B) Le risque de prééminence des rapports
de force dans la mise en oeuvre des décisions et recommandations
Dans un système juridictionnel largement «
inter-étatique » comme celui de l'ORD, la mise en application des
décisions peut être sanctionnée par une certaine
réticence de la part des parties en conflits, surtout si lorsque le
condamné occupe une place très importante dans un tel
système. Nonobstant son intention de trancher les différends
conformément aux règles et principes de l'OMC,
c'est-à-dire une solution mutuellement acceptable, l'ORD est
confronté à cette triste réalité irréfutable
dans les relations internationales : les rapports de force.
Il ne faut toutefois pas perde de vue que le système de
règlement des différends de l'OMC n'ignore aucunement cette
réalité. D'ailleurs, c'est la raison pour laquelle la mise en
oeuvre des décisions et recommandations se fait dans une timidité
avérée à tel point que l'on se doute même de
l'efficience de celles-ci. En effet, dans un système aussi
déséquilibré les plus faibles vont forcément subir
les astuces des puissants ; ce qui fait que le MARD, en tenant compte de cette
réalité, s'efforce de prévoir des décisions et
recommandations qui vont de la compensation aux mesures de rétorsion.
Or, ce qui devrait être le cas, c'était d'obliger le membre
incriminé à retirer immédiatement sa mesure
préjudicielle. En analysant le fonctionnement de l'ORD, l'on se rend
compte qu'aucune procédure visant à obliger un Etat à
enlever sa mesure compromettante n'est prévue. Dès lors, dans la
mesure où un pays économiquement faible est victime des
comportements illicites d'un pays développé, il serait moins
convainquant d'espérer que l'autorisation donnée au premier de
retirer des concessions offertes au second puisse, de quelconque manière
que ce soit, modifier la politique commerciale de ce dernier. Ainsi, la seule
solution favorable aux pays en développement aurait été la
possibilité d'ordonner des mesures collectives de rétorsion
contre l'Etat développé reconnu coupable. Cependant, force est de
croire qu'il n'est bien entendu guère question pour les Etats
développés d'accepter la possibilité de telles
mesures.181
Nous venons de voir le fonctionnement du mécanisme de
règlement des différends nés des relations commerciales
entre Etats, membres de l'OMC en montrant qu'il y'a eu des avancées
remarquables dans le système de résolution des conflits au sein
de l'OMC à la grande différence de celui du GATT. Ce qui nous a
permis de le considérer comme original dans la mesure où il est,
non seulement interétatique mais également global et
intégré. En outre, nous l'avons perçu comme efficace dans
le sens où il adjoint la diplomatie à la procédure
judiciaire dans le règlement des différends. De surcroît,
il tente d'accorder, un traitement spécial et différencié
aux PED membres, même si celui-ci s'est révélé dans
la pratique entaché de quelques limites.
Retenons toutefois que si les conflits opposant les Etats
membres de l'OMC sont tranchés par l'ORD, il ne faut point oublier que
ceux qui les opposent aux opérateurs économiques
étrangers, par leur complexité et l'enjeu des
intérêts en cause, sont souvent portés à la
connaissance de l'arbitre.
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