CHAPITRE II
LES MECANISMES
DU CARACTERE CONTRADICTOIRE
L'application du principe du contradictoire dans la
procédure administrative contentieuse au Cameroun
Mémoire de DEA Présenté et soutenu par
M~ZAMA MAGA Athanase Roland 36
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L'application du principe du contradictoire dans la
procédure administrative contentieuse au Cameroun
Le caractère contradictoire de la
procédure est un corolaire de l'égalité des parties au
procès. Il s'agit d'envisager les droits de la défense qui sont
un élément du contradictoire.Ce principe assure la protection des
personnes en cause, en cours d'instance, en imposant au juge et aux parties, en
dehors et au-delà de tout texte précis, le respect d'une
défense et d'une argumentation libre, contradictoire et complète.
De là, découle les mécanismes du contradictoire que sont
l'information (section I) et la communication (section II)
SECTION 1 : L'INFORMATION
L'étude de l'information suggère celle
de ses composantes (paragraphe 1) et de ses caractéristiques (paragraphe
2).
Paragraphe 1 : les composantes de l'information
Les composantes de l'information sont les parties (A) et
les outils (B). A/- les parties à l'information
L'information de la procédure administrative
contentieuse contient le juge rapporteur d'une part (1), et les parties d'autre
part (2).
1) Le juge rapporteur
Le juge rapporteur est une courroie de transmission,
un intermédiaire qui fait circuler les éléments du
dossier. Il est celui qui conduit la procédure d'instruction. Il est
désigné par le Président de la juridiction85.
De cette disposition, découlent donc ses qualités d'arbitre et
d'acteur. Puisqu'il arbitre un contentieux entre deux parties à savoir
le demandeur et le défendeur.
En appel et devant la chambre administrative,
après échange de mémoires ou à l'expiration des
délais fixés pour leur dépôt, le Président de
la chambre désigne un rapporteur et lui transmet le
dossier86. Il en est de même devant la chambre administrative
statuant en cassation87.
85Article 37 (1), loi
n° 2006/022 du 29 décembre 2006. 86 Article 84, loi
2006/016 du 29 décembre 2006 87Ibid, article
101
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Le juge rapporteur, à l'expiration de son
office, transmet son rapport sous pli confidentiel au Président du
tribunal qui en communique copie au Procureur Général,
également sous pli confidentiel88.
Dans la conduite de la procédure, le juge
ordonne la communication au défendeur de la requête du
demandeur89, il fixe les délais accordés à
chaque partie pour répondre90.
Le juge administratif a donc un rôle
prépondérant, il peut exiger de l'administration qu'elle
fournisse la preuve de ses allégations et les motifs de ses
décisions, il peut également demander aux parties toutes
pièces ou tous documents utiles à la solution du litige. Quant
à son pouvoir de décision, son étendue dépend de la
liberté d'appréciation qui lui est reconnu par rapport aux
questions que pose le litige à lui soumis. Ainsi, en ce qui concerne
l'objet du litige, le principe est que le cadre du procès est
déterminé par les parties et le juge ne statue que sur ce que
proposent les parties, d'où la limitation de son office par le principe
de l'immutabilité du litige. Ainsi, quant au fondement juridique des
prétentions des parties, « le juge a non seulement le pouvoir
de l'apprécier, mais aussi celui de le modifier
»91
2) Les parties
Les parties à l'information sont le demandeur
et le défendeur. En effet, le demandeur en saisissant le juge, se
désigne comme tel, car au nombre des mentions figurant dans la
requête introductive d'instance apparaissent les noms, prénoms,
profession et domicile du demandeur.
Le vocable partie est assimilé à celui
de requérant. Pour les professeurs AUBY et DRAGO, la mention noms et
domicile des parties vaut « indication du nom et du domicile du
requérant »92.
Quant au défendeur, il appartient
également au demandeur, par les conclusions de la requête et plus
précisément par l'introduction de sa requête de
désigner son adversaire comme défendeur93. «
Les conclusions déterminent quelles sont les parties au litige
»94 l'article 35 (1) de la loi n°2006/022 du 29
décembre 2006 n'attend plus les conclusions pour
déterminer
88 Articles 85-86,
102-103, loi 2006/016 ; voir également article 45 loi
2006/022
89 Article 38
(1), loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006.
90 Ibid. article
38 (2),
91 ibid. article
42, voir également articles 80,97 loi 2006/016 du 29 décembre
2006
92 AUBY (JM) et DRAGO
(R), traité de contentieux administratif, t1 pp
882-883
93 Article 35
(1), loi n° 2006 /022 du 29 décembre 2006
94 AUBY (J.M) et DRAGO (R)
op.cit. p.892
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les parties, cela étant déjà
disponible, voire incontournable du fait de l'obligation de désignation
du défendeur dans la requête introductive d'instance
déposée par le demandeur. Parce que la fonction du juge est de
juger, en disant le droit, il est donc nécessaire, que le demandeur
fasse connaitre la désignation du défendeur avec une
précision suffisante afin d'éviter l'irrecevabilité de la
requête.
En France, il arrive que le défendeur ne soit
pas désigné explicitement par le requérant, car les
dispositions législatives y afférentes disposent que cette
désignation se fasse dans les conclusions. Le Professeur CHAPUS de
rappeler que « le défendeur (...) peut être explicitement
désigné par le requérant, concluant à sa
condamnation (notamment, à des dommages-intérêts et qu'il
peut aussi être indirectement (et notamment, en cas de recours pour
excès de pouvoir) déterminé par ce qu'est la
décision attaquée, compte tenu de l'autorité dont elle
émane ».95Auquel cas on doit assimiler à
celle ou cette désignation est incomplète, un
élément au moins du dossier introductif d'instance qui vient
permettre au juge d'orienter la requête pour mettre en cause le
véritable défendeur : la décision attaquée, quand
sa production est obligatoire, suffit à identifier le défendeur,
car le défendeur à l'instance est alors tout simplement le
défendeur de la décision attaquée.
Le législateur camerounais a
évolué en indiquant que le demandeur doit désigner
explicitement le défendeur dans la requête introductive
d'instance.96 Aussi, ce défendeur doit être le
même que pour le Recours Gracieux Préalable
Après avoir identifié les parties
à l'information, il échoit de voir les outils de
l'information.
B/- Les outils de l'information
Les outils ici, se rapportent aux mémoires (1) et
aux pièces (2). 1) les mémoires
La demande en justice est un acte, un document, un
instrumentum,97 qui déclenche l'instance. Il s'agit
d'un écrit destiné à exposer et à soutenir la
prétention d'un plaideur, c'est-à-dire d'une partie à un
litige. Il ne constitue donc pas une requête sommaire, ni une
95 CHAPUS (R),
cité par GOHIN (0), op.cit. p.142
96 Article 35
(1), loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006
97 KAMDEM (JC) op.cit p
160
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dissertation savante de style académique que
rédigent de coutume les étudiants en fin de cycles dans les
écoles et facultés98.
Pour être recevable, toute demande introductive
d'instance doit réunir un certain nombre de conditions. D'abord la
requête est libellée sur papier timbré et signée par
son mandataire.99 Le représentant illettré qui n'a pas
de mandataire y appose son empreinte digitale100. Par ailleurs,
à la requête doivent être jointes des copies sur papier
libre, certifiées conformes par le requérant ou son mandataire,
aussi bien de la requête elle-même que des pièces
jointes101. Le rapporteur peut toutefois dispenser le
requérant de produire les copies des documents volumineux.102
Ces copies destinées à être notifiées aux parties en
cause, sont en nombre égal à celui des défendeurs plus
deux. Les requêtes collectives sont irrecevables sauf lorsqu'il s'agit
d'un recours dirigé contre un acte
indivisible103.
Toute requête introductive d'instance donne lieu
à la consignation d'une provision, sauf dispense résultant d'une
disposition législative expresse104, l'on constate
néanmoins une majoration de 5 000fcfa par rapport à la loi du 08
décembre 1975. Par ailleurs une consignation supplémentaire peut
être ordonnée par le Président de la juridiction en cas de
nécessité. Il faut savoir que les personnes morales de droit
public sont dispensées de la consignation.
La requête est déposée au greffe
compétent ou adressée par voie postale audit greffe. Elle est
enregistrée et datée à son arrivée105.
Elle doit contenir les noms, prénoms, professions et domicile du
demandeur, la désignation du défendeur, l'exposé des faits
qui servent de base à la demande, les moyens et
l'énumération des pièces produites à l'appui de la
demande106.La demande en justice doit être fondée sur
une cause juridique.
2) Les pièces
Les pièces de l'information sont
constituées des documents produits par les parties pour éclairer
le juge dans sa quête de la vérité. Il s'agit des
mémoires en défense, à savoir
98 KAMTO (M), Droit
administratifprocessuel du Cameroun, PUC, 1990, P.232
99 Article 35
(2), loi n° 2006/022 du 29 décembre 2006, voir aussi articles 76 et
92, loi 2006/016 du 29 décembre 2006
100 Idem
101 Article 36 (1), loi n° 2006/022 du 29
décembre 2006
102lbid, Article
36 (3),
103Ibid, Article
38,
104 lbid, Article 34 (1) ,
105lbid, Article
32
106Ibid, article 35
(1),
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celui établi par le défendeur, voire en
réplique c'est-à-dire celui que dépose le demandeur
à la suite du mémoire en défense déposé par
le défendeur ; et en duplique, à savoir celui que dépose
le défendeur contre les allégations du mémoire en
réplique du demandeur. Ceux-ci sont rédigés sur papier
timbré et déposé au greffe. Et sont notifiés par le
greffier au demandeur et les dispositions concernant la requête
introductive d'instance lui sont applicables.107
Toutefois, le dépôt de ces documents et
pièces est encadré dans les délais. Ainsi, en cas de
recevabilité de la requête, le rapporteur ordonne la communication
au défendeur qui a trente jours pour déposer son mémoire
en défense.108De même le rapporteur fixe dans
l'ordonnance de soit communiqué le délai accordé au
défendeur pour produire son mémoire en
défense.109 Lorsqu'il y a plusieurs défendeurs en
cause et qu'ils n'ont pas tous présenté de défense, le
rapporteur met les défaillants en demeure de
s'exécuter.110
Il ressort de ces dispositions que la production des
pièces peut être libre, de même qu'elle peut être
obligatoire, voire forcée.
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