L' apport de l'arbitrage à la sécurisation des activités économiques dans l'espace OHADApar BIKOI Jacques delor Université de Yaoundé 2 - Master professionnel en Droit privé/option Droit, pratiques juridiques et judiciaires 2016 |
Paragraphe 1 : L'expression du consentement à l'arbitrageAvant de recourir à l'arbitrage, les parties doivent l'avoir préalablement voulu. Selon l'article 3 du nouvel AUA148, « l'arbitrage peut être fondé sur une convention d'arbitrage ou sur un instrument relatif aux investissements, notamment un code des investissements ou un traité bilatéral ou multilatéral relatif aux investissements ». Il ressort qu'en droit OHADA, le consentement à l'arbitrage s'exprime soit par une convention d'arbitrage (A), soit par référence à un instrument relatif aux investissements (B). 147 J. RUBELLIN-DEVICHI, « De l'effectivité de la clause compromissoire en cas de pluralité de défendeurs ou d'appel en garantie dans la jurisprudence récente », Rev. Arb., 1981, pp.29-30. A. MANIRABONA, « Extension de la convention d'arbitrage aux non-signataires en arbitrage impliquant les sociétés en groupement », R.D.U.S, no38, 2008, p.545. 148 Relativement au consentement à l'arbitrage, il s'agit d'une innovation, étant entendu que dans l'ancien AUA de 1999, l'art 3 se contentait uniquement de règlementer la forme de la convention d'arbitrage en les termes suivant : « la convention d'arbitrage doit être faite par écrit ou par tout autre moyen permettant d'en administrer la preuve, notamment par la référence faite à un document la stipulant ». Mémoire rédigé et soutenu par Jacques Delor Bikoi Page 38 L'apport de l'arbitrage à la sécurisation des activités économiques dans l'espace OHADA A. La convention d'arbitrage En matière arbitrale, le caractère conventionnel est si fondamental que l'arbitre tire toute sa légitimité dans la volonté des parties149. Ainsi, tandis que le règlement d'arbitrage de la CCJA150 se contente uniquement de faire référence à la convention d'arbitrage sans la définir, l'article 3-1 alinéa 1 NAUA stipule que « la convention d'arbitrage prend la forme d'une clause compromissoire ou d'un compromis ». Les alinéas 2 et 3 de la même disposition procèdent à la définition de la clause compromissoire et du compromis, aussi entendent-elles la première comme étant « la convention par laquelle les parties s'engagent à soumettre à l'arbitrage les différends pouvant naitre ou résulter d'un rapport d'ordre contractuel », et la seconde comme « une convention par laquelle les parties à un différend déjà né conviennent de le régler par la voie de l'arbitrage ». C'est dire que la convention d'arbitrage est un contrat par lequel les parties acceptent de soumettre leur litige à la compétence d'un tribunal arbitral et qu'en tout état de cause, cette convention se matérialise soit par une clause compromissoire, soit d'un compromis. L'une s'élaborant avant la survenance du litige au moment de la rédaction du contrat, l'autre après la survenance du litige151. Lorsqu'elle est contenue dans un contrat, la convention d'arbitrage jouit de l'autonomie. Elle est à ce titre indépendante dudit contrat. Sa validité ne saurait donc être affectée par la nullité de ce dernier et son appréciation se fait d'après la commune volonté des parties sans référence nécessaire à un droit étatique152. Le principe de l'autonomie a pour objet d'immuniser la convention d'arbitrage contre toutes causes d'invalidité susceptibles d'emporter l'annulation du contrat initial153. Entant que contrat, la convention d'arbitrage doit réunir toutes les conditions de fond et de forme pour sa validité. S'agissant de la forme, le législateur OHADA est libéral et n'impose aucun formalisme particulier. D'ailleurs, l'article 3-1 alinéa 4 se contente de dire que « la convention d'arbitrage doit être faite par écrit ou par tout autre moyen permettant d'en administrer la preuve, notamment par la référence faite à un document la stipulant ». Il apparait donc que l'écrit est la forme souhaitée mais pas imposée par le législateur, les parties pouvant opter pour tout autre moyen dont ils seront en mesure d'apporter la preuve. Ils 149 A. MANIRABONA, op.cit., pp. 544-545. 150 Voir L'art 2.1 du nouveau règlement d'arbitrage de la CCJA. 151 P. MEYER, op.cit., p.8. 152 V. Art 4 AUA. 153 P. MEYER, op.cit. Mémoire rédigé et soutenu par Jacques Delor Bikoi Page 39 L'apport de l'arbitrage à la sécurisation des activités économiques dans l'espace OHADA pourront donc faire référence à un document la stipulant à la condition que la partie à laquelle on l'oppose au moment du contentieux ait eu la possibilité de la connaitre et de l'accepter, fut-ce par son silence lors de la conclusion du contrat154. Dans l'affaire ATLANTIQUE TELECOM S.A/ PLANOR AFRIQUE S.A et TELECEL FASO S.A, La CCJA a eu l'occasion de se prononcer sur la validité de la clause compromissoire par référence en ces termes : « il est de principe qu'en matière d'arbitrage international, la clause compromissoire par référence écrite à un document qui la contient est valable, à défaut de mention dans la convention principale, lorsque la partie à laquelle la clause compromissoire est opposée a eu connaissance de la teneur de ce document au moment de la conclusion du contrat et quelle a accepté l'incorporation du document au contrat. En l'espèce, la Cour d'appel de Ouagadougou après avoir examiné les diverses transactions intervenues entre les parties, a, souverainement relevé, par décision motivée, que la clause d'arbitrage contenue dans le pacte d'actionnaire du 10 février 2004 n'est pas opposable à PLANOR AFRIQUE, parce qu'il ne ressort nulle part du dossier, qu'elle ait eu la connaissance de ladite clause et qu'elle ait manifesté la volonté d'être lié par la convention d'arbitrage. Il suit que, le moyen n'est pas fondé et doit être rejeté »155. Dans la pratique, la liberté octroyée aux parties relativement à la forme de la convention d'arbitrage est souvent source de difficulté quant à l'établissement de la preuve non écrite. Dans une affaire opposant le sieur NGANDO BEBEY à la société AXA Assurance SA156, un tribunal arbitral c'était déclaré incompétent, motif pris de ce qu'« En l'absence de l'acceptation par toutes les parties, l'aspect consensuel qui caractérise toute convention d'arbitrage fait défaut et elle est inexistante ; sans convention d'arbitrage de laquelle les arbitres tirent leurs pouvoirs juridictionnels, il y a lieu de se déclarer incompétent ». Il est donc recommandé de recourir, pour plus de sécurité, à la forme écrite. Lorsque toutes les conditions de validité sont remplies, la convention d'arbitrage a pour effet d'emporter la compétence du tribunal arbitral et à contrario l'incompétence des juridictions étatiques. En droit OHADA, deux situations sont susceptibles de se présenter, 154 P. MOUSSERON, E. GAILLARD, « La jurisprudence de la Cour de cassation en matière d'arbitrage international », Article publié sur www.courdecassation.fr, site consulté le 16 Août 2018 à 16H05, p.6. 155 CCJA, Arrêt no 041/2010 du 10 juin 2010, Affaire ATLANTIQUE TELECOM contre PLANOR AFRIQUE SA ET TELECEL FASO SA, recueil de jurisprudence no 15, Janvier-Juin 2010, p.99. Ohadata J-12-30 ; V. eg. J. ISSA-SAYEGH, Répertoire OHADA jurisprudence et bibliographie, 2012, Publié par l'UNIDA, p.9. 156 Sentence partielle du 20 octobre 2004, affaire NGANDO BEBEY c/SOCIETE AXA Assurances. Rev. Arb., no26-Juillet-AOUT-Septembre 2004, p.3, note R. SOCKENG Ohadata J-08-165. V. ég. J. ISSA-SAYEGH, Répertoire OHADA Jurisprudence et Bibliographie, 2006-2010, publié par l'UNIDA, p. 20. Mémoire rédigé et soutenu par Jacques Delor Bikoi Page 40 L'apport de l'arbitrage à la sécurisation des activités économiques dans l'espace OHADA notamment celle dans laquelle le tribunal arbitral a déjà été saisi en vertu d'une convention d'arbitrage et celle contraire c'est-à-dire lorsque le tribunal arbitral n'a pas encore été saisi. Pour la première hypothèse, l'article 13 alinéa 1 AUA dispose que « lorsqu'un différend faisant l'objet d'une procédure arbitrale en vertu d'une convention d'arbitrage est porté devant une juridiction étatique, celle-ci doit, si l'une des parties en fait la demande, se déclarer incompétente ». S'agissant de la seconde hypothèse, l'alinéa 2 du même article dispose que « si le tribunal arbitral n'est pas encore saisi ou si aucune demande d'arbitrage n'a été formulée, la juridiction étatique doit également se déclarer incompétente à moins que la convention d'arbitrage soit manifestement nulle ou manifestement inapplicable en l'espèce ».Toutefois, une telle déclaration d'incompétence ne saurait être relevée d'office, l'une des parties ayant l'obligation de décliner la compétence de la juridiction étatique157. Dans la pratique, il arrive des cas ou une partie désirant se dérober de la procédure arbitrale saisit le juge étatique arguant par exemple de l'incompétence de la juridiction arbitrale. C'est donc en vue de protéger le consentement à l'arbitrage que le législateur africain a consacré le principe compétence- compétence, dont l'effet est à la fois positif et négatif. Le premier permettant à l'arbitre de connaitre des litiges qui rentrent dans le champ d'application de la convention d'arbitrage. Le second interdit aux juridictions étatiques de se prononcer sur ces mêmes litiges158. En effet, d'après l'article 11 alinéa 1 AUA « le tribunal arbitral est seul compétent pour statuer sur sa propre compétence, y compris sur toute demande relative à l'existence ou à la validité de la convention d'arbitrage ». Le règlement d'arbitrage de la CCJA énonce également ce principe159 de telle sorte qu'il apparait qu'en droit OHADA de l'arbitrage toute demande qui tient à la compétence des arbitres ne peut être tranchée que par le tribunal arbitral. Toutefois, la juridiction étatique pourra se déclarer compétente en cas de nullité manifeste de la convention d'arbitrage et si la juridiction arbitrale n'a pas encore été saisie. Ainsi, dès que les parties ont clairement et régulièrement exprimée leur volonté de recourir à l'arbitrage en cas de survenance d'un litige relatif au contrat qui les lie, le juge étatique est tenu de se déclarer incompétent si une partie le lui 157 Voir article 13 al. 3 du nouvel AUA. 158 E. GAILLARD, « L'effet négatif du principe compétence- compétence », in Étude de procédure et d'arbitrage en l'honneur de Jean-François POUDRET, Lausanne, 1999, p. 387. 159 L'art 10.3 dispose que « Lorsqu'une partie soulève un ou plusieurs moyens relatifs à l'existence, à la validité ou à la portée de la convention d'arbitrage (...) il appartiendra au tribunal de prendre toutes décisions sur sa propre compétence ». Selon l'art 10.4 « le tribunal arbitral est seul compétent pour statuer sur sa propre compétence ainsi que sur la recevabilité de la demande d'arbitrage ». Mémoire rédigé et soutenu par Jacques Delor Bikoi Page 41 L'apport de l'arbitrage à la sécurisation des activités économiques dans l'espace OHADA demande. C'est dire que la convention d'arbitrage a une force qui s'impose non seulement aux juges étatiques, mais également aux parties160. Dans l'affaire Société CELTEL c/Société Générale d'électricité ferroviaire du Congo (SOGEFCO) SA161, la cour d'appel de Pointe-Noire a rappelé cette règle, aussi a-t-elle jugé que « le fait de rompre un contrat ne peut en soi, à défaut de manifestation de volonté non équivoque en ce sens, caractériser une renonciation tacite à une convention d'arbitrage (...) En l'espèce, les parties ont convenues dans leur contrat de prestation de services d'une clause compromissoire aux termes de laquelle toutes contestations nées de l'interprétation ou de l'exécution du contrat seront soumises à l'arbitrage institutionnel de la CCJA et conformément au règlement d'arbitrage de cette Cour. Or, il n'a pas été argué de la nullité manifeste de cette convention d'arbitrage. En retenant plutôt que les parties avaient de leur propre gré renoncé à la convention d'arbitrage et que le tribunal était compétent, les premiers juge ont mal interprétés la volonté clairement exprimée de la partie défenderesse qui avait, in limine litis, demandé au juge étatique de se déclarer incompétent en raison de l'existence de la convention d'arbitrage. Ils ont ainsi violé outre la convention des parties, les termes de l'article 1134 du code civil et 13 alinéa 2 AUA. Il y a lieu donc d'annuler en toutes ses dispositions le jugement attaqué, et de se déclarer incompétent en application de l'article 13, alinéa 2 AUA précité ». En tout état de cause, la convention d'arbitrage n'est rien d'autre que la matérialisation de l'expression du consentement à l'arbitrage, mieux encore de la volonté de recourir à une justice alternative plus sécurisante par les parties à un contrat d'affaire. 160 R. SOCKENG, « Les effets de la convention d'arbitrage en droit camerounais », Rev. Cam. Arb., no4, Janvier-Février-Mars, 1999, p.11. 161 Cour d'Appel de Pointe-Noire, Arrêt no046 du 07 Novembre 2008, Société CELTEL c/Société Générale d'électricité ferroviaire du Congo (SOGEFCO) SA., Ohadata J-13-76 ; V. J. ISSA-SAYEGH, Répertoire OHADA Jurisprudence et Bibliographie, 2013, publié par l'UNIDA, pp.13-14. Mémoire rédigé et soutenu par Jacques Delor Bikoi Page 42 L'apport de l'arbitrage à la sécurisation des activités économiques dans l'espace OHADA B. Le consentement à l'arbitrage par référence à un document relatif aux investissements Comme précédemment indiqué162, le consentement constitue la pierre angulaire de l'arbitrage. Selon le législateur africain, s'il n'est pas directement exprimé dans une convention d'arbitrage, il peut l'être à travers un instrument relatif aux investissements notamment un code d'investissement ou un traité bilatéral ou multilatéral163. À ce sujet, il faut dire qu'il s'agit d'une innovation, car même s'il reste vrai que plusieurs législations africaines prévoyaient déjà la possibilité de recourir à l'arbitrage via un code d'investissement ou un traité164, une telle possibilité n'était pas prévue par le législateur OHADA de 1999 en matière d'arbitrage. La consécration de la possibilité de recourir à l'arbitrage par le biais d'un instrument relatif aux investissements vient donc à point nommé pour renforcer l'objectif de l'OHADA qui est de stimuler l'activité économique et de faire de l'espace communautaire un pôle de développement par l'investissement. En effet, en vue de favoriser le développement des pays africains, il était nécessaire de créer des conditions favorables à l'attraction des capitaux étrangers. Il fallait promouvoir les investissements et, pour cela, donner confiance aux investisseurs en sécurisant leurs apports. C'est dire l'urgence qui était de mettre à la disposition des opérateurs économique, un mécanisme fiable de règlement des différends. Voilà pourquoi plusieurs pays de l'OHADA ont inséré dans leur code d'investissement des dispositions permettant aux investisseurs de recourir à l'arbitrage lorsque leurs intérêts seraient menacés. Au Cameroun par exemple, l'article 45 alinéa 1 du code des investissements prévoit que « les entreprises agréées ont le droit de demander à ce que leurs différends qui n'auraient pas pu être résolus à l'amiable avec l'État, relatif à la validation et à l'interprétation de l'acte d'agrément, au non- respect des garanties prévus par le Titre II ci-dessus et au non-respect des engagements implicites dans les objectifs du programme d'investissement qui ont été déterminé pour l'éligibilité à l'un des régimes du Titre III ci-dessus, soient définitivement réglés conformément aux procédures d'arbitrage et de conciliation découlant : - Soit d'une procédure de conciliation et d'arbitrage dont les parties sont expressément convenues, 162 V. supra, p.37. 163V. art.3 AUA. 164 V. à titre d'exemple le Code des investissements camerounais en son article 45 et celui de la Cote d'ivoire en son article 20. Mémoire rédigé et soutenu par Jacques Delor Bikoi Page 43 L'apport de l'arbitrage à la sécurisation des activités économiques dans l'espace OHADA - Soit des accords et traités relatifs à la protection des investissements conclus entre l'État du Cameroun et l'État de la personne physique ou morale concernée dans l'entreprise agréée en qualité d'investisseur est ressortissante (...) ». En côte d'ivoire, l'article 20 alinéa 2 de l'ordonnance No2012-487 du 07 juin 2012 portant code des investissements dispose que : « Tout différend ou litige entre les personnes physiques ou morales étrangères et la République de Côte d'ivoire relatif à l'application du présent Code, à défaut d'un règlement amiable, est réglé par les juridictions ivoiriennes ou par un tribunal arbitral (...) ». La consécration par le droit OHADA de la possibilité de fonder l'arbitrage sur un code d'investissement permet désormais que même en l'absence d'une convention d'arbitrage, l'investisseur puisse déclencher une procédure d'arbitrage contre une personne morale de droit public des lors que les droits violés sont protégés par un code d'investissement qui prévoit le recours à une telle procédure pour régler le différend. S'agissant du traité, l'arbitrage d'investissement connaît depuis plusieurs années une évolution remarquable due à la multiplication des traités bilatéraux ou multilatéraux qui garantissent l'investissement, interdisent l'expropriation sans indemnité, et prévoient la possibilité pour tout investisseur d'instaurer un arbitrage contre l'État hôte165. Ces traités d'investissement sont cruciaux, étant entendu qu'ils permettent de rétablir l'équilibre entre l'investisseur et l'État hôte166. En effet, comme l'a démontré Prosper WEIL167, l'investisseur étranger dans sa relation contractuelle avec l'État est soumis à deux formes « d'aléas de souveraineté » à savoir « l'aléa de puissance publique »et « l'aléa législatif ». « L'aléa de puissance publique » consiste à l'exercice par l'État de la faculté de modifier unilatéralement certaines dispositions du contrat voire, de le résilier168. S'agissant de « l'aléa législatif », il consiste dans le fait que l'État puisse modifier sa législation en cours d'exécution du contrat, ce qui causerait un grave préjudice à son cocontractant qui aura tout 165V. G. KAUFMANN-KOHLER, « L'arbitrage d'investissement : entre contrat et traité - entre intérêts privés et intérêt public », Texte d'une conférence prononcée le 24 juin 2004 au Centre libanais d'arbitrage à Beyrouth, www.lk-k.com, consulté le 10 Septembre 2018 à 20h15, p. 6. 166 V. compte rendu de la Journée d'études Conventions sur le thème « L'arbitrage relatif aux investissements : Nouvelles dynamiques internationales », 4 mars 2011, p. 3. 167 P. WEIL, « Les clauses de stabilisation ou d'intangibilités insérées dans les accords de développement économique », Mélanges offert à Ch. ROUSSEAU, Paris, A. Pedonne, 1974. V. ég. G. Van HECK, « Les enseignements du droit interne » in Les contrats entre Etats et personnes privées étrangères, par F. A. MANN, L. SEIDL-HOHENVELDERN, P. LALIVE, G. Van HECKE, RBDI, 1975, p.580. 168 G. Van HECK, Ibid. Mémoire rédigé et soutenu par Jacques Delor Bikoi Page 44 L'apport de l'arbitrage à la sécurisation des activités économiques dans l'espace OHADA intérêt à aller vers l'arbitrage plutôt que, d'avoir recours en la justice de l'État. Une justice vis-à-vis de laquelle il n'exprime aucune confiance. Ainsi, dès lors qu'un traité auquel ledit État est parti prévoit le recours à l'arbitrage, l'investisseur pourra mettre en oeuvre une procédure arbitrale contre l'État hôte bien que, le contrat de base ne comportant pas une clause compromissoire169 . Dans un tel contexte, la jurisprudence internationale considère que la disposition du traité prévoyant le recours à l'arbitrage constitue l'offre d'arbitrer exprimée par l'État170. Quant à l'investisseur, il exprime son consentement par le dépôt de la demande d'arbitrage. Ainsi, pour reprendre le Professeur Gabrielle KAUFMANN-KOHLER, « Si la construction contractuelle du consentement est sauvegardée, en tous cas en apparence, il est indéniable que nous nous éloignons ici considérablement du fondement consensuel classique de l'arbitrage commercial »171. En droit OHADA, depuis le nouvel Acte uniforme relatif à de 2017, le traité constitue désormais un fondement de l'arbitrage. Comme le prévoit l'article 3 NAUA, « l'arbitrage peut être fondé (...) sur un instrument relatif aux investissements, notamment (...) un traité bilatéral ou multilatéral relatif aux investissements ». Ainsi, lorsqu'un traité relatif aux investissements autorise de recourir à l'arbitrage en cas de survenance d'un litige entre un entrepreneur privé et l'État hôte, l'entrepreneur privé pourra s'en prévaloir pour mettre en oeuvre une procédure arbitrale CCJA ou régie par l'AUA172, dès lors que l'État hôte et le sien sont parties audit traité à défaut d'existence d'une clause compromissoire ou d'un compromis. De ce fait, comme en matière international le consentement de l'État hôte sera matérialisé par « l'offre d'arbitrer » découlant de la ratification du traité, tandis que celui de l'investisseur se traduira par la demande d'arbitrage adressée au secrétariat de la CCJA, à son cocontractant pour un arbitrage ad hoc ou au secrétariat de l'institution privée étatique d'arbitrage. En définitive, le consentement à l'arbitrage constitue le premier pan de l'autonomie de la volonté qui caractérise l'arbitrage en général et celui de l'OHADA en particulier. Représentant une source de sécurité judiciaire, il se traduit en droit OHADA par la convention 169 PSEG Global Inc., The North American Coal Corporation, and Konya Ilgin Elektrik Üretim ve Ticaret Limited Sirketi v. Republic of Turkey. La décision sur compétence a été rendue le 4 juin 2004 et est publiée in International Law in Brief, www.asil.org/ilib/psegdecision.pdf. 170 Not. Asian Agricultural Products Ltd v. Democratic Socialist Republic of Sri Lanka, ICSID reports, vol. 4, pp. 246ss, no. 2; American Manufacturing & Trading, Inc. v. Zaire, ICSID Reports, vol. 5, pp. 11 ss, nos. 5.19ss. Sur ce sujet, voir aussi Schreuer, op. cit. Note 1, pp. 210ss, nos. 285ss; G. KAUFMANN-KOHLER, op.cit., p. 9. 171 G. KAUFMANN-KOHLER, Ibid. 172 La partie désirant mettre en oeuvre une procédure d'arbitrage OHADA sur la base d'un traité devra le faire conformément à l'article 1er AUA ou à l'article 2.1 RA/ CCJA. Mémoire rédigé et soutenu par Jacques Delor Bikoi Page 45 L'apport de l'arbitrage à la sécurisation des activités économiques dans l'espace OHADA d'arbitrage ou par la référence à un code d'investissement, un traité bilatéral ou multilatéral relatif aux investissements. Il permet aux parties à un différend économique d'avoir recours à une justice plus sécurisante dans laquelle elles exercent un contrôle et disposent par ricochet de la faculté de contribuer activement à la fabrication de leur décision de justice, dès lors qu'elles ont en toute régularité173 opéré le choix de s'affranchir des juridictions étatiques. Ainsi, à travers la convention d'arbitrage, les parties disposent de la faculté d'aménager librement leur arbitrage et de se prémunir en conséquence des éventuelles péripéties susceptibles de nuirent à leurs activités. |
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