Conclusion du chapitre 2
En dehors de l'indépendance discutable du juge qui
limite considérablement la protection des droits et libertés
fondamentaux au Tchad, il y a d'autres éléments qui viennent
encore s'ajouter.
Premièrement, la protection non juridictionnelle
à travers la CNDH se trouve limitée. Cela s'explique par
plusieurs raisons notamment l'indépendance incertaine du cadre
institutionnel, le caractère non obligatoire des décisions de
celle-ci. Il ressort des dispositions314 de l'ordonnance
n°024/PR/2018 portant attributions, organisation et fonctionnement de la
Commission Nationale des Droits de l'Homme que l'institution formule à
titre consultatif au Gouvernement des avis et recommandation concernant les
libertés fondamentales et droits de l'homme. Cet état de chose
n'augure pas une efficacité avérée de la Commission qui
devrait jouer un rôle important dans la garantie des droits
fondamentaux.
Deuxièmement, certains actes des autorités ainsi
que les autorités elles-mêmes sont immunisés. Ainsi,
l'administration se trouve immunisée dans la prise de certains de ses
actes. De plus, les autorités politiques telles que le Président
de la République et les parlementaires bénéficient des
immunités juridictionnelles permettant leur protection dans l'exercice
de leurs fonctions. Cette protection constitutionnelle des autorités est
aux antipodes du principe de l'égalité des citoyens devant la
loi.
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314 Article 7 de l'ordonnance n°024/PR/2018
précitée.
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CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE
En tout état de cause, la Constitution tchadienne du 04
mai 2018 présente des obstacles persistants à l'émergence
d'un véritable État de droit. Alors, quelques aspects importants
ont retenu notre attention. Il s'agit bien évidemment de
l'indépendance discutable du juge dans la garantie des droits
fondamentaux et d'autres limites de la protection de ces droits fondamentaux au
Tchad.
Le juge est un acteur incontournable dans la garantie des
droits fondamentaux et ipso facto, il devient indispensable dans un
État qui se réclame l'étiquette d'un État de droit.
Cependant, il se trouve confronté à certaines difficultés
qui ne favorisent pas la meilleure protection des droits des citoyens. Ces
difficultés ne sont rien d'autres que la question de
l'indépendance de celui-ci (le juge) dans l'exercice de sa mission. Le
statut du juge ne paraît pas assez confortable pour qu'on puisse parler
d'une indépendance certaine. Les juges constitutionnel, administratif et
judiciaire subissent des pressions venant soit du pouvoir exécutif soit
de la hiérarchie. Ces injonctions ne sont pas de manière à
mettre le juge dans une position d'indépendance totale lorsqu'il joue
son rôle de protecteur des libertés des citoyens.
Outre l'indépendance incertaine du juge, certains
obstacles persistants viennent limiter la protection des droits fondamentaux.
Si le pouvoir public a entendu constitutionnaliser la CNDH qui avait une
existence législative, c'est pour renforcer l'État de droit
à travers les missions assignées à cet organe. Mais force
est de constater que cet organe, constitutionnalisé, ne dispose pas
véritablement des moyens juridiques conséquents pour la mise en
oeuvre des missions à lui confiées. Ainsi, la protection de droit
de l'homme se trouve limitée. Elle est également limitée
par la protection des certaines autorités politiques qui
bénéficient des immunités dans l'exercice de leurs
fonctions.
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