PARAGRAPHE 2 : Les manquements au traitement spécial
et différencié
Le principe du traitement spécial et
différencié accordé aux PED se heurte essentiellement
à deux difficultés. Celles-ci renvoient, d'abord à son
caractère facultatif ou tout au moins non
176 Voir, l'article 27§2 du Mémorandum
d'accord
177 Article 21§7 du Mémorandum d'accord
178 Article 21§ 8 du Mémorandum d'accord
contraignant (A), ensuite au risque de
prééminence des rapports de force dans la mise en oeuvre de
décisions et les recommandations de l'ORD(B).
A) Le caractère non contraignant du principe de
traitement spécial et différencié
Si nous regardons de près, à travers les
dispositions du MARD visant le traitement spécial et
différencié accordé au pays en développement,
serons-nous en droit de penser que ce principe ne relève que de la
recommandation faite par les membres de l'OMC. En effet, le MARD a
utilisé le mode conditionnel pour préciser ce principe qui doit
être pris en compte dans le règlement des litiges. Il convient de
remarquer que l'utilisation du mode conditionnel en droit international public
s'identifie textuellement à ce que l'on pourrait appeler une «
invitation » ou tout au plus une « recommandation ». Or, la
recommandation, selon une opinion répandue et acceptée au sein
même des Nation Unies, s'appréhende négativement.
C'est-à-dire qu'elle souffre de force obligatoire.
Généralement, la recommandation est perçue au sein de la
Société internationale comme un principe à valeur
politique ou simplement morale.179 Par ailleurs, il faut dire que le
mécanisme de règlement des différends de l'OMC ne
précise aucune sanction efficace si toutefois il y'aurai violation de ce
principe. Effectivement, au cours des consultations, le MARD se limite
simplement à inviter, comme le prévoit l'article 4 paragraphe 10,
les Etats membres à « accorder une attention spécial aux
problèmes et intérêts particuliers des pays en
développement.» Plus loin encore, relativement aux rapports du
groupe spécial, il précise en son article 12 paragraphe 11 que
lorsque l'une des parties est un « pays du Sud », le rapport du
groupe spécial « indiquera » expressément « la
façon dont il aura été tenu compte des dispositions
pertinentes sur le traitement différencié et plus favorable pour
les pays en développement Membres, qui font partie des accords
visés et qui auront été invoquées par le pays en
développement Membre au cours de la procédure de règlement
des différends. » En fin, dans le cadre de la surveillance et
de la mise en application des recommandations et décisions tel qu'il est
précisé à l'article 21 paragraphe 8, au cas où un
recours est déposé par un PED membre, l'ORD, en examinant quelles
mesures « il pourrait être approprié de prendre
», tiendra compte non seulement des échanges visés par
les mesures en cause mais aussi de leur incidence sur l'économie des
pays en développement, membres concernés. Disons qu'il n'est
prévu aucune disposition qui contraint les Etats membres, lorsqu'un pays
en développement est plaignant, à changer leur comportement dans
les échanges multilatéraux.
Il serait donc utopique de croire que, sur la base du principe
du traitement spécial et différencié que d'aucuns
considèrent de « soft law »180 et avec les bons
offices du Directeur général ou du Président de l'ORD, il
aura une quelconque amélioration de la pratique des Etats
développés devant l'ORD. Ce qui risque d'arriver dans la mise en
application des décisions et des recommandations de l'ORD.
179 Voir, M. VIRRALY, « La valeur juridique des
recommandations dans les organisations internationales », AFDI,
1956, Vol 2, n° 1, p 66
180 A. FONDIMARE, op.cit. p 69
181 Ph. VINCENT, « L'impact des négociations
d'Uruguay round sur les pays en voie de développement », RBDI.
1995. Vol 2, p 511
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