B - DÉFINITION DES CONCEPTS
Comme le recommande DURKHEIM Emile, le chercheur doit pour
toute étude, définir au préalable les termes afin que l'on
sache bien de quoi il est question14. Partant de cette exigence, il
s'avère judicieux de définir tour à tour la Constitution
(1), la consolidation (2) et l'État de droit (3).
1 - La Constitution
La Constitution, du latin constituo
qui est dérivé du verbe constituere,
qui veut dire « établir,... », est l'ensemble
des règles fondamentales qui régissent l'organisation et les
rapports des pouvoirs publics et fixent les grands principes du Droit Public
d'un État15. A côté de cette définition,
la Constitution peut être définie du point de vue matériel
et du point de vue formel.
Du point de vue matériel, la Constitution est
l'ensemble des règles qui déterminent les conditions
d'acquisition et d'exercice du pouvoir politique. Elle est définie
également en fonction de ses règles et de son contenu. C'est le
sens du contenu de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen de
1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des
droits n'est pas assurée ni la séparation des pouvoirs
déterminée, n'a point de constitution »16
Du point de vue formel, la Constitution est l'ensemble des
règles, qu'elles soient ou non contenues dans un document unique, qui
ont été adoptées selon une procédure
spécialement prévue à cet effet. La Constitution est un
acte juridique, le plus souvent concrétisé par un ou plusieurs
documents écrits nouveaux. Cet acte se situe au sommet de l'ordre
juridique et tout autre norme juridique de rang inférieur doit
être conforme à ses prescriptions. Ainsi, selon la théorie
de la hiérarchie des normes17, la Constitution se trouve
être la loi fondamentale qui légitime toutes les normes
inférieures. Cette théorie est complétée par le
principe de
14 DURKHEIM Emile, Les règles de la
méthode sociologique, Paris, PUF, 7ème
édition, 1993, p.31.
15 CAPITANT Henri, Vocabulaire juridique,
4ème édition, 1930, p.162.
16 Article 16 de la Déclaration des Droits de
l'Homme et du Citoyen de 1789.
17 Théorie développée
notamment par Hans KELSEN où chaque règle de droit est
légitimée par une règle de droit supérieure et
à laquelle elle doit être conforme. Par exemple, le
règlement est inférieur à la loi, elle-même
inférieure aux traités qui, sont inférieurs à la
constitution.
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constitutionnalité18, qui indique que la
Constitution est le principe suprême du droit d'un État et que son
respect obligatoire et nécessaire, est assuré par une Cour
Constitutionnelle, un Conseil Constitutionnel ou une Cour Suprême selon
l'organisation institutionnelle d'un État.
Dans la logique de la doctrine constitutionnaliste, la
fonction centrale de toute Constitution est la garantie des droits fondamentaux
de la personne humaine. En aménageant la garantie des droits, la
séparation des pouvoirs ainsi qu'une représentation politique des
citoyens, la Constitution établit un système de garanties de la
liberté19. D'après la définition
empruntée à PRELOT Marcel et BOULOUIS Jean, la Constitution fixe
les règles juridiques « suivant lesquelles s'établit,
s'exerce et se transmet le pouvoir politique »20. La
plupart des Constitutions des États démocratiques fondent leur
organisation institutionnelle et politique sur les principes de pluralisme
d'expression des opinions, de liberté de choix des gouvernants, et
d'effectivité de la séparation des pouvoirs, et garantissent,
tout en les mentionnant explicitement, les droits sociaux et culturels des
peuples qui vivent sous leur protection juridique21. En d'autre
terme, la Constitution est la norme fondamentale, le pilier dont l'organisation
politique et institutionnelle d'un État est assise.
La Constitution, selon JACQUE Pierre, est la loi que s'est
donné le peuple afin de régir tant les modalités de
dévolution et d'exercice du pouvoir que les rapports entre gouvernants
et gouvernés22. A l'analyse de cette définition, il
faut noter que la Constitution, selon JACQUE, est un instrument juridique qui
organise les modalités d'exercice du pouvoir ainsi que les rapports
entre les détenteurs du pouvoir politique et les citoyens.
La notion de la Constitution cohabite avec les notions
voisines comme la convention de Constitution et la loi constitutionnelle. La
convention de Constitution est une règle non écrite
précisant l'exercice de pouvoirs juridiques. En Grande Bretagne, le roi
ne refuse jamais, depuis le début du XVIIème siècle,
d'accorder sa sanction à tout bill (texte de loi) adopté
par le Parlement, bien qu'aucune règle juridique ne lui en
impose l'obligation23. La loi
18 Principe de constitutionnalité ou le
constitutionnalisme est le principe en vertu duquel la constitution d'un
État est la norme suprême au sein de son ordre juridique. Ce
principe a pour conséquence la constitutionnalisation progressive du
droit.
19 GERKRATH Jorg, « Signification et fonction
d'une constitution », Verfasungs révision, Paris, Mai
2009, p.23.
20 PRELOT Marcel et BOULOUIS Jean, Institutions
politiques et droit constitutionnel, Paris, Dalloz,
10ème édition Coll. « précis », 1987,
p.80.
21 ZOGO NKADA Simon-Pierre, « Le nouveau
constitutionnalisme africain et la garantie des droits socioculturels du
citoyen : cas du Cameroun et du Sénégal », op.
cit., p.1.
22 JACQUE Pierre, Droit constitutionnel et
institutions politiques, Memento, Dalloz, 4e édition,
2000, p. 58.
23 AVRIL Pierre et GICQUEL Jean, Lexique du droit
constitutionnel, PUF, 4ème édition, 2008, p.
37.
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constitutionnelle est une loi adoptée selon la
procédure spéciale prévue par la Constitution pour sa
révision au titre du pouvoir constituant
dérivé24.
In fine, la Constitution est la norme
fondamentale qui détermine les conditions d'acquisition d'un pouvoir
politique et celles de la gestion des institutions de
l'État.
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