B- La consécration des sanctions disciplinaires et
administratives par le dispositif
anti-blanchiment
Les manquements aux obligations de vigilance, de diligence et
de déclaration de soupçons sont réprimés par des
sanctions administratives ou disciplinaires. Il ressort de l'article 113 du
Règlement que des sanctions administratives ou disciplinaires peuvent
être prononcées par l'autorité de tutelles ayant pouvoir
disciplinaire aux agents qui méconnaissent les obligations
préventives. Cet article dispose : « lorsque, par suite, soit
d'un grave défaut de vigilance, soit d'une carence dans l'organisation
de ses procédures internes de contrôle, une personne visée
aux articles 6 et 7, a méconnu les obligations que lui imposent les
titres II et III du présent Règlement, l'autorité de
contrôle ayant pouvoir disciplinaire peut agir d'office dans les
conditions prévues par les textes législatifs et
réglementaires spécifiques vigueur ». Pour la mise en
oeuvre de ces sanctions, l'autorité de tutelle doit aviser l'ANIF et le
Procureur de la république.
Autrement dit, la sanction disciplinaire ou administrative est
infligée au professionnel par l'autorité de tutelle du secteur
d'activité. On se demande quel sera, dans le secteur immobilier
l'autorité qui détiendra ce pouvoir, puisqu'il n'existe pas une
autorité, à l'exemple de la COBAC dans le secteur bancaire. Si
l'on se réfère aux différents textes organisant la
profession d'agent immobilier, on peut déduire que l'autorité en
charge de sanctionner les manquements aux obligations professionnelles, sera de
même compétente pour prononcer et infliger des sanctions aux
agents en cas de manquement à leurs obligations découlant du
dispositif anti-blanchiment. Ainsi en fonction de l'État membre,
l'autorité de tutelle peut être
191 MATSOPOULOU (H.) et MASCALE (C.), (dir.), Lamy droit
pénal des affaires, 2014, N°1281 cité par NGAPA (T.),
op. cit., p. 274.
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le Ministère en charge de l'habitat192, ou
la commission de délivrance des autorisations
d'exercer193.
A côté de ces peines pouvant être
considérées comme dissuasives, le législateur
communautaire CEMAC, a prévu des hypothèses ou la
responsabilité de l'agent peut être écartée
même s'il a exécuté l'opération suspecte. Le
principe est celui de l'exonération des agents de bonne foi, qui
effectueront leurs obligations avec diligence. En effet, selon l'article 89 du
Règlement, sauf cas de collusion frauduleuse avec le ou les auteurs du
blanchiment de capitaux, lorsqu'une opération a déjà
été exécutée, la responsabilité de l'agent
immobilier tenu de la déclaration, peut être dégagée
et aucune poursuite pénale du chef de blanchiment ne peut être
engagée à son encontre, si la déclaration a
été faite conformément aux prescriptions du
règlement194. Une disposition analogue est prévue dans
le code monétaire financier Français195.
Par ailleurs, il existe des cas où, bien que
l'opération n'ait pas été exécutée, la
responsabilité de l'agent peut être dégagée. C'est
ainsi lorsque la déclaration a été faite de bonne foi.
Ceci rejoint les recommandations du GAFI qui prévoient que : «
les institutions financières, leurs dirigeants et leurs employés,
mais aussi tous les autres professionnels assujettis, devraient être
protégés par la loi contre toute responsabilité
pénale ou civile pour violation de tout règle encadrant la
divulgation des informations imposées par le contrat ou par toute autre
disposition législative, règlementaire ou administrative,
lorsqu'ils déclarent de bonne foi leurs soupçons à la CRF,
même s'ils ne savaient pas précisément quelle était
l'activité criminelle sous-jacente ou si l'activité
illégale ayant fait l'objet du soupçon s'est pas effectivement
produite.»196.
S'il existe des cas d'exonération de
responsabilité chez l'agent fautif, les peines sont aussi effectivement
prévues lorsqu'ils ne seront pas conformé aux dispositions
anti-blanchiment. De même, les criminels sont exposés à des
sanctions lorsqu'il est avéré que les transactions faites, l'ont
été dans le but de blanchir des sommes issues des
activités criminelles.
192 Art. 36 de la loi de 2001 organisant la profession au
Cameroun.
193 Art. 28 de la loi de 2017 organisant la profession d'agent
immobilier au Gabon.
194 Il s'agit de l'exemption de la responsabilité du fait
de l'exécution de certaines opérations.
195 Art. L.561-22, IV C.Mon.Fin.
196 Recommandation n° 21 (a) du GAFI.
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