6.1.6. UTILITÉ DES LANGUES LOCALES EN CONTEXTE DES
CONFLITS INTERETHNIQUES
Sur les cent-soixante-huit enquêtés ayant
avancé les raisons motivant la conservation des langues locales, 18,54%
ont signalé les raisons suivantes : « pour la défense en cas
d'arrestation », « pour s'identifier pendant la guerre », «
en cas d'une guerre mes enfants doivent se défendre », « parce
que c'est important pendant les moments difficiles, en prenant le cas de la
guerre ».
Pendant les guerres civiques (1993, 1997 et 1998) qui ont
marqué l'histoire du pays, on a assisté à de nombreux cas
d'arrestations d'individus par les combattants. Ces derniers leur posaient la
question de savoir de quelle ethnie êtes-vous ? Si vous
étiez de la même ethnie que les combattants et que vous parliez la
langue de ladite ethnie, ils vous laissaient la vie sauve. Dans le cas
contraire, ils vous abattaient quelques fois. Les enquêtés
étant conscients des conséquences de ces événements
passés ont jugé nécessaire la sauvegarde des langues
locales : parler la même langue que les combattants dans ces conditions
vous mettaient en situation de communion avec eux. Dans ces conditions, les
langues vernaculaires pourraient bien être un outil de
sécurité, de conservation de la vie. Dans ce même ordre,
Talani Nanitelamio écrit que « la langue peut être une
bouée de sauvetage en cas de conflits interethniques puisqu'elle
établit implicitement l'appartenance ethnique ou communautaire
du locuteur : tu parles la même langue que moi, donc
nous appartenons à la même communauté. Nous sommes de ce
fait « unis ».46 »
|