Section 3 : faible onérosité, la question
du financement.
La CNUDCI traite la question du financement dans son
guide dédié au registre, elle commence en énonçant
un principe qui fera sans nul doute consensus : « Le Guide sur les
opérations garanties recommande que les frais d'inscription et de
recherche soient fixés non pas pour générer des revenus
pour l'État adoptant, mais seulement pour permettre le
253« Guide législatif de la CNUDCI sur
les opérations garanties », op. cit., p. 10.
254Ibid.
255Jean-François RIFFARD, «
L'harmonisation internationale des droits des sûretés
mobilières : ne ratons pas le train ! », préc., paragr.
15.
256Jean-François RIFFARD, «
L'harmonisation internationale des droits des sûretés
mobilières : ne ratons pas le train ! », préc., paragr.
16.
257À ce propos, Jean-François RIFFARD
écrit : « On peut regretter cette dernière précision.
À notre sens, il aurait été plus judicieux de
prévoir qu'un tel acheteur prend toujours les biens libres de toutes
sûretés », Jean-François RIFFARD, «
L'harmonisation internationale des droits des sûretés
mobilières : ne ratons pas le train ! », préc., paragr.
16.
recouvrement des coûts258
». Nous nous accordons à l'avis de la CNUDCI sur ce premier point.
La vocation du guide n'est absolument pas lucrative. Du moins, pas directement.
Car nous sommes convaincus qu'en participant à générer de
la confiance le registre efficace des sûretés réelles
mobilières ne pourra qu'aider au développement de
l'économie. Ce qui ne manquera pas de générer des revenus
fiscaux en dernier ressort. Or comme « des frais et taxes excessifs
décourageront dans une large mesure l'utilisation du
registre259 », nous devons viser la gratuité de ses
services ou à minima en réduire le coût autant que faire se
peut. Afin d'atteindre cet objectif très ambitieux, nous accuseront nos
recommandations sur deux points : la rationalisation et la minimisation des
dépenses, et les opportunités de financement autonome accessible
au registre.
1. La rationalisation et la minimisation des
dépenses. Le registre entièrement informatisé que nous
avions plébiscité n'est pas uniquement avantageux en termes de
fiabilité ou d'accessibilité, il trouve également sa
raison d'être du point de vue du financement du registre. En effet, la
CNUDCI admet que « Les progrès de l'informatique ont
réduit l'écart entre le coût de la mise en place d'un
registre électronique et d'un registre papier ». Elle poursuit
en affirmant que « les coûts de fonctionnement d'un fichier
électronique sont inférieurs, en particulier si le système
de registre permet aux créanciers garantis et aux personnes effectuant
des recherches de soumettre directement des avis et des demandes de recherche
par voie électronique, sans passer par le personnel du
registre260 ». Nous nous rangeons à l'avis de la
commission sur ce dernier point, a notre sens un registre informatisé
qui ne prévoirait pas une interface permettant un accès direct
perdrait finalement l'essentiel de sa raison d'être.
Nous aurons l'occasion de développer plus en
avant ce deuxième point, mais notons pour l'heure qu'avec la technologie
blockchain nous renforcerons l'intérêt que la commission
prête au registre informatisé. En effet si le passage d'un
registre papier à un registre électronique est l'occasion d'une
économie de main d'oeuvre, le passage d'un registre informatisé
à un registre distribué via la blockchain représente une
nouvelle étape dans cette voie. Après avoir créé la
blockchain, dont les greffes des différents tribunaux de commerce
pourraient être autant de noeuds, il n'y aura quasiment plus besoin de
personnel à proprement parler pour faire vivre le registre.
Une fois les coûts réduits à leurs
stricts minimums il semble envisageable de les couvrir via la méthode
d'auto financement que nous avons à l'esprit.
2. Les opportunités d'auto financement du
registre. Nous ne devons pas perdre de vue que le registre global des
sûretés réelles mobilières que nous envisageons
disposera d'un monopole sur un double service essentiel. À la fois,
support de l'information offerte aux tiers et réceptacle des
inscriptions (Méthode majoritaire sinon unique d'opposabilité si
l'on s'en tient aux recommandations que nous avons pu formuler261),
le registre sera l'outil indispensable à un nombre croissant d'acteurs
économiques. Partant de cet état de fait et en considérant
la nature totalement électronique du registre que nous
proposons262, il semble pertinent d'interroger l'opportunité
d'un financement via un modèle de publicité
commercial
258« Guide de la CNUDCI sur la mise en place
d'un registre des sûretés réelles mobilières
», op. cit., p. 123,
paragr. 274.
259Ibid.
260« Guide de la CNUDCI sur la mise en place
d'un registre des sûretés réelles mobilières
», op. Cit., p. 123
paragr. 275.
261Voir supra., partie 1, titre 1, chapitre 4, section 1
: L'inscription plutôt que la dépossession.
262Voir supra., partie 2, titre 1, chapitre 1 : L'absolue
nécessité d'un registre informatisé.
identique à celui qui a pu faire la fortune du
géant Facebook. Le site internet servant d'interface au registre sera
une vitrine idéale pour tous les préteurs qui pourront y diffuser
leurs offres de financements avec la certitude qu'elles seront
visionnées quotidiennement par un public intéressé. Cet
exemple d'agent économique intéressé par une
publicité commerciale qui aurait le registre en support est des plus
simpliste, outre les prêteurs professionnels, la liste des agents
économiques qui pourront financer le registre en échange d'une
telle visibilité est sans fin.
Afin d'augmenter le rendement de ce modèle, il
est tout à fait possible d'opérer une personnalisation de la
publicité proposée à chaque utilisateur du registre. Si un
ancien constituant s'identifie pour effectuer une recherche relative aux
potentiels engagements consentis par un futur partenaire commercial, il sera
aisé de lui proposer des publicités lui proposant l'acquisition
de bien de la même nature que ceux qu'il avait grevés autrefois.
Dans le cadre d'une inscription d'avis comme dans le cadre d'une recherche, il
y aurait un ou plusieurs bandeaux publicitaires destinés au financement
du registre. Ce modèle à la base d'une majorité des
services disponibles sur internet a déjà fait la preuve de sa
rentabilité.
Dans le même ordre d'idée, si nous
préconisons que les services du registre soient accessibles à
tous, tant en inscription qu'en recherche, nous envisageons également la
création d'une version payante. Cette version du registre accessible via
la souscription d'un abonnement serait exempte de publicité et offrirait
d'autres avantages. Notamment l'accès à une application mobile
qui serait créé en même temps que le registre lui
même. Il y a certainement un intérêt à pouvoir
accéder au registre partout sans avoir besoin de s'encombrer d'un
ordinateur, ce qui peut être particulièrement pratique pour
s'informer en temps réel des droits grevant un meuble lors d'une
négociation sur le terrain.
|