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La responsabilisation du secteur privé dans le contrôle des exportations de défense en France. Quelles perspectives pour la commercialisation d'armements ?

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par Yann Wendel
Université Panthéon-Assas Paris II - Master 2 Défense et Dynamiques Industrielles 2016
  

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2. L'investissement accru de l'Etat dans l'organisation interne des entreprises

Depuis la fin de la guerre froide, le rôle de l'Etat s'est progressivement amoindri dans les entreprises de défense en raison de leur plus grande ouverture aux marchés, ce qui a contribué à peu à peu remettre en cause le cadre national du contrôle. Toutefois, dès le début des années 1990, la nécessité de laisser une marge de manoeuvre plus importante au secteur privé se faisait sentir, tout en renforçant le contrôle de l'Etat à travers le contrôle des exportations d'armement131. En effet, du fait de leurs activités, qui répondent directement à une demande publique de mise en oeuvre de politique de défense et de sécurité, les entreprises de défense doivent être encadrées bien en amont du processus, au niveau de l'entreprise même132. Après le 11 septembre 2001, la puissance publique s'est réinvestie dans le contrôle des exportations, vecteur de réaffirmation de la souveraineté de l'Etat dans ce domaine régalien.

Cette évolution s'est toutefois réalisée de manière renouvelée, car aujourd'hui, l'Etat n'est plus présent seulement au moment du passage en douanes, qui est d'ailleurs de moins en moins pertinent pour une grande partie des problématiques de contrôle, mais s'implique directement dans la vie commerciale de l'entreprise et dispose d'un droit de regard dans leurs processus internes, du fait d'une redéfinition de ses priorités de contrôle. Les entreprises sont alors d'une part dotées d'une plus grande autonomie à l'aide de procédures allégées de contrôle pour les transactions peu risquées, alors que d'autre part les Etats se concentrent davantage sur les transactions les plus sensibles en termes d'utilisateur final et d'utilisation finale, pour lutter contre la prolifération. De ce fait, les entreprises d'armement, souvent privatisées, adoptent une structure interne adaptée aux contraintes étatiques qui s'appliquent à elles.

Ainsi, dans le cadre de coopérations industrielles interétatiques, l'Etat renforce sa présence en traitant des questions de sécurité industrielle dans un Mémorandum of Understanding, afin d'encadrer les échanges d'informations qui correspondent à un savoir-faire national par un texte officiel. Les programmes de souveraineté concernant des entreprises de défense multinationales sont alors réservés aux seuls nationaux (programmes « French eyes only ») et les risques de transfert de technologie sont identifiés et contrôlés en

131 SCHWARTZBROD A. (1992), Industries d'armement : le rôle de l'Etat appelé à s'inverser, Les Echos. Disponible sur : http://www.lesechos.fr/08/12/1992/LesEchos/16282-047-ECH_industries-d-armement--le-role-de-l-etat-appele-a-s-inverser.htm [Accès le 16 janvier 2016].

132 MAMPAEY L. (2016), Herstal : le piège de la privatisation, Les publications du GRIP. Disponible sur : http://www.grip.org/fr/node/1923 [Accès le 12 avril 2016].

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priorité. C'est le cas du groupe Airbus, entreprise multinationale dont les activités liées à la dissuasion nucléaire ne sont gérées que par des ressortissants français.

Le passage à un mode de fonctionnement plus collaboratif affecte également les entreprises duales. En effet, même une entreprise dont les activités de défense sont marginales devra développer de nouvelles relations avec les instances publiques à travers la dimension du contrôle des exportations, obligatoire concernant les biens à double usage. A cet effet, elle devra intégrer un certain degré de logique administrative dans son organisation interne et mettre en place des processus de gestion et validation pour tenir compte des risques sécuritaires engendrés par la sensibilité des produits qu'elle commercialise. Ces entreprises doivent identifier leurs produits sensibles sur des listes et identifier les situations potentiellement problématiques, en introduisant une démarche d'évaluation des risques liés au client. Les Règlements des biens à double usage ont ainsi changé les procédures de contrôle de certaines entreprises civiles, avec le recours au « French eyes only » ou « black programs », soulignant le rôle de l'Etat pour protéger le secret lié aux technologies de défense à travers des audits de sécurité notamment133.

Il y a ainsi une double implication du contrôle : d'un côté, certaines compétences industrielles s'étendent dans un domaine régalien nouveau et, de l'autre, l'Etat s'implique davantage dans la vie des entreprises. L'Etat et l'industrie se rapprochent donc pour analyser les risques et les traiter de manière conjointe et rationalisée.

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