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Pour une publicité efficace des sûretés réelles mobilières.


par Gaëtan Jouve
Université Clermont Auvergne - Master droit privé parcours droit civil 2019
  

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Section 2 : L'inscription par simple avis plutôt que l'inscription par enregistrement de document.

La CNUDCI évoque « Un certain nombre d'États » qui « ont instauré, pour les sûretés réelles mobilières, ce que l'on pourrait appeler un système d'enregistrement de documents qui, s'il ne permet pas d'inscrire la propriété des biens meubles, sert à prouver l'existence de certaines sûretés.114 »

En Droit français, c'est l'article 2 du décret n° 2006-1804 du 23 décembre 2006 qui est venu fixer le cadre de l'inscription du nouveau gage de droit commun. « Le créancier remet ou adresse au greffier du tribunal de commerce l'un des originaux de l'acte constitutif de la sûreté ou une expédition si l'acte est établi sous forme authentique ».

Force est de constater que le droit français a fait le choix du système de publicité que la CNUDCI évoque comme un système d'inscription par enregistrement de document. À notre sens, ce choix n'est pas anodin, il démontre la vocation que le législateur entend donner à la publicité, une vocation probatoire. Pourtant selon la CNUDCI dans un régime idéal de la publicité des sûretés mobilières la loi devrait faire en sorte que « L'inscription soit effectuée par enregistrement d'un avis contenant les informations spécifiées dans la recommandation 57, et non par la présentation de l'original ou d'une copie de la convention constitutive de sûreté ou d'un autre document115 ». La recommandation 57 sus-citée limitant quant à elle les informations nécessairement contenues dans l'avis à un strict minimum n'ayant pas à être vérifié par le conservateur du registre pas plus que l'identité de celui qui procède à l'inscription d'ailleurs. « Le conservateur du registre n'exige pas la vérification de l'identité de la personne procédant à l'inscription ni de l'existence d'une autorisation pour procéder à l'inscription de l'avis, et ne réalise aucun examen approfondi de la teneur de l'avis116 ».

À la lumière des exigences de notre droit positif, ces modalités d'inscription peuvent paraître bien légères, et sans conteste elles le sont ! C'est en somme exactement comme cela qu'elles ont été pensées, comme des modalités souples et simples de nature à faciliter constitution et opposabilité des sûretés. Dès lors, les précautions prises en droit français, via l'inscription par enregistrement de documents, font figure d'alourdissement superflu. Afin d'apporter un élément de réponse à ce problème, il faut s'interroger quant à la vocation qui doit être celle de la publicité efficace. Il faut soulever la discordance qui peut exister entre ce rôle et la raison d'être des vérifications et sécurité de l'enregistrement actuel. Autrement dit le rôle que l'on prête à l'inscription par enregistrement de document, à savoir apporter la preuve de la constitution d'une sûreté, est-il compatible avec la vocation d'une publicité efficace ?

1. La vocation probatoire de l'inscription par enregistrement de document. Il est très facile de discerner le lien de parenté entre l'inscription par enregistrement de document et la publicité foncière. En effet en matière d'immeuble la publicité a traditionnellement vocation à apporter une preuve objective de la propriété comme de l'existence de droits réels. Toutefois, même s'il existe des exemples de biens meubles immatriculés de grande valeur117

114« Guide législatif de la CNUDCI sur les opérations garanties », p. 157, paragr. 11. 115« Guide législatif de la CNUDCI sur les opérations garanties », p. 498. 116Ibid.

117On pensera aux registres spéciaux des navires et aéronefs par exemple.

pour lesquelles l'exemple de la publicité foncière peut être très pertinent, en règle général la publicité mobilière à tout à gagner à s'éloigner de ce schéma.

Finalement que gagne-t-on à exiger du conservateur d'un registre des sûretés mobilières qu'il vérifie l'écrit original de la constitution d'une sûreté réelle mobilière ? Une preuve de l'existence de cette convention entre les parties, et la preuve au bénéfice des tiers que toute sûreté mobilière renseignée dans le registre à une existence réelle, pourrait-on répondre.

Entre les parties. Comme nous l'avons vue plus haut, la distinction entre constitution et opposabilité est une pierre angulaire de l'efficacité en matière de publicité des sûretés réelles mobilière. En considérant cette distinction, il semble étrange de faire jouer à l'inscription, formalité obligatoire de publicité par excellence, un rôle probatoire vis-à-vis de la constitution d'une sûreté. En règle générale, le législateur exige un écrit à titre probatoire ou en tant que condition de validité quand il veut promouvoir la sécurité juridique entourant la constitution d'un acte. L'inscription apparaît comme un outil contre indiqué pour cette tâche, d'autant que l'exigence d'un écrit devrait suffire à prouver l'existence d'une sûreté en cas de litige de nature contractuelle.

À l'égard des tiers. L'investissement en temps et en argent que suppose la vérification systématique des documents exigés par cette forme d'inscription semble totalement disproportionné vis-à-vis de l'avantage que pourraient en retirer les tiers. En effet, le risque de la prolifération de fausses sûretés est un risque auto généré par le mode de l'inscription par enregistrement de document. Autrement dit, si l'inscription sur le registre n'emporte pas présomption réfragable, et encore moins présomption irréfragable, de l'existence d'une sûreté, on peine à trouver quelle valeur pourrait avoir une inscription frauduleuse.

Il convient toutefois de nuancer l'approche préconisée par la CNUDCI, à notre sens l'inscription par simple avis ne devrait pas supposer qu'on ne vérifie pas l'identité de celui qui procède à cette formalité. D'autant que cette vérification sera grandement facilitée par l'utilisation de la technologie Blockchain que nous préconisons pour la conservation du registre. En vérifiant systématiquement l'identité de ceux qui procèdent aux inscriptions, nous pourrons définitivement écarter le risque d'inscription malveillante (pensée pour nuire à l'apparence de solvabilité d'un concurrent par exemple). Cette hypothèse, bien que probablement marginale doit faire l'objet de sanction exemplaire pour que l'accès au registre puisse sereinement être ouvert à tous, et que l'inscription par simple avis s'impose comme la norme.

2. La vocation de la publicité efficace. Afin de justifier sa démarche, la CNUDCI rappelle que « Les registres fondés sur le concept d'inscription d'avis existent dans un nombre croissant d'États et ont en outre recueilli un large soutien au niveau international118 ». Incontestablement, l'inscription par simple avis est un modèle qui tend à se développer au gré de l'harmonisation internationale du droit des sûretés mobilières. Dans ce contexte l'opposabilité reposant « sur l'inscription, dans un registre central organisé sur une base personnelle, d'un simple avis et non de la convention constitutive de sûreté119 » tant à s'imposer comme le modèle dominant. Et pour cause, ce système contrairement à

118La CNUDCI évoque ainsi « la Loi modèle sur les sûretés de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement, la Loi type interaméricaine relative aux sûretés mobilières de l'Organisation des États américains, le guide sur les registres de biens meubles intitulé « A Guide to Movables Registries » de la Banque asiatique de développement, la Convention relative aux garanties internationales portant sur des matériels d'équipement mobiles et les protocoles s'y rapportant et l'annexe de la Convention des Nations Unies sur la cession », « Guide législatif de la CNUDCI sur les opérations garanties », p. 158, paragr. 14.

119Jean-François RIFFARD, « L'harmonisation internationale des droits des sûretés mobilières : ne ratons pas le train ! »,préc., paragr. 14.

l'inscription par enregistrement de document « autorise les inscriptions en ligne et le cas échéant les inscriptions conservatoires anticipées120 ».

Quand on accepte que la publicité n'a pas à avoir de vocation probatoire, qu'elle existe pour assurer l'opposabilité des sûretés et la protection des tiers, on accepte sans peine qu'un registre basé sur l'inscription de simple avis ne s'embarrasse pas de vérifications coûteuses et chronophages. En effet, « Si l'inscription était soumise à approbation officielle, une telle condition irait à l'encontre du type d'inscription rapide et bon marché nécessaire pour promouvoir le crédit garanti ».

Pour ce qui est des deux avantages inhérents à l'inscription par simple avis soulignés par Jean-François RIFFARD : inscription en ligne et inscription conservatoire anticipées, on constate que ces deux caractéristiques de l'inscription par simple avis sont tout aussi nécessaires à une publicité efficace qu'elles sont incompatibles avec le système actuel.

L'inscription en ligne doit sans conteste s'imposer comme le mode d'inscription de droit commun. Pour s'en convaincre il suffit de relever toutes les complications inhérentes à la tenue d'un registre papier. Enfin le simple fait de ne pas avoir à se déplacer aux greffes du tribunal de commerce, pour y déposer l'original de la convention de sûreté et le fait de ne pas avoir à prendre le risque d'envoyer ce document par voie postale constituent un progrès dont la pratique saura se réjouir. C'est encore plus vrai pour ce qui est des opérations garanties internationales. Ainsi certains ont dénoncé un système d'opposabilité « trop octogonal121 ». D'aucuns ont en effet relevé que certaines dispositions « exigeant que des formalités de publicité soient faites sur un registre spécial tenu au greffe du tribunal « dans le ressort duquel le débiteur a son siège ou son domicile122 » ». Selon cet auteur cela rendrait « impossible ou inutilement coûteux l'accomplissement des formalités d'opposabilité à l'encontre d'un constituant ayant son siège social à l'étranger et n'étant pas immatriculé en France123 ». Nul doute que dans ce cas précis l'approche via l'inscription électronique par simple avis faciliterait grandement la vie des affaires.

Pour ce qui est du deuxième point, l'inscription conservatoire anticipée, il est aisé de la

résumer à une logique lapidaire : nul ne peut fournir l'original de la sûreté qui n'existe pas encore. Pourtant l'intérêt est conséquent et le législateur améliorerait grandement la situation des créanciers garantis s'il permettait ce type d'inscription anticipée. Ajoutons que cela constituerait aussi une amélioration de l'information des tiers. En effet, plus un avertissement survient en amont d'une situation délicate, plus il est utile.

Ainsi « Dans un système d'inscription d'avis, ainsi qu'il a été noté précédemment,

l'avis inscrit est indépendant de la convention constitutive et il n'est pas nécessaire pour procéder à l'inscription de soumettre les documents relatifs à la sûreté ni de prouver celle-ci d'une autre manière124 ». Entre autres bénéfices, l'autorisation de l'inscription anticipée permet « l'inscription d'un avis unique suffit pour assurer l'opposabilité des sûretés grevant les biens décrits dans l'avis, qu'elles aient été constituées en vertu d'une convention unique ou de plusieurs conventions séparées liant les mêmes parties, même si elles ont été conclues à des dates différentes125 ».

De manière générale, l'inscription par simple avis « réduit le coût de l'opération pour les personnes procédant à l'inscription (qui n'ont pas besoin de fournir la preuve de la convention constitutive de sûreté) et pour les tiers effectuant une recherche qui n'ont pas

120Ibid.

121Étienne GENTIL,« problématique des investisseurs finance et droit des sûretés », préc., p. 102.

122Ibid.

123Ibid.

124« Guide législatif de la CNUDCI sur les opérations garanties », P 181, paragr. 98.

125Ibid.

besoin d'éplucher une documentation pouvant être volumineuse126 ». En outre, cette méthode « réduit la charge administrative et le travail d'archivage du personnel chargé d'exploiter le système de registre127 ». Enfin, elle « réduit le risque d'erreur d'inscription moins il y a d'informations à communiquer, moins il y a de risque d'erreur128 ». Évidemment, tous ces avantages ne sont pas à négliger pour qui est en quête du registre efficace !

126« Guide de la CNUDCI sur la mise en place d'un registre des sûretés réelles mobilières », p. 24, paragr. 59. 127Ibid., p. 25, paragr. 59.

128Ibid.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius