B. De la nécessité de
légiférer sur la forme authentique et la possibilité de
faire la preuve du cautionnement par acte électronique
? Le législateur communautaire doit imposer la
forme authentique
Imposer la forme authentique pour la conclusion d'un contrat
ne serait pas une innovation en droit ivoirien.
Contrairement à l'acte sous-seing privé, l'acte
authentique n'est pas établi par l'une des parties (la caution ici) mais
par un officier public.
Ce qui est déjà un gage de
sécurité pour le créancier. Et l'acte authentique
présente des avantages que n'offrent pas forcement les actes sous-seing
privé pré-imprimés utilisés dans le cautionnement
bancaire. Avec un tel acte il serait difficile à la banque-caution
d'imposer sa volonté au créancier.
De plus, il échappe au formalisme de l'article 14
sus-énoncé. Formalisme qui s'accommode d'ailleurs mal du monde
des affaires du fait de la lenteur qu'il peut imprégner à
l'établissement des actes. Le seul inconvénient que nous pouvons
relever, c'est le coût des frais d'établissement de l'acte. Mais
disons-le, ces frais sont assez insignifiants pour les banques. C'est sûr
que l'acte sous-seing privé semble plus avantageux pour la caution. Il
est simple à établir et ne nécessite pas de
formalités (mis à part celles de l'article 14) et de frais
supplémentaires à la charge de la caution. La caution peut en
contrôler la rédaction. Mais dans un souci de protection du
créancier
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et d'équité, il serait opportun d'imposer la
forme authentique pour les cautionnements bancaires. Ne serait-ce que pour les
montants importants garantis.
Cette forme est adoptée en Suisse pour les actes de
cautionnement des personnes physiques61.
En résumé, la preuve du cautionnement bancaire
est faite par un acte pré-imprimé établi par la
banque-caution. Elle peut cependant prendre la forme d'un acte authentique qui,
selon nous, devrait être la forme obligatoire.
? Peut-on faire la preuve du cautionnement bancaire
par acte électronique ? A côté de ces formes
d'écrits traditionnels, il existe une forme que l'acte uniforme passe
sous silence mais que le monde des affaires tend à utiliser de
façon assez récurrente. C'est la forme électronique.
Une question s'impose alors : En l'état actuel de notre
Droit peut-on faire la preuve du cautionnement bancaire par acte
électronique ?
Cette question s'impose pour deux raisons :
D'abord l'ampleur et l'importance qu'a pris l'outil
informatique dans les activités bancaires ces dernières
décennies. La grande majorité des opérations, notamment
les transactions, des banques se fait à l'ordinateur. On parle
même de banque en ligne pour évoquer l'activité bancaire
via l'internet.
Il arrive donc que la banque contracte par le biais d'internet
et ce, au travers d'actes dits actes électroniques62.
L'acte électronique est devenu inévitable dans
le domaine bancaire. Ensuite, il y'a le silence de la loi sur ce mode de
conclusion de contrats qui, lui aussi, prend de l'ampleur dans le monde des
affaires.
61 Article 493 alinéa 2 du code des
obligations suisse : « lorsque la caution physique est une personne
physique, la déclaration de cautionnement doit revêtir la forme
authentique conformément au lieu où l'acte est dressé. Si
le cautionnement ne dépasse pas les 2000f, il suffit que la caution
écrive de sa main, le montant à concurrence duquel elle est tenue
et le cas échéant, qu'elle s'engage en qualité de caution
solidaire (...) ».
62 Un acte électronique (document
numérique) est « est une forme de représentation de
l'information consultable à l'écran d'un appareil
électronique. L'affichage de ce type de document peut être
apparenté soit au « document » même, ou soit à
l'interface logicielle. Suivant l'intervention d'applications informatiques
dans une partie de son contenu, les changements dans l'organisation logique de
ses données peuvent être apportés »
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Moyen de célérité et même de
sécurité, la forme électronique correspond bien au monde
des affaires. Il est alors assez surprenant que le législateur OHADA
soit resté muet sur ce mécanisme. Et pourtant, Il y'a
nécessité à le consacrer de façon expresse.
Il ne faut cependant pas omettre de préciser les
difficultés pratiques que peut engendrer un cautionnement bancaire
électronique. D'abord, il y'a les difficultés dues à la
méconnaissance de l'outil informatique. Il va de soi que pour pouvoir
passer un contrat électronique, il faut avoir une maîtrise de
l'outil informatique. Ce qui n'est malheureusement pas le cas pour beaucoup
d'Ivoiriens. Cet « illettrisme informatique » peut être
problématique à bien des égards. Le mécanisme
étant nouveau, il faudra former les parties sur ses différents
contours pour en faciliter l'adoption. Ensuite, on peut relever la
difficulté relative à la protection des données contenues
dans l'acte de cautionnement électronique. C'est pour pallier
d'éventuelles difficultés que le législateur ivoirien a
adopté la loi sur la protection des données
personnelles63. Il n'a cependant pas encore édicté de
règles spéciales sur la consécration de l'acte
électronique comme moyen de preuve des contrats, mais on peut affirmer
qu'il a déjà emboîté le pas à son homologue
de l'OHADA sur la question de l'acte électronique. Par une loi du 30
juillet 2013, il a réglementé les transactions
électroniques64.
Ce qui semble être un pas vers la consécration de
l'acte électronique comme moyen de preuve. Si on peut passer des
transactions électroniquement, on peut bien en faire la preuve
électroniquement aussi. Cette loi consacre le commerce
électronique en son article 1er :« Au sens de la
présente loi, on entend par commerce électronique, toute
activité économique par laquelle une personne propose ou assure,
à distance et par voie électronique, la fourniture de biens et la
prestation de services ».
Le cautionnement bancaire étant une activité
économique de prestation de services exercée par la banque, il
entre dans le cadre de ces dispositions légales. La banque et le
créancier peuvent donc conclure un contrat sous forme
électronique. Le cautionnement bancaire peut être passé
sous forme électronique.
63 Loi n°2013-430 du 19 juin 2013 relative
à la protection des données à caractère
personnel.
64 Loi n°2013-546 du 30 juillet 2013
relative aux transactions électroniques.
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Il faut néanmoins préciser que, bien que
présentant de nombreux avantages, l'acte électronique n'en
demeure pas moins risqué, notamment quand il s'agit de protéger
des données personnelles.
Pour conclure sur ce point nous disons qu'en Côte
d'Ivoire le cautionnement bancaire peut bien être passé par voie
électronique.
Cependant notre droit de la preuve ne contient pas encore de
dispositions quant à la preuve électronique des contrats. Le
législateur ivoirien devrait y penser.
Qu'il soit sous seing-privé ou authentique, l'acte de
cautionnement, pour faire foi de preuve, doit contenir un certain nombre de
mentions.
Nous les relevons.
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