,
Notes de cours à l'usage des étudiants de G3, UNIKIN, 2015,
p. 261. 43Sur la notion de rétorsion, voir notamment DAILLIER
(P.) et FORTEAU (M.) et PELLET(A.), Droit International Public, Paris,
LGDJ, 2009, p. 1055.
En 1979, suite à l'invasion de l'Afghanistan, le
Sénat américain a refusé d'examiner les accords SALT II,
déjà signés par l'URSS et les Etats-Unis.
25
violation d'une obligation internationale de l'État qui
y recourt vis-à-vis de l'État contre qui elle est prise.
Nous pouvons soutenir que les actes de rétorsion sont
des mesures contraignantes prises par un Etat qui use rigoureusement de son
droit afin de répondre à des actes eux-mêmes licites mais
inamicaux commis à son égard par un autre Etat. Au regard du
droit international, ce sont des mesures licites et légales. Car,
même si elles sont contraignantes et dolosives, elles n'appellent
cependant aucun usage de la force. L'Etat auteur des rétorsions use de
son droit d'autoprotection que lui reconnait la société
internationale mais d'une manière forte, ou plutôt draconienne. On
dit qu'« un Etat à l'égard duquel un autre Etat a pris
une mesure qui, tout en étant légale et licite, est discourtoise,
rigoureuse, dommageable, peut prendre à son tour, à
l'égard de celui-ci, des mesures ayant le même caractère
afin de l'amener à revenir sur le droit chemin. »
La mesure de rétorsion peut prendre des formes très
variées. Notamment:
Ø Expulsion de diplomates
Le renvoi du personnel diplomatique de l'Etat
accréditaire par l'Etat accréditant, tel que cela a
été le cas, par exemple, de l'expulsion d'étudiants
iraniens et de certains membres du personnel diplomatique iranien en poste
à Washington lors du conflit entre les Etats-Unis et l'Iran lors de
l'affaire de prise d'otages américains à Téhéran en
1980.
Ø Rupture des relations diplomatiques
Dans le cadre de l'affaire du personnel diplomatique à
Téhéran ci-haut mentionnée, on a abouti à une
rupture complète des relations diplomatiques entre les deux Etats, suite
à la décision des Etats-Unis.
Ø Interruption des négociations
diplomatiques en cours ou refus de ratifier des accords déjà
signés
26
Ø Non-renouvellement des privilèges ou
accords commerciaux
A la suite de la répression en Pologne, les Etats-Unis
ont décidé en 1981 de ne pas renouveler leur accord maritime
bilatéral avec l'URSS et de soumettre à des restrictions
l'admission des navires soviétiques dans les ports américains
à partir de janvier 1982.
Ø Réduction ou suspension de l'aide
publique à l'Etat en question
En décembre 1982, en réaction contre les tueries
commises par la milice et autres violations des droits de l'homme au Suriname,
les Pays-Bas ont suspendu la mise en oeuvre d'un programme d'aide à ce
pays. Récemment aussi la Belgique a suspendu son aide humanitaire en
faveur de la République Démocratique du Congo.
Le principe en cette matière reste le non usage de la
force mais il faut noter que peu importe qu'elle réponde à un
acte licite ou illicite, la mesure de rétorsion est par nature licite et
légale au regard du droit international tel que déjà
relevé précédemment. C'est, d'ailleurs, cette
licéité par nature qui fait la différence d'avec des
mesures de représailles, qui ne sont licites que par
définition.
|