Section 2. L'exemple du droit commun du gage et les
attraits de la seconde approche.
On ne peut qu'être chagriné par les
difficultés posées par le peu de soin que le législateur a
accordé à la question de l'opposabilité des fiducies
sûreté quand on constate que le droit français a
très bien su établir une distinction entre constitutions et
opposabilité pour ce qui est du gage de droit commun.
Ainsi, l'article 2336 du Code civil dispose que «
Le gage est parfait par l'établissement d'un écrit contenant
la désignation de la dette garantie, la quantité des biens
donnés en gage ainsi que leur espèce ou leur nature ».
Par cette lecture, il nous faut conclure qu'un gage qui ne ferait l'objet
d'aucune mesure de publicité serait tout de même contraignant pour
les parties en vertu du simple principe de la force obligatoire des conventions
légalement formé. Toutefois, le premier alinéa de
l'article 2337 du même code dispose que « Le gage est opposable
aux tiers par la publicité qui en est faite », il faut donc
admettre à contrario que le gage qui ne fait l'objet d'aucune
formalité de publicité est inopposable aux tiers.
69« l'opposabilité de la
fiducie-sûreté aux ayants cause du constituant est seulement
régie par le droit commun applicable aux mutations de biens meubles
corporels ou incorporels, ce qui a pour conséquence que la
fiducie-sûreté mobilière sera nécessairement, en
pratique, une fiducie-sûreté avec dépossession (ou
signification dans le cas d'une créance), cette dépossession
étant seule à même, en l'absence d'un système de
publicité, de protéger efficacement le créancier à
l'encontre des ayants cause de son débiteur ». Pierre CROCQ, «
Lacunes et limites de la loi au regard du droit des sûretés
», Recueil Dalloz, 2007, p. 1354.
70Dominique LEGEAIS, «
Fiducie-sûreté », J.-Cl., fasc. 10, 1er avr. 2011
(màj 12 juin 2017).
71« Guide législatif de la CNUDCI sur
les opérations garanties », p. 70, paragr. 6.
La CNUDCI recommande72 ce type d'approche,
car elle permet d'une part à « faciliter la constitution d'une
sûreté sur un bien73 » tout en incitant
fortement le créancier garanti à protéger les tiers de sa
propre initiative en leur fournissant « un moyen peu coûteux et
fiable de déterminer si le constituant a grevé ce
bien74 ».
Ces arguments ayant vocation à emporter notre
conviction, nous suggérons que la distinction entre constitution et
opposabilité qui existe au sein du régime du gage de droit commun
soit étendue à tout le droit des sûretés national.
L'exemple des insuffisances de la publicité des propriétés
sûretés n'étant en définitive qu'un symptôme
du défaut d'harmonisation et d'approche globale en droit des
sûretés français.
72« Le Guide recommande de faire une distinction
entre les conditions requises pour qu'une sûreté produise effet
entre les parties et les conditions supplémentaires exigées pour
qu'elle produise effet à l'égard de tous les tiers », «
Guide législatif de la CNUDCI sur les opérations garanties
», p. 70, paragr. 7.
73Ibid.
74Ibid.
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