Si vous posez une question sur l'existence des guerres ou des
conflits à un marchand d'armes, il vous répondra certainement que
c'est une bonne affaire pour son business. En effet, les conflits ne sont pas
toujours négatifs, du moins pour ceux qui en tirent à travers
leurs métiers. Tout conflit implique généralement un
nombre impressionnant d'acteurs qui interviennent de
66 Une recherche menée sur les titres des
articles sur le moteur de recherche Google. L'idée était de taper
des mots clés : tourisme, conflit et Casamance pour ensuite observer les
résultats en rapport avec le sous-chapitre traité.
67 Apparue en 1930, après la presse
écrite comme seul moyen de communication d'alors, elle définit
une diffusion de l'information à un large public par un masse
média, c'est-à-dire de nouveaux médias modernes comme la
radiodiffusion, la télévision, les affiches, la propagande
politique.
68 Activité économique, commerciale.
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près ou de loin pour la gestion ou la résolution
du conflit (ONG, Consultants69...). D'autres interviennent cependant
dans la commercialisation des marchandises quelle que soit leur nature
(marchands d'armes, mercenaires...). Il y a une autre catégorie qui peut
s'intéresser à la question tout en usant de la ruse pour gagner
une part de marché plus conséquente : le concurrent. Avant
l'avènement du conflit, selon Dr Meguelle70, la ville de
Saint-Louis par exemple n'avait pas connu une percée au plan
touristique. Mais c'est grâce au conflit qu'elle occupe maintenant une
bonne place dans ce secteur. Pourtant, la Casamance regorge de
potentialités nombreuses et diversifiées pour demeurer une grande
attraction touristique nationale (M. Sidibé, 2019).
Réputée pour sa diversité en faune, sa
richesse culturelle, ses potentialités économiques et ses
attraits touristiques, la destination vit une situation instable depuis un
certain temps, même si elle est considérée comme le grenier
et la magie du Sénégal. Cependant, à qui cela profite-t-il
? Pour en savoir un peu plus, nous avons posé cette question aux acteurs
du tourisme et aux différentes cibles. Auparavant, nous avons
tenté de répondre à cette question : mais alors, qu'est-ce
qu'une économie de guerre ? On appelle économie de guerre les
pratiques économiques mises en place pendant et en rapport avec une
situation historique et politique de forte agitation liée à un
conflit armé. Toutefois, il ne faut pas confondre ce concept avec le
concept de guerre économique ou guerre commerciale qui est une pratique
entre deux états par exemple ayant chacun des objectifs
économiques. Bien que ces deux concepts soient similaires, voire proche,
le concept de guerre économique est développé par Esambert
(1992) en 1971. Il signifie ainsi une option mercantile entre deux concurrents
internationaux (produits, marchandises), une optique impérialiste ou une
action militaire à des fins économiques, une concurrence
exacerbée entre entreprises par des pratiques agressives (espionnage
industriel, dumping), etc. C'est une pratique qui n'est pas totalement et
physiquement perçue et ne dépend pas d'un conflit armé.
C'est actuellement le cas entre les Etats-Unis et la Chine : une parfaite
illustration. En effet, le gouvernement Trump a lancé depuis 2018 une
guerre économique matérialisée par une augmentation des
taxes douanières sur les exportations de produits chinois (panneaux
solaires par exemple).
Une économie de guerre est donc un moyen pour une
concurrence directe. Elle permet de s'assurer une croissance tout en
développant ses activités. Selon les acteurs touristiques et
les
69 Groupe de réflexion pour la paix en
Casamance (GRPC) dirigé par M. Sagna, ancien maire de la commune de
Ziguinchor, La plateforme des femmes pour la paix en Casamance (PFPC), etc.
70 Enseignant-chercheur au département
d'histoire de l'UASZ, cours magistral en interculturalité, 2016.
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collectivités, en l'occurrence celle de
Djembéring, cette situation profiterait bien à certains. Bien que
le rôle régalien des journalistes c'est de diffuser l'information,
la communication à ce niveau peut être fatale, surtout quand c'est
une information non fondée. C'est cette hypocrisie et malveillance
à peine déguisées que M. Sambou (responsale de campement
au Cap-Skirring) condamne dans son argumentaire : « L'histoire des
touristes est une histoire montée de fil blanc. Un touriste espagnol ne
voyage jamais avec 1000 ou 2000 euros. C'est normal parce que c'est un coup
monté par les collègues hôteliers pour saboter la
destination. Il y a une concurrence, mais l'acte-là, elle est
déloyale ». Abondant dans le même sens, M. Mané
révèle « qu'il y a certains qui vivent d'une
économie de guerre. Ce conflit, je dirais que ça arrange certains
[...]Malheureusement, avec la prolifération des sites, les gens se sont
permis de relayer l'information sans pour autant la vérifier. Parfois,
vous entendez une information à la radio qui vous échappe
vous-même qui êtes ici » et dénonce un
système vicieux mis en place en vue d'anéantir l'activité
touristique dans ces zones.
Cette situation peut paraître improbable, voire
inexistante. Mais, les conflits renferment de multiples questions qui demeurent
parfois sans réponses claires, et même inaccessibles. Lorsqu'un
événement survient sur un champ ou une zone de conflit, on
cherche rarement à connaître l'origine de la crise. Par exemple,
lorsqu'un attentat à la bombe est perpétré dans un pays
instable à Pâques, automatiquement les accusations fusent de
partout. On accuse tantôt un groupe interne, tantôt un groupe
externe. Ainsi, la presse ne fait que mettre des titres à la une
très sensationnels pour relayer l'information. Elle est très vite
reprise par une panoplie de sites et on la retrouve sur les réseaux
sociaux, vice versa. Même si un organe de presse s'implante dans une zone
de conflit ou y a des correspondants, les informations qu'il diffuse ne sont
pas toujours fiables. Fréquemment, il est tenté par le profit
(vente de journaux, audiences...) si bien qu'il peut parfois véhiculer
des informations non fondées.