La carrière du fonctionnaire au Tchad.par NDONAYE KOINGAR ALLANGOMBAYE Université de Dschang Cameroun - Master en droit public 2019 |
B. Les effets du détachementA bien percevoir la nature des liens que le fonctionnaire conserve avec son administration d'origine, les effets du détachement sont donc aisé à cerner. Au regard de ses droits statutaires, la carrière du fonctionnaire détaché se déroule normalement comme s'il n'avait pas quitté son administration d'origine. Et le temps passé en détachement est assimilé au service qu'il aurait fournit à ladite administration. En effet, il ressort des dispositions des articles 87 à 90 du Statut général de la Fonction Publique du Tchad, que le fonctionnaire détaché est soumis à l'ensemble des règles régissant la fonction qu'il exerce par l'effet du détachement. Il demeure en outre soumis aux dispositions statutaires de son corps d'appartenance pour ce qui concerne sa qualité de fonctionnaire et ses avancements, donc à l'évolution normale de sa situation. Le fonctionnaire détaché conserve également son droit à la formation et à l'accès aux concours professionnels. Les notes et appréciations du fonctionnaire détaché sont transmises à son administration d'origine en vue de son avancement. Le fonctionnaire détaché est pris en charge par la collectivité ou l'organisme auprès duquel le détachement a été opéré. Il reçoit pendant la durée de son détachement le traitement et les indemnités afférents au nouvel emploi qu'il exerce. Ainsi, le détaché qui continue à percevoir sa rémunération au titre de la Fonction Publique est immédiatement traduit devant le Conseil de discipline. Il encourt les poursuites pénales pour détournement de deniers publics247(*). Le fonctionnaire détaché supporte sur son traitement les retenues réglementaires pour la constitution de sa pension de retraite. L'organisme de détachement est chargé de reverser à la caisse de retraite à laquelle le fonctionnaire est affilié, les retenues précomptées en vertu des dispositions de l'alinéa précédent ainsi que de sa contribution complémentaire en qualité d'employeur. Le détachement assure, certes, le droit à l'avancement et à la pension dans le corps d'origine, mais il ne garantit pas le nouvel emploi. Le détachement est donc révocable, c'est-à-dire qu'il peut prendre fin avant l'échéance fixée dans l'arrêté de détachement pour nécessité de service. Abordant dans le même sens, la Chambre sociale de la cour suprême du Tchad, dans l'affaire Dame M.A.M contre l'Agence Tchadienne d'Exécution des Travaux d'Intérêt Public (ATETIP) du 09 octobre 2001 a dit «Attendu que l'autorité de nomination ou de tutelle notamment le Ministre de la Fonction Publique disposant du pouvoir discrétionnaire et de prérogatives qui lui sont conférées par les textes législatifs et réglementaires peut, à tout moment, mettre fin au détachement de son agent et le remettre à son corps d'origine, que l'acte réglementaire mettant fin au détachement rend caduc le contrat intervenu entre la dame M.A.M et l'ATETIP ; (...)»248(*). De part sa nature temporaire, le détachement ne peut pas conduire à l'intégration dans le nouveau service ou l'organisme d'accueil. Ce n'est pas le cas au Cameroun, puisque l'article 77 de son Statut général de la Fonction Publique dispose qu' « au terme de dix (10) années consécutives de détachement, le fonctionnaire qui remplit les conditions prévues par les dispositions statutaires régissant l'accès aux emplois ou postes de travail du service auprès duquel il est détaché peut, sur sa demande et après avis du Ministre intéressé, y être définitivement recruté ». Le détachement de courte durée rend l'emploi temporairement disponible alors que celui de longue durée entraine la vacance de l'emploi. C'est pourquoi, l'agent détaché est aussitôt remplacé dans son emploi249(*). Le fonctionnaire détaché sera, à l'issue du détachement, affecté à un poste correspondant à son corps d'origine. La fin du détachement ne donne pas droit au préavis. Ainsi, le Tribunal de travail de N'Djamena, dans le Répertoire n°103 du 12 mai 1993, déclare qu' « attendu que B.Y réclame le versement de 6 mois de préavis ; attendu que le préavis a pour but de permettre au travailleur de rechercher un emploi ; or l'emploi est assuré dès que le détachement prend fin ; que le préavis n'existe pas lorsque c'est l'autorité administrative qui prend l'initiative de la fin du détachement ; attendu qu'il ne s'agit pas en l'espèce d'un licenciement, B.Y ayant été remis à la disposition de son ministère d'origine ; qu'en ayant donc pas de ce fait subi de préjudice, il y'a lieu de rejeter la demande sur ce point ». La limité d'âge applicable au fonctionnaire détaché est celle de l'emploi qu'il occupe auprès de l'organisme de détachement ; toutefois, au cas où elle est plus basse que celle de l'administration, le fonctionnaire est réintégré dans son emploi d'origine lorsqu'il atteint la limite d'âge de l'emploi de détachement.
* 247 OWONA (J.), Droit de la Fonction Publique camerounaise, op.cit. , p. 133. * 248 Lire aussi l'arrêt du 22 mai 2002 de la Cour d'appel de N'Djamena, chambre sociale, affaire E.D contre Cotontchad. * 249 ABLAYE ROASNGAR (T.), Le droit de la Fonction Publique au Tchad, op.cit. , p. 71. |
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