B/- La participation du ministère public
Les textes organisant la procédure
administrative contentieuse au Cameroun sont discrets et imprécis quant
au rôle du ministère public dans l'instance contentieuse.
Seulement, il convient de voir son intervention aussi bien en matière
d'instruction(1) qu'à l'audience(2).
1) Le ministère public dans
l'instruction
Les mesures d'instruction286 qui figurent
dans la procédure administrative contentieuse, permettent au juge de
solutionner le litige.
Les mesures d'instruction directes sont
matérialisées soit d'office, soit à la demande des parties
aux fins d'une enquête,287 afin de les entendre,288
et quand cela est nécessaire, les
289
descentes sur les lieux sont organisées à
cet effet. Ainsi, le ministère public joue un rôle
facultatif dans le cas précis de ces mesures
d'instruction.
Les mesures d'instruction indirectes se traduisent par
l'expertise290 et la vérification des
écritures291. Elles nécessitent le recours à un
technicien, un artiste ou un expert pour éclairer le juge dans sa
quête de vérité. En matière d'expertise, outre le
recours aux experts, le ministère public, malgré sa
présence facultative peut intervenir pour aider le juge à
trancher un point de droit obscur. A ce sujet, voir l'arrêt Avocat
général près la cour suprême contre arrêt de
la « court of appeal » de Buea du Cameroun Occidental, rendu
le 20 mars 1968.292
Etant donné que la vérification des
écritures est une mesure d'instruction rarement utilisée, il
apparait que le ministère public n'est pas présent, d'où
son caractère facultatif.
286Chapitre 4
titre 3 loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006
287 Ibid. article 65 et 71
288Ibid, article
77 à 82
289 Ibid. article 72 à 76
290Ibid, article
84 à 93
291Ibid.,
article 83
292Arrêt
n° 21/A/CFJ, 20 mars 1968, cité par NTAH A MATSAH (HMM)
« le ministère public dans le
contentieux administratif au Cameroun : contribution
à l'étude des organes de la juridiction
administrative
camerounaise » TH, PHD, université de
Yaoundé II-soa, 2010 p 305
Mémoire de DEA Présenté et soutenu par
M~ZAMA MAGA Athanase Roland 89
L'application du principe du contradictoire dans la
procédure administrative contentieuse au Cameroun
Toutefois, à la clôture de l'instruction,
une fois le rapport établit, le Greffier transmet, avec le dossier au
Procureur Général qui le rétablit dans les trente (30)
jours avec ses conclusions293.Aussi, le rapporteur transmet son
rapport sous pli confidentiel au Président du tribunal qui en communique
copie au Procureur Général, également sous pli
confidentiel294. Une fois ces manoeuvres effectuées, le
dossier rétablit au greffe est transmis sans délai au Procureur
Général, ce dernier propose une solution dans ses conclusions et
les communique sous pli confidentiel au Président du tribunal qui
rétablit le dossier au greffe295.Alors, il est soumis au
Président pour fixation de la date d'audience, date qui est
notifiée au Procureur Général et aux membres du tribunal
par le greffier en chef qui assure la confection et l'affichage du
rôle296.
2) Le ministère public dans l'audience
Le défenseur des intérêts de l'Etat
est le contradicteur naturel des intérêts de la partie
privée.
Il lui est tout de même reproché de
parler en dernier, sur le fondement d'une connaissance du dossier que ne
partagent pas les parties, qui pensent qu'il méconnait le
contradictoire. Il parle en dernier, sans que le contenu de ce qu'il va dire
soit préalablement communiqué aux parties, donc soumis à
leur discussion ; il dispose d'informations relatives au contenu du dossier,
que les parties ne peuvent connaitre à savoir les notes du rapporteur ;
et enfin, il assiste au délibéré.
Toutefois, « la cour européenne des
droits de l'homme voyait dans le ministère public près la cour de
cassation belge, l'allié ou l'adversaire objectif du justiciable, ce qui
devait le soumettre aux règles du contradictoire gouvernant le
procès équitable. Plus encore, elle soulignait que son
intervention portait atteinte au caractère contradictoire de la
procédure, notamment en ce que l'avocat général
participait au délibéré des juges, occasion pour lui
d'appuyer ses conclusions en chambre du conseil
»297.
Il en est également au Cameroun, ou le
Procureur Général participe au délibéré, de
même qu'il a accès au rapport du juge rapporteur et il parle en
dernier.
293 Article 44 loi 2006/022 et articles 86 et 103 loi
2006/016du 29 décembre 2006 294Ibid, article 45 loi
2006/022
295 Ibid. article 46(2)
296 Article 47 loi 2006/022
297 CHABANOL (D), « le contradictoire et le
commissaire du gouvernement », RFDA, 2001, p.327
Mémoire de DEA Présenté et soutenu par
M~ZAMA MAGA Athanase Roland 90
L'application du principe du contradictoire dans la
procédure administrative contentieuse au Cameroun
Le ministère public a pour mission d'exposer
les questions que présente à juger chaque recours contentieux, et
de faire connaitre, en formulant en toute indépendance ses conclusions,
son appréciation, qui doit être impartiale, sur les circonstances
de fait de l'espèce et les règles de droit applicable, ainsi que
son opinion sur les solutions qu'appelle, suivant sa conscience, le litige
soumis à la juridiction compétente.
Pour une prise en compte du caractère
contradictoire, il faut prévoir une communication des conclusions du
Procureur Général aux parties avant la séance de jugement,
voire d'autoriser les dites parties à prendre brièvement la
parole après lui.
Au regard de la rédaction de la
décision, il est important de noter qu'il est effectué un
contrôle du respect du caractère contradictoire. De même,
l'observation de la participation du ministère public est une garantie
du principe contradictoire, il importe dès lors, d'envisager la garantie
des parties après le jugement.
|