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Le droit de veto au conseil de sécurité des nations-unies entre gage juridique d'une paix internationale d'exclusion et blocage politique du règlement des conflits.

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par Xavier MUHUNGA KAFAND
Université catholique du Congo (UCC) - Licence en droit  2015
  

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CHAPITRE 1. LE VETO, UN DROIT INIQUE AU SERVICE DE LA PAIX ET DE LA SÉCURITÉ INTERNATIONALES ?

Elaborée et adoptée au sortir de la Seconde Guerre mondiale, la Charte de l'ONU a pour toile de fond la recherche et le maintien de la paix et la sécurité internationales considérées comme prélude au développement plénier. La quasi-totalité de ses dispositions converge vers la matérialisation de ce postulat. Pour ce faire, la Charte dote l'ONU d'organes d'actions et de décisions dont le prééminent demeure le Conseil de Sécurité fondant sa notoriété, entre autres, sur les techniques spécifiques de son fonctionnement dans la prise des décisions. Le droit de veto, qui est ouvert aux cinq membres permanents du Conseil, leur conférant la possibilité d'assurer en fait la censure de grandes questions de la vie internationale, n'est pas étranger à ce penchant. Et L'usage de ce droit au sujet d'un conflit visé conduit parfois à empêcher la contagion de ce dernier d'une part ; et d'autre part, à faire barrière aux interventions onusiennes utilitaristes. On le constate certes, autant sous son étiquette de bouclier contre le risque du déversement des conflits armés nationaux sur les territoires de nombreux autres Etats du fait de leur entrée en danse dans les hostilités militaires que dans son costume de pourfendeur de toute manoeuvre d'instrumentalisation du Conseil de Sécurité des Nations Unies aux fins des campagnes militaires arbitraires et impérialistes par certains Etats, le droit de veto assure l'office de gardien de la paix et la sécurité internationales. Appelé à corriger les lacunes structurales de la Société des Nations dont le conseil était très pauvre en termes d'outils d'action de nature à résoudre efficacement et définitivement les conflits armés interétatiques et en l'occurrence son incapacité à prévenir, mieux à juguler la Seconde Guerre mondiale, le Conseil de Sécurité des Nations Unies est pourvu d'instruments et canaux de majeure envergure pour remblayer ce ravinement. A ce titre, le droit de veto au Conseil de Sécurité des Nations Unies est à la fois un outil novateur qui taille entre Etats membres un régime d'inégalité pointue sur une base juridique internationale40(*) et une marque de l'originalité normative de la Charte41(*) dans la conjonction des efforts de ses signataires à garantir au mieux la paix mondiale. C'est pourquoi Alain PELLET42(*) considère, non moins paradoxalement, le veto ainsi que le régime sournois de son usage comme relevant d'un droit des plus puissants Etats dont ils se servent pour préserver et porter toujours plus haut leurs intérêts partisans sur l'échiquier international. Dans l'autre sens, P. WEIL43(*) estime, pour sa part, que quoique paraissant discriminatoire, le droit de veto est de nos jours un rempart irremplaçable contre le regain du communisme et les assauts des alliances idéologiques de type féodal où le plus fort attire autour de lui les plus faibles qu'il protège et auxquels il assure une impunité généralisée44(*) en contre partie de leur allégeance. Delphine EMMANUEL ADOUKI45(*) affirme même que ce droit aura contribué au passage de l'homogénéité à l'hétérogénéité de la société internationale en s'érigeant en juste-milieu dans la délicate cohabitation des intérêts pluriels des Etats et en passerelle d'unité et de diversité dans le cours de la vie politique et normative internationale continuellement confrontée à de nouveaux défis.

A la confluence de ces opinions doctrinales, nous estimons, quant à nous, à la lumière des pesanteurs de la real politik et des signes des temps, que le veto parait un « droit inique » au service de la paix et la sécurité internationales.

Le décorticage de cette carapace que nous reconnaissons au droit de veto voudrait que l'on se penche d'abord, dans une première section, sur son analyse au double titre de prérogative novatrice de la Charte des Nations Unies dans l'optique de la consolidation de la paix générale et de mécanisme révélateur de la spécificité institutionnelle de l'Organisation des Nations-Unies comparativement à la Société des Nations dont le Pacte créateur souffrit d'une carence des moyens tant techniques que structurels efficaces de prévention et de règlement des conflits armés à portée internationale. Et nous nous appesantirons ensuite, dans une seconde section, sur l'examen de différents méandres inhérents aux motivations de l'usage de ce veto afin d'ausculter le fondement du caractère discrétionnaire qui l'environne de manière à déterminer le visage qu'il peut revêtir pour mieux éjecter le règne de l'arbitraire de la sphère internationale en faveur de l'intégration de l'ordre et la stabilité, fondés sur des relations pacifiques entre Etats.

SECTION 1. LE DROIT DE VETO, UNE SPÉCIFICITÉ INSTITUTIONNELLE DE L'ONU

Entre le 25 avril et le 25 juin 1945, les représentants de cinquante nations -- encore engagées dans la Seconde Guerre mondiale contre les puissances de l'Axe46(*) -- se réunissent en conférence à San Francisco, aux États-Unis. Ils doivent élaborer les statuts de la future organisation internationale, dont l'objectif est de réguler les conflits mondiaux et d'organiser la paix internationale. La Charte, signée le 26 juin 1945, est fondatrice de l'Organisation des Nations Unies (ONU). Celle-ci est une organisation internationale d'États nations fondée en 1945, sur le principe de l'égalité souveraine de ses membres, dans le but d'assurer la paix, la sécurité et la coopération internationales47(*).

Siégeant à New York, aux Etats-Unis, cette organisation se veut non un gouvernement supranational, mais un instrument flexible de collaboration et de coordination entre ses États membres, dont l'efficacité dépend plus de la volonté des gouvernements de chaque pays membre que de la structure de l'organisation elle-même, dépourvue d'une véritable autorité et d'une réelle indépendance48(*). C'est ce qui explique l'influence et le rôle fluctuants qu'exerce l'institution internationale sur les affaires du monde en fonction de l'état des relations internationales et, bon gré, mal gré, du rapport des forces : le droit de veto étant l'une des émanations de ce rapport des forces, plaçant les Etats membres permanents du Conseil de Sécurité qui en sont titulaires dans une haute posture. La consécration du droit de veto aux cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations Unies reste, avions-nous fait remarquer, l'oeuvre de l'article 27, alinéa 2 de la Charte. Et il s'avère établi que la ratio legis, l'esprit et la lettre mêmes de cette disposition ont toujours indéniablement reposé sur la volonté d'instaurer et de maintenir permanemment la paix mondiale, mieux un certain ordre politico-économico-social comme prémisse du développement sur l'échiquier international voulu dépourvu de guerres ou autres formes de conflits armés. Ce portrait retrace on ne peut mieux la vocation initiale du droit de veto au titre de gage juridique de la paix internationale destiné à prévenir d'autres catastrophes humanitaires ou hécatombes à la mesure de ceux engendrés par les deux fléaux conflictuels les plus dévastateurs de l'histoire en termes de perte en vies humaines49(*). A ce sujet, le préambule de la Charte fait de la pratique de la tolérance, de la recherche de la paix entre Etats dans un esprit de bon voisinage et de l'union des forces des Etats membres pour maintenir la paix et la sécurité internationales les fins essentielles de l'Organisation des Nations Unies.

Ainsi saisi, le veto peut être exercé par un membre permanent du Conseil de Sécurité en solo ou collégialement avec d'autres afin d'assurer la paix internationale en ce sens qu'il viserait à empêcher la réalisation d'une action qui aurait eu pour conséquence de briser l'équilibre de la paix et de fracasser l'élan sécuritaire mondial, paix et sécurité internationales étant indissociables telles deux manches d'une même chemise. Cependant, il sied de remarquer que cette « paix internationale » préservée a souvent tendance, dans ses effets, à exclure du champ de son bénéfice l'Etat dont le territoire est théâtre du conflit considéré et à donner quitus implicite à la poursuite graduelle des hostilités. Ici, le veto prévient une destruction de la paix mondiale par contagion qui découlerait d'une action ou d'un recours à la force armée sur pied d'une résolution du Conseil de Sécurité mais ne règle pas totalement le conflit en cours. Tels ont été les cas d'abord du veto posé le 2 décembre 1994 par la Fédération de Russie contre un projet de résolution visant une mission de maintien de la paix en Bosnie-Herzégovine alors en proie à une guerre civile aux consonances sécessionnistes et génocidaires, puis de celui exercé conjointement, à trois reprises50(*), par la République populaire de Chine et la Fédération de Russie contre la condamnation de la répression en Syrie des protestations contre le régime du Président Bachar al ASSAD et enfin de celui brandi par les Etats-Unis d'Amérique le 18 février 2011 contre la proposition d'arrêt de l'implantation israélienne en Cisjordanie. Ces trois territoires ont vu les conflits qui les étrillaient continuer à faire libre cours et ne pouvaient dans ces conditions tirer profit de la fameuse paix internationale ayant pourtant constitué l'argument moteur des différents vetos mis en branle. Ce qui revient à remettre en cause une considération aprioristique de la généralisation de l'internationalité de ladite paix.

En revanche, un Etat membre permanent peut aussi faire usage de son droit veto pour bloquer le passage à un autre Etat, fût-il aussi membre permanent, qui tenterait malicieusement de concrétiser ses ambitions hégémoniques sous la casquette des Nations Unies à travers une intervention militaire arbitraire au service des intérêts particuliers. Le veto que la France menaça d'opposer à toute tentative américaine d'obtenir l'aval du Conseil de Sécurité des Nations Unies pour une intervention militaire en Irak en 2003, laquelle intervention fut néanmoins réalisée au mois de mars de la même année sous la férule d'une coalition américano-britannique -dont le leitmotiv caché était l'éviction de Saddam HUSSEIN et l'éjection de ses 24 ans d'autocratie prédatrice -, en donne une illustration topique51(*).

Il nous paraît ainsi non moins utile, en vue de mieux cerner l'ossature systémique et les facteurs déterminants des mutations de ce droit de veto, de nous faire une description laconique de la structure organique de l'Organisation des Nations Unies qui va être au coeur de toutes nos analyses (paragraphe 1) avant de jeter un regard croisé sur quelques instruments juridiques de différence entre le Pacte de la SDN et la Charte de l'ONU (paragraphe 2).

Paragraphe 1. Les principaux organes de l'ONU52(*)

L'Organisation des Nations Unies se compose de six organes administratifs qui supervisent l'activité d'un certain nombre de comités, d'agences spécialisées et de fonds. Bien que l'Assemblée générale contrôle en théorie l'activité des cinq autres organes administratifs, c'est en fait le Conseil de sécurité qui exerce au sein de l'Organisation l'influence la plus importante. En effet, le Conseil décide en dernier ressort des actions qui doivent être entreprises par les Nations Unies et de l'admission de nouveaux membres. La Charte prévoit six organes principaux : l'Assemblée générale, le Conseil de sécurité, le Conseil économique et social, le Conseil de tutelle, la Cour Internationale de Justice et le Secrétariat.

· L'Assemblée générale53(*) est l'organe de délibération de l'ONU. Tous les États membres y sont représentés, et chacun d'entre eux dispose d'une voix. L'Assemblée générale tient des sessions régulières annuelles et peut tenir des sessions extraordinaires. Sur les questions ordinaires, les décisions sont prises à la majorité simple, les décisions importantes devant être adoptées à la majorité des deux tiers. L'Assemblée n'a pas de pouvoir de contrainte : ses décisions sont simplement des recommandations faites aux États membres, qui demeurent souverains ; elles ont cependant un poids important sur l'opinion mondiale.

L'Assemblée générale est au centre de l'ONU : elle admet les nouveaux membres, approuve le budget, crée des agences et lance des programmes afin de mettre en oeuvre ses recommandations -- les plus importants sont le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) et la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED). Enfin, elle nomme le secrétaire général et les membres des différents programmes et agences, et coordonne leur action par l'établissement de comités

· Le Conseil de Sécurité54(*) est le principal organe de maintien de la paix et la sécurité internationales des Nations Unies. Il compte 15 membres, dont cinq -- la Chine, la France, le Royaume-Uni, la Russie et les États-Unis -- détiennent un siège permanent ; les dix autres membres non permanents sont élus par l'Assemblée générale pour des mandats non immédiatement reconductibles, d'une durée de deux ans. Ces sièges sont pourvus sur une base géographique : l'ensemble des pays d'Asie, d'Afrique et du Proche-Orient détient cinq sièges, les pays occidentaux et l'Amérique latine en détiennent chacun deux, et les pays d'Europe de l'Est en occupent un. La présidence du Conseil est assurée pour une durée d'un mois par chacun des membres, dans l'ordre alphabétique des pays selon leur dénomination anglaise.

Les décisions du Conseil de Sécurité sont prises à la majorité de neuf membres pour les questions de procédure. Aucune décision ne peut être prise si un membre permanent émet un vote négatif (droit de veto). En d'autres termes, le Conseil de Sécurité n'est effectif que si ses membres permanents parviennent à un consensus. Ses décisions, appelées « résolutions », sont exécutoires immédiatement. C'est le seul organe de l'ONU qui, en vertu du chapitre VII de la Charte, peut ordonner une action de maintien de la paix pouvant allier des sanctions économiques à des mesures militaires, après avoir constaté l'existence d'une situation d'agression ou de menace contre la paix.

En outre, le Conseil de sécurité adresse des recommandations à l'Assemblée générale concernant les admissions de nouveaux membres et la nomination du secrétaire général. Il participe à égalité avec l'Assemblée à l'élection des juges à la Cour Internationale de Justice. Le Conseil dispose de deux commissions permanentes et d'un comité d'état-major, qui n'est actuellement pas en fonction ; le Conseil peut également établir des organes ad hoc.

Quand le Conseil de sécurité est saisi d'une question menaçant la paix, il recommande aux parties de régler pacifiquement leur différend et il peut alors jouer le rôle de médiateur. Si le conflit a commencé, il s'efforce d'obtenir un cessez-le-feu. En l'absence de solution pacifique, le Conseil peut adopter des résolutions allant de sanctions économiques à une opération militaire collective. Il sied de relever que le Conseil de Sécurité est l'organe qui intéresse le plus notre étude d'autant que le droit de veto qui est l'objet central de celle-ci s'exerce en son sein.

· Le Conseil économique et social55(*) des Nations Unies, appelé également ECOSOC (Economic and Social Council, en anglais), est l'un des six principaux organes créés par la charte des Nations unies en 1945, chargé des questions économiques, sociales, culturelles, humanitaires et éducatives qui se posent sur le plan international.

Composé des représentants de 54 pays, dont 18 sont élus chaque année pour une période de trois ans, L'ECOSOC, fondé à l'origine pour venir en aide aux pays d'Europe et d'Asie après la guerre, s'occupe aujourd'hui principalement des problèmes des nations en voie de développement. Il soumet ses recommandations, prises à la majorité simple, à l'Assemblée générale des Nations unies sous l'autorité de laquelle il est placé, et coordonne les activités des institutions de l'ONU spécialisées dans les différents domaines de sa compétence. Le Conseil économique et social, qui se réunit deux fois par an, à Genève et à New York, opère principalement par l'intermédiaire de ses comités permanents et de ses commissions techniques et régionales.

· Le Conseil de tutelle56(*) des Nations Unies est chargé de l'administration et de la surveillance des territoires placés sous l'autorité du système de tutelle internationale. Son rôle consiste à assister ces territoires dans leur évolution vers l'autonomie ou c l'indépendance. Il est composé des États-Unis, seule puissance à exercer, quand il y a lieu, une mission d'administration effective, de la Russie, de la Grande-Bretagne, de la France et de la Chine, tous membres permanents du Conseil de sécurité, mais seuls les quatre premiers pays cités siègent effectivement, la Chine s'abstenant de prendre part aux travaux du Conseil. L'action du Conseil peut être considérée comme efficace, dans la mesure où, depuis la mise en place du système, les onze territoires administrés sont sortis du régime de tutelle. Certains de ces territoires ont fusionné avec un État voisin, d'autres ont rejoint les Nations unies après avoir accédé à l'indépendance. En 1990, seul le territoire de Belau restait placé sous tutelle ; devenu une république autonome associée aux États-Unis, il accéda à l'indépendance en 1994. Sa mission étant devenue sans objet, le Conseil de tutelle ne s'est pas réuni depuis 1994.

· La Cour Internationale de Justice57(*) des Nations Unies est le principal organe judiciaire des Nations unies, créé en 1945, selon les dispositions de la Charte des Nations unies, pour succéder à la Cour permanente de justice internationale. La Cour fonctionne conformément à un statut qui lui est propre, annexé à la Charte des Nations unies. Sa principale tâche consiste à statuer sur les différends d'ordre juridique entre nations ou Etats ; elle ne peut, de ce fait, être saisie d'une affaire par l'action d'un particulier. Tous les États membres de l'Organisation des Nations Unies (ONU) sont parties au statut de la Cour Internationale de justice, tout comme les trois États non membres de l'ONU que sont la Suisse, le Liechtenstein et Saint-Marin. Une nation qui n'est pas partie au statut de la Cour peut recourir à cette dernière si elle accepte, à titre général ou particulier, de se soumettre aux obligations d'un État membre des Nations unies.

Conformément à l'article 94 de la Charte des Nations Unies, il existe deux procédures permettant de porter un différend devant la Cour. La première consiste à recourir au protocole de soumission à la Cour du différend par l'ensemble des parties. La seconde concerne l'application unilatérale des obligations par une seule des parties impliquées dans un litige. Par exemple, un pays peut prétendre que son adversaire a été contraint par les termes d'un traité particulier à se plier, dans le cas d'un litige, à l'autorité de la Cour. Une clause stipulée dans le statut de la Cour peut également permettre -- sans obliger pour autant -- les États parties au statut à reconnaître par avance comme obligatoire la juridiction de la Cour dans certains différends internationaux. Si deux parties en conflit ont exprimé leur consentement en la matière et que le litige reste dans le cadre dudit accord, l'une ou l'autre des parties peut porter le différend devant la Cour.

En octobre 1985, Ronald Reagan, alors président des Etats-Unis, mit officiellement fin à la politique menée de longue date consistant à se plier automatiquement aux décisions de la Cour Internationale de Justice, ramenant ainsi à 43 le nombre de nations reconnaissant comme obligatoire la juridiction de la Cour. L'initiative américaine eut pour effet d'affaiblir la Cour, déjà handicapée par le refus de principales grandes puissances, parmi lesquelles l'Union soviétique, la Chine, la France, l'Allemagne de l'Ouest et l'Italie de se plier à son autorité. La Cour rend ses jugements selon les principes généraux du droit international reconnus par les nations civilisées ainsi que selon les droits coutumiers et règlements internationaux régissant les traités et conventions acceptés par les parties en litige. La Cour invoque également les décisions judiciaires antérieures et les conclusions d'experts en droit international qui ont contribué à établir la jurisprudence. Le jugement de la Cour, qui doit faire état des raisons de sa décision, est définitif et irrévocable, sans aucune possibilité de recours. Le Conseil de Sécurité de l'Organisation des Nations Unies est habilité à prendre des mesures afin de faire appliquer la décision de la Cour si les parties en litige refusent d'exécuter l'arrêt. En réalité, la Cour Internationale de Justice ne dispose que de peu de moyens pour faire exécuter ses décisions. À titre d'exemple, en 1980, lorsque la Cour ordonna à l'Iran de libérer 53 otages américains, son injonction resta sans effet.

Outre l'arbitrage des litiges entre nations, la Cour peut donner des avis consultatifs, sur des questions juridiques, à l'Assemblée générale, au Conseil de Sécurité, et à d'autres agences spécialisées, autorisées par l'Assemblée générale à solliciter ces avis. Dans ce cadre, on peut citer le jugement de la Cour en 1962, selon lequel les dépenses destinées à maintenir la paix dans la République populaire du Congo et au Moyen-Orient représentaient les « dépenses de l'organisation » à payer par les États membres, selon la répartition établie par l'Assemblée générale.

· Le Secrétariat58(*) assure le suivi du travail de l'ONU. Il est présidé par un secrétaire général, nommé par l'Assemblée générale, sur recommandation du Conseil de Sécurité, pour un mandat de cinq ans renouvelable. Le rôle du « plus haut fonctionnaire de l'Organisation » est central : il assiste aux réunions de l'Assemblée générale dont il peut attirer l'attention sur une situation qui mettrait la paix en danger. Il doit aussi mettre en oeuvre les décisions de l'Assemblée et du Conseil. Son influence réelle dépend cependant fortement de la personnalité même du secrétaire général et de la marge de manoeuvre que lui laissent les membres permanents.

Ces différents organes furent mis en place en vue, notamment, de corriger les lacunes et insuffisances du Pacte de la Société des Nations, incapables de prévenir la Seconde Guerre mondiale.

Tout compte fait, le Pacte de la Société des Nations s'étant révélé défectueux dans son élan de maintenir la paix et son efficacité s'étant vue considérablement amoindrie à cause, notamment, d'un côté, de sa non ratification par les Etats unis qui furent pourtant parrains de sa rédaction et, de l'autre, de sa vocation réduite au maintien de « la paix entre alliés », la nécessité de repenser un autre modèle d'organisation interétatique était plus que jamais de mise pour redonner un nouveau souffle à la vie internationale et, surtout, ouvrir des horizons plus prometteurs en termes de garantie de la paix et la sécurité internationales. Pour ce faire, les puissances victorieuses de la Seconde Guerre mondiale convinrent d'adopter un texte, la Charte des Nations Unies, en vue d'étendre la démocratie et la coopération pacifique aux relations internationales. Ainsi située, la Charte des Nations Unies -que de nombreux auteurs qualifient de « Constitution des Nations Unies »- fut conçue sur la base de la « Charte de l'Atlantique », texte élaboré en août 1941 par le président américain Franklin Delano ROOSEVELT et le Premier ministre britannique Wintson Leonard Spencer CHURCHILL, complété en 1943, puis en 1944 par les représentants de grandes puissances, pour être finalement adoptée, le 26 juin 194559(*). Soucieux d'étendre la démocratie aux relations internationales, le texte de la Charte énumère un ensemble de règles de conduite destinées à assurer la sécurité internationale et le maintien de la paix. A cet effet, la Charte regorge des mécanismes plus manifestes, plus solides et novateurs en matière du renforcement de la paix et la sécurité internationales60(*), lesquels en constituent la force et la suprématie comparativement à ceux mis en place par le Pacte de la Société des Nations.

* 40 De nombreux auteurs tels Pierre Marie MARTIN, TRUYOL SERRA, Henry KISSINGER, etc. estiment en effet que l'article 27 de la Charte des Nations Unies, en accordant à cinq Etats le droit de veto au Conseil de Sécurité après que l'article 23 s'était chargé de conférer aux mêmes Etats le statut de membres permanents au dit Conseil, aura largement restreint les droits et libertés des dix autres membres. C'est ce constat qui postule le veto, renchérissent-ils, tel un droit inique.

* 41 Comparaison au Pacte de la Société des Nations de 1919.

* 42 PELLET, A., Art du droit et « science » des relations internationales, Paris, Economica, 1993, p. 353.

* 43 WEIL, P., « Vers une normativité relative du Droit International », in RGDIP, 1982, p. 5.

* 44 Laquelle situation d'impunité garantie par un Etat à un autre peut bien, en étant actualisée, s'appliquer à l'état de protection internationale que les Etats unis d'Amérique assurent à Israël pour lequel ils ne se cachent pas de prendre partie dans le conflit sexagénaire qui l'oppose à la Palestine dont il occupe illégitimement les territoires.

* 45 EMMANUEL ADOUKI, D., Droit international public. Tome 1 : Les sources, Paris, L'Harmattan, 2002, p. 313.

* 46 Coalition des pays opposés aux forces alliées pendant la Seconde Guerre mondiale, composée de l'Allemagne, de l'Italie et de leurs alliés. Cette coalition naquit de l'accord secret signé le 23 octobre 1936, connu sous le nom d'axe Rome-Berlin entre l'Allemagne national-socialiste dirigée par Adolf Hitler et l'Italie fasciste de Benito Mussolini. Une alliance militaire, le pacte d'Acier, fut signée en 1939. La coalition fut élargie avec l'adhésion du Japon, en septembre 1940, lors de la conclusion du pacte tripartite auquel furent incitées à se joindre les petites puissances de l'Europe sud-orientale : la Bulgarie, la Croatie, la Hongrie, la Roumanie et la Slovaquie. De plus, le Danemark, la Finlande, l'Espagne et les gouvernements pro japonais du Mandchoukouo et de Nankin, en Chine, furent intégrés à la coalition en tant que membres du pacte Antikomintern, signé par l'Allemagne et le Japon en 1936. À la fin de l'année 1944, l'Axe se trouva réduit à l'Allemagne et au Japon (avec des gouvernements fantoches au Mandchoukouo et à Nankin) et à quatre États partiellement libérés par l'Armée rouge, les forces anglo-américaines et les résistances intérieures (Hongrie, Croatie, Slovaquie et Italie). L'Axe disparut officiellement avec la ratification par les Alliés de la reddition sans condition de l'Allemagne le 8 mai 1945.

* 47 ROULAND, N., Aux confins du droit, Paris, Odile Jacob, 1991, p. 23.

* 48 TRUYOL SERRA, M., Histoire du droit international public, Paris, PUF, 1996, pp. 23-29.

* 49 Allusion faite aux deux Guerres mondiales dont la fréquence de décimation humaine et les horreurs des persécutions génocidaires cristallisées notamment par la Shoah ou l'Auschwitz en ont fait les plus sombres et suicidaires crises de portée internationale que l'humanité ait connues.

* 50 Respectivement le 4 octobre et le 04 février 2011 ainsi que le 19 juillet 2012.

* 51 Lire utilement à ce sujet CHARVIN, R., « La guerre anglo-américaine contre l'Irak et le droit international », in Actualité et droit international, avril 2003, pp. 16-21.

* 52 http//www.un.org// les-organes-de-l'onu-478357-html, consulté le 30 novembre 2014 à 16h 07'.

* 53 http//www.un.org// les-organes-de-l'onu-478357-html, consulté le 30 novembre 2014 à 16h 07'.

* 54 Idem.

* 55 http//www.un.org// les-organes-de-l'onu-478357-html, consulté le 30 novembre 2014 à 16h 07'.

* 56 http//www.un.org//, les-organes-de-l'onu-478357-html, consulté le 30 novembre 2014 à 16h 07'.

* 57Idem.

* 58 http//www.un.org//les-organes-de-l'onu-478357-html, consulté le 30 novembre 2014 à 16h 07'.

* 59 La Charte des Nations Unies a été approuvée le 25 juin 1945, à la fin de la Conférence des Nations Unies pour l'Organisation internationale, et signée le lendemain. Elle est entrée en vigueur le 24 octobre 1945, après avoir été ratifiée par la majorité de ses signataires. Composée de 111 articles, elle fixe les buts et les principes de l'ONU, énumérés plus particulièrement dans les articles 1 et 2. Le Statut de la Cour internationale de Justice fait partie intégrante de la Charte.

* 60 DELMAS-MARTY, M., « Le droit international en débat, ordre juridique et paix positive », in Le Monde diplomatique, juillet 2003, pp. 4-5.

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